Rapport Verhofstadt ou comment sortir de l’ornière ? (3/6)

Vers une Gouvernance économique de l’Europe ?

, par François Laumonier

Rapport Verhofstadt ou comment sortir de l'ornière ? (3/6)

Le député européen Guy Verhofstadt a proposé au Parlement européen de se positionner comme force de proposition dans les crises qui traversent l’Union européenne actuellement. L’Union des Fédéralistes Européens (UEF) a décortiqué le rapport pour vous et vous propose cette semaine une présentation et une analyse des différentes propositions. Le rapport est en cours d’amendement au Parlement (nous n’avons pas eu les amendements encore) et doit être discuté en plénière en décembre.

Guy Verhofstadt dresse un constat sans appel et propose des solutions radicales afin de doter l’Union de capacités d’action et de réaction pour des politiques économique et monétaire indépendantes, cohérentes et intégrées. L’objectif est à la fois que l’Union récupère des compétences que les Etats membres se sont révélés incapables de gérer avec efficacité, en favorisant coopération et solidarité, assorties à des obligations strictes, qui trancheront avec les dérapages permanents et la concurrence qui prévalent actuellement. Il entend également donner corps à la puissance économique et financière de l’Union européenne en lui donnant des outils suffisamment efficaces pour peser de tout son poids sur la scène internationale, en toute indépendance des Etats membres.

Doter la Zone Euro d’un budget propre

A ce jour, l’Union européenne ne dispose d’aucune ressource propre. Son budget dépend du bon-vouloir des Etats membres au sein du Cadre Financier Pluriannuel. Au lieu de bénéficier d’un élan commun de générosité, l’Union a sans cesse dû négocier avec les Etats pour se financer, ce qui a donné lieu à des épisodes mémorables, dont le non moins célèbre « I want my money back » de Margaret Thatcher. Quoi de mieux que de profiter de la sortie de nos amis britanniques pour enfin doter l’Union d’un véritable budget propre à la hauteur de ses ambitions ?

Non seulement l’Union disposera de ressources propres pour gérer son budget, en toute indépendance des Etats membres, mais elle aura la capacité d’emprunter, ce qui lui permettra d’assumer des fonctions plus larges au service des citoyens. La dette levée pour le financement de son budget bénéficiera nécessairement à l’ensemble des Etats membres. Naîtra ainsi une réelle solidarité interétatique au sein de l’Union, où l’excellente signature des Etats vertueux permettra à l’Union d’emprunter à des conditions très favorables au profit des Etats les plus fragiles. Par ailleurs, ces derniers seront moins sujets aux attaques spéculatives des marchés financiers.

En contrepartie, Guy Verhofstadt préconise de fusionner les différentes règles de convergence et procédures de mise-à-pied, actuellement en place, en un Code de Convergence, juridiquement contraignant. Jusqu’alors, ses règles ont été très largement ignorées par les Etats membres, la France en tête. L’adoption d’un Code de Convergence est une contrepartie logique de la mise en commun d’une partie des dettes et des budgets. Son caractère contraignant limitera les dérives budgétaires des Etats. Il garantira surtout la pérennité à long terme de la monnaie unique.

Transformer la BCE en une véritable Banque Centrale de réserve au service de l’Union

L’indépendance budgétaire va de pair avec une indépendance monétaire. Le rapport Verhofstadt préconise de confier à la BCE un vrai rôle de banque fédérale. Elle disposera notamment de la capacité de prêter aux Etats membres dans le cas où ces derniers ne parviendraient plus à se financer sur les marchés de capitaux. Terminées les attaques spéculatives contre des Etats déjà fragiles ! Terminées les crises de liquidité et les faillites d’Etats, incapables de rembourser une dette trop lourde et des intérêts exorbitants ! Les Etats bénéficieront de conditions d’emprunt plus favorables et surtout de temps pour se réformer à l’abri des pressions de marché.

Les banques de l’Union devront aussi répondre de leurs actions devant la BCE. Depuis la crise de 2008, de nombreuses voix dénoncent le rôle des banques dans le creusement des déficits publics des Etats venus à leur secours. La politique d’Union Bancaire, déjà engagée par la Commission, doit limiter le risque de faillite du système bancaire, or la lenteur d’assainissement des banques européennes depuis la crise fait peser un risque systémique important sur l’économie de la zone Euro dans son ensemble. Guy Verhofstadt préconise l’achèvement rapide de l’Union Bancaire, sous l’égide de la BCE. Elle constituera une sécurité supplémentaire pour les banques elles-mêmes, l’économie de la Zone Euro, et donc l’emploi, ainsi que l’épargnes des citoyens. Par ailleurs, un système financier fort va de pair avec une monnaie forte et reconnue comme fiable sur le plan international.

La BCE deviendra ainsi un levier efficace de l’indépendance financière de la Zone Euro. Elle disposera de tous les outils nécessaires à la bonne gestion de la monnaie, afin que celle-ci complète et soutienne la politique budgétaire de l’Union et des Etats membres.

Un Ministre des Finances de l’Union en chef d’orchestre

L’application des politiques économiques et budgétaires de l’Union passe par l’établissement d’un pouvoir de référence fort, reconnu comme tel à la fois par les Etats membres et par les instances internationales. C’est pourquoi Guy Verhofstadt envisage la création d’un poste de Ministre des Finances de l’Union européenne au sein de la Commission. Il gérera le budget de l’Union européenne et mettra en œuvre les politiques économiques communes. Il veillera au respect du Code de Convergence par les Etats membres et disposera de pouvoirs suffisants pour contraindre les Etats réfractaires. Enfin, il représentera l’Union auprès de l’OMC, du FMI et de la Banque Mondiale. En clair, il deviendra le second membre, et non le moindre, d’un Gouvernement Fédéral embryonnaire, aux côtés du Président de la Commission.

Vos commentaires
  • Le 9 novembre 2016 à 10:56, par Frankie Pérussault En réponse à : Vers une Gouvernance économique de l’Europe ?

    Un ministre fédéral des finances, bien sûr, ça va de soi il me semble. Mais qui « nomme » ce ministre ? Il n’y a pas de Président élu de cet Etat fédéral de l’EU. Ne mettons pas la charrue devant les boeufs, mais derrière ! Il est question d’un référendum sur tous les Etats de l’Union. Pourquoi ne pas poser la question brûlante là, maintenant ? Qui préféreriez-vous comme Président de l’Europe : 1. Jean Braye 2. Jacques Selers 3. Ann Honime 4. Jean Foutre. Les deux noms qui recueilleraient le plus de suffrage seraient ensuite mis en campagne pour une élection présidentielle européenne à un tour au suffrage universel. Un peu d’audace ne gâterait rien à l’affaire !

  • Le 15 novembre 2016 à 07:20, par Ivan En réponse à : Vers une Gouvernance économique de l’Europe ?

    Dis comme ça, ce rapport a l’air super. Mais j’imagine qu’il y a des points négatifs aussi, non ?

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