Carton rouge à Mme Ashton, marionnette étrangère aux affaires

, par Waël Salem

Carton rouge à Mme Ashton, marionnette étrangère aux affaires

Même si l’Union européenne est aujourd’hui un acteur économique de premier plan, force est de constater qu’elle demeure un véritable nain politique et diplomatique incapable de se faire entendre d’une voix puissante. Non, en lieu et place, nous ne pouvons qu’assister au spectacle navrant auquel les Etats membres de l’UE se livrent, à savoir une foultitude de pays ne pouvant se résigner à accepter le fait que leur influence individuelle est devenue peu ou prou négligeable, alimentant ainsi rivalités mal placées et dissonances diplomatiques au sein même de l’Union.

Or la diplomatie est une fonction vitale pour tout Etat qui se respecte, lui permettant de défendre ses intérêts et d’asseoir sa souveraineté face aux autres puissances de notre monde, peu disposées à prendre au sérieux ni même à suivre une pseudo-fédération dont les membres semblent incapables de se mettre d’accord.

Hélas, tout porte à croire que la politique diplomatique de Mme Ashton ne participe en rien à l’édification d’une diplomatie européenne unie, cohérente et forte, bref, à même de défendre efficacement les intérêts des Européens, bien au contraire.

Un profil aux antipodes des qualités requises pour le poste

Ministre des affaires étrangères, en voilà un poste des plus prestigieux, une fonction de premier plan et essentielle au fonctionnement d’un Etat qui ne saurait se couper du reste du monde, a fortiori lorsque ce dernier n’est devenu rien d’autre qu’un « village planétaire » à l’heure de la mondialisation. Il est donc bien normal de penser qu’une telle fonction requiert des qualités précises, nombreuses et indispensables, ainsi qu’un investissement personnel important de la part de celui – ou celle – censé(e) l’incarner.

Or manifestement, Mme Ashton n’est pas taillée pour être notre ministre des affaires étrangères, loin de là d’ailleurs. Que penser d’un diplomate ne maîtrisant aucune autre langue que sa langue d’origine ? Rien, c’est tout bonnement impensable. Certes, l’anglais est aujourd’hui ce qui se rapproche le plus d’un langage universel, inutile de remettre en question - ou même de juger - ce fait. Néanmoins, la diplomatie consiste entre autres choses à l’envoi de symboles, et pouvoir s’exprimer dans la langue de son hôte fait partie de ces messages forts à même de faciliter les rapports entre deux nations. Nous n’exigeons pas de notre ministre des affaires étrangères qu’il parle parfaitement 12 langues étrangères, ce serait absurde et peu réaliste, mais pouvoir s’exprimer à peu près correctement dans deux ou trois autres langues nous semble être le minimum. Notons d’ailleurs que Mme Ashton semble moins compétente sur ce point-ci qu’un diplomate lambda parlant en général couramment la langue de son pays d’affectation.

Autre fait révélateur : Mme Ashton ne possède toujours pas d’appartement à Bruxelles, la capitale européenne. Notre capitale. Ainsi, dès qu’elle le peut, elle s’envole vers Londres pour retrouver sa famille. Voici une conception fort étonnante de la manière de remplir ses fonctions de chef de la diplomatie d’une Union dont la population avoisinera bientôt le demi-milliard d’âmes. Imaginons un instant que M. le Premier Ministre Brown fasse sans arrêt le voyage entre Londres et Glasgow, sa ville natale, snobant le 10 Downing Street. Il est peu probable que les Britanniques l’acceptent. C’est la même chose pour les Européens que nous sommes : il est proprement scandaleux que Mme Ashton refuse de se doter d’un appartement dans la capitale de l’Union qu’elle est censée représenter à l’étranger ! Nous le répéterons autant de fois que nécessaire Mme Ashton : la diplomatie est affaire de symboles, et celui que vous nous envoyez en dédaignant de la sorte Bruxelles ne nous plaît pas. Pas du tout même.

Enfin, ce désintérêt scandaleux de Mme Ashton pour son poste a des conséquences désastreuse pour la diplomatie européenne. Rappelons que Mme Ashton a préféré passer un week-end à Londres plutôt que d’aller nous représenter là où la situation l’exigeait. En l’espèce, à Port-au-Prince dévasté par le séisme du 12 janvier dernier. Alors que l’UE devait faire entendre sa voix, devait proposer son aide au peuple haïtien meurtri, une aide que Mme Ashton devait incarner, cette dernière a raté le coche, expliquant pitoyablement peu après que sa présence était inutile voire indésirable car elle n’est « ni médecin, ni pompier ». Comment Mme Ashton peut elle décemment nous soutenir une idiotie pareille ?! Les Etats-Unis, eux, ne s’y sont pas trompés : Mme Clinton était sur place à l’instant même où Mme Ashton était, parait-il, au Foreign office britannique. En passant, que faisait-elle là-bas ? Penserait-elle être hiérarchiquement soumise à la diplomatie du Royaume-Uni ? Dans un autres ordre d’idées, signalons que Mme Ashton ne peut connaître des dossiers classés « secret défense », faute d’habilitation. Consternant. Surtout lorsque l’on sait que la liste de ses « bourdes » est encore longue. Très longue.

Une politique étrangère européenne inexistante pour le plus grand bonheur des Etats-membres

Toutefois, si l’incompétence et le manque flagrant de motivation de Mme Ashton nous consternent, ce n’est pas le cas de tout le monde. En effet, bien d’autres responsables politiques « s’accommodent » fort bien de cette ministre des affaires étrangères à la gestion fantomatique.

Ainsi, M. Barroso en profite-t-il pour placer ses pions dévoués à des postes clefs de la diplomatie européenne, dépossédant notre chère ministre d’une partie non négligeable de ses compétences. D’ailleurs, M. Barroso a déjà signifié à Mme Ashton son désir de rencontrer lui-même les chefs d’Etats étrangers, reléguant celle-ci au rang de potiche, tandis que la Commission espère bien lui dérober la direction du futur service diplomatique européen... Décidément, Mme Ashton fait preuve d’une combativité bienvenue pour s’imposer à la tête de son ministère et face aux autres institutions européennes.

Autres bénéficiaires de ce véritable naufrage institutionnel et diplomatique : les Etats-membres de l’Union peu disposés à lui déléguer cette compétence si intimement liée à leur propre souveraineté qu’est la gestion des affaires étrangères. Bien que compréhensibles, ces réticences demeurent toutefois inexcusables : il est grand temps que les Etats qui composent l’UE comprennent qu’ils n’ont aucun intérêt à faire perdurer ce système bâtard, flottant mollement entre la confédération et la fédération. Certes, il faut reconnaître qu’il s’agit là d’une décision difficile et électoralement peu vendeuse, mais l’Union ne peut plus continuer à n’être qu’une entité politiquement négligeable aux contours vaporeux, indéfinis. Les nations européennes, dans leur individualité, n’ont plus les moyens de leurs prétentions diplomatiques, il leur faut maintenant s’unir et achever le lent mouvement d’unification qu’incarne l’Union européenne si elles souhaitent peser réellement dans les relations diplomatiques de demain.

Mais pour l’heure, nous ne pouvons que déplorer le sabotage en règle du poste de chef de la diplomatie européenne consciencieusement réalisé par Mme Ashton. Reconnaissons-lui l’excellence de son travail de sape : nul doute que celle-ci a fourni des efforts herculéens pour faire du ministre des affaires étrangère une pauvre marionnette étrangère aux affaires. Un grand bravo à Mme Ashton donc !

Illustration : Catherine Ashton, ministre des affaires étrangères de l’Union européenne et vice-présidente de la Commission européenne, en visite en Bosnie-Herzégovine, à Sarajevo, le 18/02/10

(Source : Service audiovisuel de la Commission européenne

Vos commentaires
  • Le 13 mars 2010 à 07:45, par Martina Latina En réponse à : Carton rouge à Mme Ashton, marionnette étrangère aux affaires

    Reconnaissons que la tâche est délicate et qu’on ne passe pas du jour au lendemain, sans transition rationnelle ni sans initiation des peuples européens à leur responsabilité démocratique en tant que peuple européen, à des affaires étrangères communautaires.

    Le plus urgent me semble donc de ne pas démobiliser l’opinion sur ces questions, de ne pas alimenter sa morosité sur des sujets porteurs pour l’Europe, mais au contraire de l’y rendre attentive, pour une formation politique de plus en plus harmonieuse et créatrice au sein de l’Union qui porte le nom toujours actuel de VASTE-VUE : il nous est venu de l’aventure dont nous éloignent apparemment le mythe, les mers, trois millénaires, et qui demeure pourtant continuellement, réellement, révolutionnaire, telle que la courut la première EUROPE. Sur son TAURILLON céleste, impulsif et déconcertant, n’a-t-elle pas inauguré L’EUROPE avec un sourire aussi généreux et féminin que libérateur ?

    Soyons donc les dignes utilisateurs des moyens démocratiques figurés par ce couple irrésistible : d’abord pour faire tomber les murs entre langues et peuples dans notre action, dans notre esprit, ensuite pour manier l’humour qui invente et fédère, enfin et surtout pour voter en France, d’une manière digne d’EUROPE et à la mesure de L’EUROPE, dès demain !

  • Le 13 mars 2010 à 15:17, par Cédric En réponse à : Carton rouge à Mme Ashton, marionnette étrangère aux affaires

    Il ne faut pas renoncer à le dire quand l’Europe ne tourne pas rond. Mais cet article vient un peu à contre-temps... Ashton commence à prendre de l’assurance à son poste. Elle appelle Israel à un accord de paix immédiat, et se retouve en haut de la page d’accueil du Monde http://abonnes.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/03/13/mme-ashton-appelle-israel-a-un-accord-de-paix-immediat_1318757_3218.html

    Le principal défaut d’Ashton, me semble-t-il, ce n’est pas son incompétence supposée ni son manque de charisme. Par contre, je rejoins l’auteur lorsqu’il pointe son manque de motivation initiale, le fait qu’elle n’ait jamais exprimé le moindre intérêt pour ce poste, qu’elle n’ait jamais été candidate. Qu’elle n’ait jamais eu de vision pour ce poste avant d’y être nommées. Ashton a été choisie par défaut par les grands décideurs du PSE, plus pour ses grandes caractéristiques que pour ses motivations et son potentiel pour le poste.

    Le problème « Ashton », qui est peut-être en train de se résoudre avec le temps, montre surtout que les marchandages entre partis n’aboutissent pas à de meilleures nominations aux postes clé que les marchandages entre gouvernements. Il prouve que le Parlement n’est pas plus efficace ni plus européen que le Conseil en matière de nominations. Cela ne milite pas pour laisser le Conseil décider seul, au contraire. La solution serait que ces nominations soient décidées en amont du Conseil et du Parlement : par l’électeur européen !

  • Le 14 mars 2010 à 12:56, par babar En réponse à : Carton rouge à Mme Ashton, marionnette étrangère aux affaires

    Un carton jaune peut etre mais certainement pas un carton rouge pour Cathy Ashton. Cet article fait echo a des milliers d’autres qui ont fleuri, sur le meme ton un peu partout a son sujet peu apres sa nomination. Certes l’ Europe ne manquait pas de personnel mieux prepare a cette tache enorme, de Fischer a Verhofstadt en passant par Bildt et Miliband ; tout a ete dit sur le sujet, alors pourquoi en rajouter deux jours apres qu’ Ashton vient presenter sa politique et s’expliquer devant le Parlement, ce dont vous ne parlez pas.

    Ce que n’a pas compris Ashton c’est l’importance de la symbolique, et ce des les premiers jours de sa prise de fonction. Etre le principal contributeur d’aide a Haiti ou a la Palestine necessite qu’on le dise et le repete et c’etait a elle de le dire et de le repeter.

    Ne nous attendons pas a des feux d’artifices, ils ne se produiront pas. Mais de grace reservez vos cartons rouges a ceux qui le meritent (du genre Nuttal ou Farage).

Vos commentaires
modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?

Pour afficher votre trombine avec votre message, enregistrez-la d’abord sur gravatar.com (gratuit et indolore) et n’oubliez pas d’indiquer votre adresse e-mail ici.

Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom