Conférence « Des élections européennes vraiment européennes »

, par Maël Donoso

Conférence « Des élections européennes vraiment européennes »

Une journée de conférence a été organisée le 4 avril à l’Institut Supérieur Européen de Gestion (ISEG) de Paris par le Mouvement Européen France, en partenariat avec les Jeunes Européens France et le Groupe ISEG. Alors que l’échéance du 7 juin se rapproche, cette journée avait pour thème : « Des élections européennes vraiment européennes ». Les débats ont confronté des personnalités reconnues pour leur engagement européen, comme Alain Lamassoure et Monica Frassoni, mais aussi les responsables des principales branches jeunes des partis politiques français.

Elvire Fabry, membre du Mouvement Européen France (MEF) et directrice du pôle Europe-International de la Fondation pour l’innovation politique, a introduit cette journée en relevant la brièveté de la campagne pour les européennes qui s’annonce, avec deux mois à peine nous séparant de la date du scrutin en France, le 7 juin. Elle a insisté sur le rôle d’associations européennes comme le MEF pour parvenir malgré tout à lancer le débat, en confrontant les responsables des différents partis politiques, et en rappelant de la manière la plus large possible les enjeux et l’importance de ces élections.

Premier thème : « Pour une Europe qui assure le bien-être économique et social de ses citoyens »

Le premier débat a concerné l’Europe économique et sociale. Monique Saliou, candidate du PS dans la circonscription Île-de-France, a ouvert le débat en estimant que l’Union européenne ne disposait pas des ressources financières en adéquation avec ses ambitions. Le seuil actuel de ces ressources a été décidé au Parlement européen, où selon elle le PPE s’est prononcé pour une limitation à 1%, tandis que le PSE avait souhaité une augmentation. Pour elle, la faillite financière due à la crise comporte de grands risques sociaux de précarité et de violence, et tout en approuvant les avancées du G20, elle relève que les socialistes ont toujours soutenu un système économique plus régulé, et que les « 400 milliards promis par Barroso » seront pour une large part prélevés sur les fonds sociaux accumulés, au fil des années, par des gouvernements socialistes européens.

Alain Lamassoure, député européen PPE, a ensuite pris la parole pour aborder le thème de la solidarité fiscale et sociale dans l’Union. Il a relevé qu’il n’existe à l’heure actuelle aucun accord dans aucun parti sur les compétences à transférer au niveau européen, en ce qui concerne la santé par exemple. Il a également signalé le problème du financement de l’Union, et a évoqué trois types de ressources qu’on pourrait tourner, en totalité ou en partie, vers le budget communautaire : l’impôt sur les bénéfices (en France, l’impôt sur les sociétés), la TVA de certains produits (par exemple tous les produits qui traversent les frontières internes de l’Union) et les taxes liées au climat.

Jacques Toubon, député européen PPE, est arrivé tardivement au débat. Mais Alain Lamassoure avait déjà prévenu l’auditoire, en évoquant avec humour une anecdote personnelle : « Lorsque nous étions au gouvernement, nous avions une règle d’or : ne jamais attendre Jacques Toubon. » Lorsque ce dernier s’est finalement présenté, il a commencé par relever que le domaine fiscal et social n’avance guère dans l’Union, les compétences sur ces sujets étant surtout nationales. S’il a estimé impossible d’harmoniser les taux d’imposition dans l’Union, il a suggéré par contre la possibilité de créer une assiette fiscale harmonisée. Il a d’ailleurs déclaré que des efforts importants en ce sens avaient été accomplis, mais qu’après le « non » au référendum irlandais, ce chantier n’a même plus été évoqué.

D’autres questions et un débat avec la salle ont suivi. En ce qui concerne les taux d’imposition, Monique Saliou a recommandé non pas un véritable nivellement, mais une convergence progressive et des politiques communes en ce qui concerne, par exemple, l’établissement d’un salaire minimum dans chaque État membre. Pour ce qui est de la procédure de composition des listes pour les élections européennes, Alain Lamassoure a malicieusement relevé qu’il subsistait, au sein de son parti, « une certaine marge d’amélioration » (sic). Il a par ailleurs évoqué les faux-semblants du discours écologique actuel, estimant qu’un pétrole cher serait la meilleure solution pour l’environnement, mais qu’en pratique les subventions pleuvent dès que le prix du pétrole augmente, car personne n’est prêt à payer pour l’écologie.

Deuxième thème : « Pour une Europe durable »

Enchaînant avec la dernière remarque d’Alain Lamassoure, le deuxième débat a concerné l’Europe environnementale. Monica Frassoni, députée européenne et présidente du groupe Verts/ALE, a tout d’abord rappelé qu’en matière d’environnement, la différence entre de belles paroles et des décisions concrètes n’est pas facile à établir. En ce qui concerne les énergies renouvelables, par exemple, elle a estimé que les Verts/ALE ont réussi à faire passer l’idée, ce qui permettra à l’avenir d’investir massivement dans l’éolien et le solaire. Pour ce qui est d’une industrie automobile plus propre, par contre, elle regrette que seul un consensus « mou » ait pu être obtenu, avec une absence de résultats significatifs.

Brigitte Fouré, députée européenne PPE, a insisté sur les avantages d’une stratégie graduelle et de compromis dans les politiques européennes, et déclaré que des mesures concertées pouvaient produire, au final, des effets de levier importants. Monica Frassoni s’est cependant opposée à l’idée de compromis « raisonnable » dans les négociations européennes, et a relevé que derrière des stratégies de consensus se cachent souvent des forces de lobbying, en particulier issues de l’industrie automobile. Pour elle, il ne faut pas considérer l’Europe comme « angélique » en supposant que des compromis peuvent tout régler. Elle est revenue sur la notion de « changement de paradigme » qui avait été évoquée lors de la table ronde précédente, et a insisté sur le fait que ce concept est tout sauf idéologique, en affirmant la nécessité de revoir nos habitudes, nos techniques et nos modes d’éducation pour fonder une société plus durable.

Monica Frassoni a également déclaré que les systèmes de recapture de carbone envisagés actuellement ne servent, « à part à faire réélire Barroso » (sic), qu’à promouvoir à terme la reconstruction de centrales à charbon. Pour elle, les citoyens doivent faire des choix clairs entre plusieurs voies politiques possibles, et elle a souhaité en particulier que les fonds structurels européens soient réorientés pour satisfaire aux exigences du développement durable. Au cours du débat avec le public, des investissements massifs dans le domaine de la recherche ont été évoqués comme le meilleur moyen de promouvoir la santé et l’écologie en Europe.

Troisième thème : « Quel rôle pour la jeune génération en matière européenne ? »

Le troisième débat a regroupé les représentants des principales branches jeunes des partis politiques français. Concernant les enjeux des élections européennes, Camille Bedin, déléguée nationale des Jeunes Populaires, a estimé que l’Europe était une structure mal connue, mal comprise et parfois crainte, et que des efforts étaient nécessaires pour attirer les jeunes vers le projet européen. Damien Abad, président des Jeunes Centristes, a déclaré quant à lui que l’Union était « malade de ses consensus » (sic), et qu’il fallait lui rendre ses clivages, aller vers une Europe plus politique.

Antoine Detourné, président du Mouvement des Jeunes Socialistes, a soutenu Damien Abad et affirmé que le Parlement européen devait se polariser selon un clivage gauche-droite pour ne pas tomber dans un clivage entre les pays, ou pire, dans un clivage entre pro- et antieuropéens. Il a estimé qu’une campagne électorale européenne ne devait pas faire de l’éducation civique mais soulever des enjeux, par exemple l’Europe sociale et environnementale. Cyril Chadé, vice-président des Jeunes Démocrates, a déclaré quant à lui que le clivage gauche-droite n’était pas pertinent au Parlement européen. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de démocratiser le débat européen, et de promouvoir une Europe de l’investissement et du développement.

Les modérateurs ont demandé aux intervenants quel futur et quel projet ils soutiendraient pour l’Europe. Pour Camille Bedin, l’essentiel est de saisir la chance d’un espace démocratique pacifié, et pas forcément de construire un clivage gauche-droite. Au contraire, Antoine Detourné a estimé que la meilleure avancée pour l’Europe serait de permettre aux citoyens de faire de véritables choix au moment de glisser leur bulletin dans l’urne, d’où la nécessité de clivages politiques. Damien Abad a relevé la nécessité d’augmenter le budget européen, mais aussi de faire passer certaines réformes institutionnelles, comme l’élection du président de la Commission sur la base de la majorité au Parlement. Cyril Chadé, finalement, a proposé que les débats du Conseil de l’Union soient rendus publics, dans la mesure où ceux-ci décident pour une grande part du futur de l’Europe, tout en ayant lieu dans une opacité médiatique quasi complète.

Plusieurs sujets concrets ont été abordés par le public. Quelles initiatives pour promouvoir les énergies propres ? Quelles pistes pour développer les médias européens ? Quelles que soient les réponses qui seront apportés à ces problèmes, on peut espérer que le débat durant cette campagne dépassera le niveau national pour se placer à l’échelle de l’Europe, et que les citoyens auront effectivement droit à « des élections européennes vraiment européennes ».

Illustration : photographie de Denis Badré (sénateur et vice-président du MEF), Camille Bedin (déléguée nationale des Jeunes Populaires) et Antoine Détourné (président du Mouvement des Jeunes Socialistes). Auteur : Karim-Pierre Maalej.

Vos commentaires
  • Le 8 avril 2009 à 06:33, par Martina Latina En réponse à : Conférence « Des élections européennes vraiment européennes »

    Bien, TAURILLON, une fois de plus : merci pour la diffusion de ces idées ! Mais, si « le bien-être économique et social », si une « Europe durable », si des médias plus porteurs de vraie communication, sont souhaitables en priorité pour la jeune génération, n’avons-nous pas surtout besoin de plus de souffle, de plus de perspectives ? Ne faut-il pas renouer, pour le réaliser enfin, avec le désir de dégager, voire d’élargir, notre horizon, à la lumière d’EUROPE qui trouva le courage et l’énergie de regarder devant elle, tout autour, par-delà son vertige et sa peur, à l’aube de la civilisation qu’elle allait ainsi déclencher, sur la mer et la bête inconnues ?...

    Je songe à ces Libanaises d’un récent reportage télévisé, capables de mettre sur pied, dans la patrie d’EUROPE, contre vents et marées, une société de services féminins allant de l’esthétique aux taxis ! Ainsi, pas plus dans leur pays que pour les EUROPEENS, le nom d’EUROPE ne doit se charger d’une gravité paralysante ; en effet, il n’a aucune raison de signifier « galère » comme certains médias voudraient nous le faire croire : L’EUROPE est équipage et navire, une aventure autant qu’une entreprise, une affaire aussi harmonieuse que sérieuse, dans le sillage de certain mythe taurin, assez divin pour devenir réalité sous nos yeux et entre nos mains.

    Si mon insistance est ridicule, eh bien, TAURILLON, bientôt rions... Car, dans la nuit du doute et dans le souci du lendemain, l’humour demeure comme la brèche du matin, de l’audace et de la guérison, donc comme le chemin du BIEN COMMUN, n’est-ce pas ?

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