Bilan encourageant pour la politique énergétique de l’UE

, par Candice Béjuit

Bilan encourageant pour la politique énergétique de l'UE
Parc éolien offshore au large de l’île de Walney, au Royaume-Uni

« Inefficace », « peu ambitieuse » : les médias européens ne sont jamais à court de qualificatifs pour critiquer la politique énergétique de l’Union européenne. Si beaucoup de reproches peuvent en effet lui être faits, certaines avancées méritent d’être soulignées. Parlons-en, avant d’abandonner tout espoir de voir dans le futur l’Union se positionner comme un leader dans ce domaine.

Alors que la Commission européenne a récemment publié son deuxième rapport sur l’état de l’Union de l’énergie [1], et que des négociations sont en cours entre le Parlement européen, la Commission européenne et les Etats membres pour réformer le Système d’échange de quotas d’émissions - dispositif mis en place pour inciter les industries à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre - les médias européens s’en donnent à cœur joie pour critiquer le manque d’ambition de l’Union européenne dans le domaine de l’énergie.

C’est vrai, le Système d’échange de quotas d’émissions n’a pas atteint les effets escomptés. Les dirigeants politiques et les États membres, pris au cœur d’une bataille entre les différents lobbies, n’ont pas su (ou pas voulu ?) mettre au point un système réellement contraignant vis-à-vis des industries les plus polluantes, et n’ont pas suffisamment encouragé l’investissement dans les énergies renouvelables.

Faut-il pour autant s’en tenir à ce constat et enterrer la promesse de la Commission européenne de placer l’Union européenne en leader mondial des énergies renouvelables en 2020 ?

L’énergie, priorité de la Commission

Retour en 2014 : Jean-Claude Juncker est élu à la tête de la Commission européenne. Il affiche ses dix priorités pour les années à venir, parmi lesquelles le souhait d’une Union européenne de l’énergie et du climat [2], en accord avec le « cadre d’action en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030 » approuvé par le Conseil européen d’octobre 2014.

Les objectifs de cette union sont multiples :

  1. Géopolitique : réduire les importations de gaz et de pétrole, et donc la dépendance de l’UE vis-à-vis de ses voisins, en encourageant la diversification des sources d’énergie ;
  2. Éthique : mener une politique responsable de lutte contre le réchauffement climatique, en développant les énergies renouvelables. D’ici 2030, la consommation énergétique de l’Europe doit être réduite d’au moins 27% et les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40%
  3. Social : garantir un accès à l’énergie à un prix abordable et créer de nouveaux emplois.
  4. Économique : stimuler la croissance, en permettant aux entreprises d’exporter davantage.

Quels financements pour soutenir cette transition énergétique ? La Commission européenne s’assure qu’au moins 20% du budget européen sont liés au climat – l’objectif étant de passer à 35% d’ici 2020. Les investisseurs peuvent par ailleurs recourir au Fonds européen stratégique d’investissement. La Commission souhaite que 40% de ce fonds soient alloués à des projets contribuant à la lutte contre le réchauffement climatique. Enfin, une enveloppe de 5,35 milliards d’euros a été réservée au financement de projets d’infrastructures énergétiques transeuropéens sur la période 2014-2020, dans le cadre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe. [3]

Promouvoir le jeu d’équipe

La stratégie élaborée par la Commission européenne encourage la coopération internationale avec des outils concrets. L’Union de l’énergie repose sur la mise en commun des ressources et des infrastructures, ainsi que la connexion des réseaux. Autrement dit, sur un marché énergétique européen intégré.

Dans le secteur de l’électricité, le Conseil européen d’octobre 2014 avait appelé les Etats membres à atteindre une interconnexion d’au moins 10% de leur capacité de production d’ici 2020. Cela signifie que chaque Etat devra avoir mis en place des interconnexions permettant de transférer au moins 10% de l’électricité produite à ses voisins. Le but : permettre d’assurer la sécurité d’approvisionnement, en cas de défaillance d’une centrale ou de conditions météorologiques extrêmes, mais également intégrer de plus en plus les énergies renouvelables – notamment des énergies à caractère variable, telle que le solaire ou l’éolien. Pour atteindre cet objectif, la Commission européenne a dressé une liste de « projets d’infrastructures d’intérêt commun (PIC) », qui bénéficient de conditions réglementaires plus favorables et, pour certains, d’un accès à un soutien financier. Lorsque les projets prévus auront été exécutés, d’ici à 2020, tous les États membres (sauf Chypre et l’Espagne) auront atteint cet objectif de 10 % d’interconnexion.

Dans cette liste de PIC figurent également de nombreux projets transeuropéens d’infrastructures dans le secteur du gaz, dont le but est de favoriser les échanges entre les Etats membres, de sorte que les plus dépendants du gaz russe puissent assurer leurs besoins par d’autres circuits d’approvisionnement. Ainsi, des projets ambitieux d’infrastructures d’acheminement du gaz sont en cours de réalisation en Europe de l’Est : Balticonnector (Estonie et Finlande), Gas Interconnector Poland-Lithuania (qui bénéficiera aussi à la Lettonie et l’Estonie), Central and South-Eastern Europe European Gas Connectivity (9 pays concernés).

Une politique énergétique tournée vers l’avenir

On a reproché à l’Union européenne la chute des investissements dans le renouvelable depuis cinq ans ; il faut cependant souligner que le coût de ces installations a chuté pendant la même période. Un exemple parlant : le prix des composants solaires a diminué de 80% entre 2009 et 2015. L’Union européenne n’a pas à rougir lorsqu’il s’agit du développement des énergies renouvelables. 40% des brevets dans le secteur des énergies renouvelables au niveau mondial sont détenus par des entreprises européennes. Par ailleurs, au sein de l’Union européenne, plus d’un million de personnes travaillent dans ce secteur à l’heure actuelle.

40% des brevets mondiaux sont détenus par des entreprises européennes dans le domaine des énergies renouvelables

Les énergies renouvelables continuent à progresser et à entraîner une baisse des émissions de gaz à effet de serre. En 2015, on estime que cette réduction a représenté l’équivalent des émissions italiennes. Soulignons par ailleurs qu’en 2016, 90% des nouvelles capacités de production d’électricité provenaient de sources d’énergie renouvelable. Pour la première fois, les parcs éoliens ont représenté plus de la moitié des infrastructures installées. La filière éolienne est soutenue par le développement de l’éolien offshore, dont les investissements sont concentrés en Europe. Le parc de Gemini, situé au large des côtes néerlandaises, représente le projet le plus important. Une fois les travaux achevés, d’ici la fin de l’année, ce site représentera la deuxième implantation offshore au monde.

La Commission européenne compte bien continuer sur sa lancée. Le 17 février 2017, les Etats membres de l’Union européenne ont approuvé la proposition de la Commission d’investir 444 millions d’euros dans de grands projets d’infrastructures énergétiques [4], répondant aux objectifs clés de l’Union de l’énergie : interconnecter les réseaux énergétiques, renforcer la sécurité de l’approvisionnement et contribuer au développement durable en intégrant des sources d’énergie renouvelable. Citons parmi eux un projet innovant de stockage de l’énergie, en Irlande du Nord. Des projets prometteurs donc, qui pourraient refaçonner l’avenir énergétique de l’Union européenne. Cela mérite bien de garder un œil sur les avancées en la matière.

Notes

[3Mécanisme de financement mis en place par l’Union européenne pour soutenir les projets d’infrastructures transeuropéens dans les domaines de l’énergie, du transport et des télécommunications

Vos commentaires
  • Le 7 mars 2017 à 13:47, par Hervé En réponse à : Bilan encourageant pour la politique énergétique de l’UE

    1/ « D’ici 2030, la consommation énergétique de l’Europe doit être réduite d’au moins 27% et les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40% » Ces objectifs sont très ambitieux ! Comment sont-ils déterminés et quels sont les impacts ? Il faut bien mettre en relief ce que cela signifie. Les parts importantes de la consommation d’énergie sont dans le chauffage et les transports. Que faudrait -il pour réduire de 27% la consommation énergétique ? et pourquoi un objectif à 2030 ? Est-ce un simple affichage ? En écrivant de tels objectifs, quels sont les perspectives sous entendues ? Cela donne envie d’aller plus loin dans la recherche d’information et la mise en relief.

    2/ « les Etats ont approuvé 444 millions d’euros d’invest. »

    Les 18 projets sélectionnés concernent les domaines de l’électricité (7 projets pour 176 M€), du gaz (10 projets pour 228 M€) et des réseaux intelligents (1 projet pour 40 M€). Cinq de ces 18 projets portant sur des travaux de construction, 13 sur des études. Parmi ces projets figure le projet SuedLink consistant à installer 700 kilomètres de câbles à haute tension sous terre afin d’établir une liaison entre l’énergie éolienne produite dans le nord de l’Allemagne et les pôles de consommation situés au sud du pays. L’UE apportera une aide de 40,25 M€. Elle prévoit également de consacrer 90 M€ à la mise en œuvre du projet de stockage d’énergie par accumulation d’air comprimé (CAES) de Larne (Irlande du Nord). source : https://www.actu-environnement.com/ae/news/energie-infrastructures-Europe-aides-Commission-28480.php4

    3/Aussi, l’avenir des déchets nucléaires n’est pas abordé ici. Pourtant l’horizon de temps est bien supérieur à une vie humaine. c’est un sujet important pour moi. Les déchets posent déjà des contraintes et des scandales ont déjà au lieu et sont toujours en cours. les informations sont longues à trouver. Il y a un reportage à voir à propos de la ville de Maïak (Russie).

    4/l’Europe agit très bien lorsque les réglementations obligent les constructeurs à mettre en avant les performance énergétiques des produits. Les exemples flagrants sont à propos de l’affichage des consommations des voitures, de la puissance des ampoules, de la puissance des aspirateurs, des rendement des moteurs électriques (grosse avancée ici ! )

    5/ La mise en relief des chiffres permet de donner une vue plus large. A la fois pour les montants en € et aussi pour les pourcentages utilisés tout au long du texte. Attention aux pourcentages que l’on utilise très souvent et qui parfois occultent des éléments de comparaison.

    En conclusion, je me sens citoyen européen et je salue la démarche écologique. A mes yeux c’est un début et je l’encourage.

    Bon je m’arrête là ! Je suis européen optimiste !  :)

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