Démission du Premier ministre portugais : chute prévisible ou séisme politique ?

, par Mathilde Rose

Démission du Premier ministre portugais : chute prévisible ou séisme politique ?
Antonio Costa, qui a donné sa démission le 7 novembre dernier, restera Premier ministre en exercice jusqu’aux élections anticipées de mars 2024. © PES, Flickr

Mardi 7 novembre, le Premier ministre portugais Antonio Costa, chef de file du Parti Socialiste, a annoncé sa démission. Cette annonce fait suite à une accusation de corruption, de malversation et de trafic d’influence, en particulier concernant les droits à l’extraction de lithium et à la production d’hydrogène dans le nord du Portugal.

Une baisse de popularité et des scandales à répétition

Antonio Costa est Premier ministre et chef du gouvernement portugais depuis 2015. Son élection fait suite à un vote de défiance du Parlement envers l’ex-premier ministre du mal nommé parti Social-Démocrate, de centre-droit. Ce manque de confiance porte le Parti Socialiste au pouvoir et à sa tête Antonio Costa, qui est réélu aux élections de 2019 et forme une coalition avec la gauche et le Parti Communiste. Dans le système politique Portugais, les élections ont lieu tous les 4 ans, mais à la fin de l’année 2021, la coalition du bloc de gauche ne parvient pas à adopter le projet de loi de finance. Cet échec mène à des élections anticipées en janvier 2022.

Lors des élections de 2022, le Parti socialiste mené par Antonio Costa sort vainqueur avec une large majorité ce qui lui permet d’assurer une stabilité du gouvernement puisqu’il obtient une majorité absolue au Parlement. Toutefois, lors de ces élections le parti de droite populiste « Chega » (« ça suffit ! »), obtient 13 sièges contre 1 seul aux élections précédentes.

Depuis les dernières élections, le Parti Socialiste a fait face à plusieurs scandales, en particulier celui du TAPgate (compagnie aérienne portugaise) au premier semestre 2023. Ce scandale a entraîné le départ de nombreux ministres et secrétaires d’Etat. Mais également une diminution de la popularité du Parti Socialiste, passant de 40% d’intention de vote au moment des élections de janvier 2022, à 30% un an après. Début novembre 2023, les intentions de votes pour le Parti Socialiste s’élevait à 24%, au coude à coude avec le parti conservateur (PSD), dont est issu le Président, Marcelo Rebelo de Sousa.

Gérer la crise et la démission du Premier Ministre

Trois jours après l’annonce du Premier ministre, quant à sa démission, le Président portugais Marcelo Rebelo de Sousa s’est exprimé. Il a annoncé l’organisation d’élections législatives pour le 10 mars 2024, soit deux ans avant celles prévues par le calendrier officiel.

Dans son annonce le Président a annoncé que le Conseil d’Etat, qui a un rôle consultatif, avait proposé un tirage au sort pour choisir le prochain premier ministre. Tandis que le Parti Socialiste avait demandé de pouvoir choisir un autre candidat au sein de son parti. Le Président De Sousa a rejeté ces deux propositions, invoquant que le Premier ministre manquerait de légitimité aux “yeux du peuple”. Il a donc préféré suivre la proposition des partis d’opposition, et notamment celle de son propre parti, le Parti Social-Démocrate, en organisant des élections au printemps pour laisser le temps aux différents partis de se préparer.

Pendant ce laps de temps, Antonio Costa continuera d’assurer ses fonctions de Premier ministre, malgré les perquisitions qui ont eu lieu chez lui, chez certains de ses ministres et l’inculpation du ministre des Infrastructures.

Des conséquences pour la stabilité politique portugaise

Antonio Costa est l’un des seuls chefs de gouvernement socialiste en Europe. L’organisation d’élection au printemps permet certes de garantir momentanément la stabilité du pays, mais elle permet également aux différentes formations politiques de se préparer, en particulier le parti populiste « Chega », qui grimpe dans les sondages. En effet, début novembre 13% des Portugais avaient l’intention de voter pour ce parti, contre seulement 7% aux dernières élections de janvier 2022.

Les élus du parti Chega s’étaient déjà présentés avec des affiches « Chega de Corrupçao » (fin de la corruption) au mois d’avril 2023 et dénoncent régulièrement la corruption des élites portugaises. Ce scandale qui touche le Parti socialiste portugais risque de renforcer la popularité du parti Chega et de plonger le Portugal dans l’incertitude politique entre montée de l’extrême-droite et possible instabilité politique.

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