Biélorussie

Aurait-on voulu « placardiser » le professeur Youri Bandazhevski ?

Un communiqué de la CRIIRAD suggère à demi mot un tel scénario.

, par Jérôme Buchler

Aurait-on voulu « placardiser » le professeur Youri Bandazhevski ?

Le Taurillon ouvre ses colonnes à l’association Paris-Minsk.org. Aux portes de l’Europe existe une dictature : c’est la Biélorussie. Jérôme Buchler pour Paris-Minsk nous parle ici du cas polémique du professeur Youri Bandazhevski.

La douce paranoïa d’institutions parfois controversées comme la CRIIRAD (Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité) ne doit pas empêcher le lecteur de prendre connaissance des faits, aussi troublants soient-ils ; en 2005, Youri Bandazhevski sort d’une détention longue de six ans, passée entre une sombre prison de la banlieue de Minsk et un camp de relégation en province. Il était accusé de corruption par des autorités biélorusses qui ne supportent plus qu’un scientifique donne de l’écho - y compris à l’international - aux manquements graves de l’Etat vis à vis de sa propre population, sévèrement touchée par les retombées directes de l’explosion d’un réacteur de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1984.

La Biélorussie a toujours tenu un double discours vis à vis des conséquences de la catastrophe : côté pile, au-delà de ses frontières, les autorités tiennent sans relâche la ligne alarmiste afin de maintenir les aides publiques et privées. De l’argent frais venant huiler les rouages de l’administration et au passage arroser un certain nombre de fonctionnaires peu scrupuleux. Côté face, au niveau national, une politique démographique qui vise sans ambiguité à désinformer et « fixer » les populations du grand sud est du pays, en dépit des risques de santé encourus. Des risques que beaucoup de scientifiques biélorusses courageux, à l’image de Youri Bandazhevski, tentent dans des conditions souvent difficiles de démontrer par l’observation et la réflexion scientifique.

Embauché par le CRIIRAD à sa sortie de relégation, Youri Bandazhevski remet en route un certain nombre de projets locaux et ce, malgré les interdictions et les pressions que l’on imagine aisément pour peu que l’on soit un peu familier avec les coûtumes locales.

La France l’invite alors. C’est la ville de Clermont-Ferrand qui se propose de l’accueillir. Youri accepte, et c’est rapidement la consternation à la CRIIRAD qui voit le chercheur quitter ses projets. Plusieurs mois passent, Youri écrit un livre, loin de sa famille restée en Biélorussie. Selon la CRIIRAD, avec laquelle Youri reprend rapidement contact, « face aux enjeux diplomatiques dont il était l’objet, et alors que ses deux filles étaient restées au pays, le chercheur se drapait dans une réserve somme toute légitime ». Aujourd’hui le sort du scientifique reste incertain. Lui-même n’exlut pas de retourner en Biélorussie.

Alors, simple maladresse diplomatique du CRIIRAD, manque d’intérêt flagrant pour le dossier, ou coup monté ? Ira-t-on jusqu’à penser que Paris, sous la pression du lobby nucléaire, aurait conclu un accord diplomatique gagnant-gagnant avec Minsk ? Que Youri Bandazhevski ne serait qu’un « pion », comme il le dit lui-même, au centre d’un double calcul politique ?

A Paris-Minsk, on n’ira pas jusque là. On ne franchira pas la ligne rouge. On reste malgré tout très, très troublés.

Illustration :
 photographie du professeur Youri Bandazhevski issue du site du CRIIRAD
 drapeau du Belarus, sur le site Wikicommons

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