État du nucléaire en Europe : le défi des déchets radioactifs

, par Grégoire Henning

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État du nucléaire en Europe : le défi des déchets radioactifs

L’énergie nucléaire est un élément fondateur de l’Union européenne, au travers de l’agence Euratom créée en 1957 avec le traité de Rome. Cependant, l’Europe a encore du mal à faire face aux défis posés par les déchets radioactifs.

La filière nucléaire et les déchets radioactifs dans l’Union européenne : état des lieu

Le nucléaire représente 13,5% de l’énergie consommée en Europe. Les pays de l’Union européenne comptabilisent un total de 195 réacteurs nucléaires en état de marche, sachant qu’une centrale regroupe souvent plusieurs réacteurs.

Ces réacteurs représentes une production de 170GW – une centrale à charbon produit environ 700MW, il faudrait donc 243 centrales à charbon pour obtenir la même production électrique, soit 17% de la capacité totale de production électrique en Europe.

Tous ces réacteurs produisent environ 85000 mètres cubes (m3) de déchets radioactifs chaque année. La majorité de ces déchets ont un faible temps de vie (la radioactivité disparait en quelques années maximum), 280 m3 sont hautement radioactifs et5100 m3 sont moyennement radioactif et à long temps de vie : il faut au moins une centaine d’années pour que la radioactivité disparaisse (chiffres de 2004).

Les déchets nucléaires sont retraités et séparés : une partie peut être recyclée en combustible et les déchets à faible temps de vie sont séparés de ceux qui mettront plusieurs dizaines d’années avant de perdre leur dangerosité. Pour ces derniers, l’enfouissement sous-terrain est pour l’instant la seule solution.

La réglementation européenne sur le traitement des déchets

Dans le cadre européen, rappelé dans un projet de directive publié en novembre 2010, la gestion des déchets radioactifs relève de la responsabilité des Etats membres. En particulier, ces déchets doivent être stockés dans le pays où ils ont été produits. Cela conduit à des convois de matériaux radioactifs,par exemple entre la France et l’Allemagne, lorsque du combustible usé des centrales allemandes est retraité en France puis renvoyé de l’autre coté du Rhin pour y être stocké.

Cette approche « à chacun ses déchets » pose certains problèmes : d’abord en raison des allées et venues des déchets radioactifs entre les pays où ils sont produit et dans lesquels ils seront traités. Ensuite, parce que les pré-requis pour un bon site d’enfouissement ne sont pas disponibles facilement dans chaque pays, et qu’un stockage plus sûr serait possible si les déchets radioactifs étaient enfouis au meilleur endroit existant.

De fait, même si certains Etats membres ont rejeté l’usage de l’énergie nucléaire dans le cadre de leurs frontières, ou l’utilisent peu, ils sont amenés à importer l’électricité de leurs voisins nucléarisés. A ce titre, la France, grande productrice d’électricité nucléaire, exporte chaque année une quantité d’électricité équivalent à la consommation énergétique annuelle totale du Luxembourg.

L’agence Euratom assure l’approvisionnement en combustible des réacteurs nucléaires et fait respecter les exigences de sécurité et de transparence auprès des acteurs de la filière nucléaire ; cependant, elle ne prend pas une part active dans la gestion des flux de déchets ou de leur enfouissement.

Quelles solutions techniques pour traiter les déchets radioactifs ?

Il existe un certain nombre de solutions pour traiter les déchets et éviter de devoir les enfouir pendant plusieurs siècles.

  • La transmutation  : La science nucléaire permet la transmutation des éléments. Il ne s’agit pas ici de transformer du plomb en or, mais, en soumettant les déchets radioactifs à une irradiation, de les transformer en éléments plus stables ou à radioactivité plus courte. Cela permet d’éviter le problème d’un long stockage.
  • Les brûleurs sous-critiques (en Anglais « Accelerator Driven System » (ADS)) : Les brûleurs sous-critiques combinent les deux solutions précédentes. Un faisceau de protons est utilisé pour transmuter les éléments radioactifs et force la radioactivité, ce qui produit de la chaleur ensuite collectée comme dans un réacteur traditionnel.

Ces solutions sont techniques et difficiles à mettre en place car elles demandent des installations spécifiques et un travail important de retraitement des déchets, et elles ne sont pour l’instant pas économiquement rentables.

Le traitement des déchets étant surtout une affaire nationale, personne n’a suffisamment de motivation pour examiner ces possibilités plus dans le détail.

Le traitement des déchets radioactifs constitue à lui seul un défi important de la filière nucléaire. Il n’existe pas de politique européenne du traitement des déchets, les Etats membres étant appelés à prendre leur responsabilité sur ce sujet.

Or, comme cela est souvent répété, le nucléaire nous concerne tous, que nous l’utilisions activement ou non. Le cadre d’Euratom existe déjà et devrait être amené à jouer un rôle plus actif pour une gestion communautaire des défis posés par les déchets nucléaires.

Photos : « A Radioactive Barrel » par Caspar Benson, libre de droits / « Technician in nuclear power plant » par Steve Allen, libre de droits / « Nuclear Power Plant, refueling Nuclear Reactor » par Digital Vision, libre de droits / « Blue sky over power station » par Grafissimo, libre de droits.

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