Et pour cause. D’ici 2050, les besoins énergétiques de la planète augmenteront jusqu’à tripler pendant que dans le même temps, l’urgence écologique nécessite de réduire les émissions en dioxyde de carbone et de gaz à effets de serre par deux [1] . Il faut évidement trouver de nouvelles sources d’énergies : plus propres, accessibles, durables, etc.
L’énergie : clef de l’indépendance de l’Europe
Entre 1996 et 2006, la consommation énergétique de l’Europe a augmenté de 6.8 trilliard de Btu (British Thermal Unit [2] ), représentant pour l’essentiel du gaz naturel (4.3 trilliard de Btu) et du pétrole (1.5 trilliard de Btu). Or, les réserves européennes en gaz et en pétrole sont faibles relativement au reste du monde [3] . La dépendance au gaz russe notamment a conduit en janvier dernier à la guerre du gaz. Des situations telles que la courte guerre en Géorgie d’août 2008 peuvent elles aussi conduire à des réductions dans les ravitaillements [4] . La dépendance énergétique de l’Europe est donc une question vitale ; tant que l’Europe dépend d’approvisionnement externe, elle reste vulnérable. Trouver de nouvelles sources d’énergies qui ne font pas appel au gaz ou au pétrole n’est donc pas seulement une question d’écologie : l’enjeu stratégique et politique est considérable.
Tirer l’énergie du cœur de la matière
Les noyaux atomiques constituent toute la matière qui nous entoure. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, un seul noyau est capable de dégager une énergie considérable [5] . Ainsi, les énergies de fission et de fusion sont idéales pour fournir de l’énergie en remplacement des moyens brûlants des énergies fossiles (charbon, gaz...). Certes, il existe des risques et les centrales à fission produisent des déchets, mais en terme de pollution atmosphérique, l’effet est inexistant. D’aucun arguent même qu’il vaut mieux dix kilogrammes de déchets radioactifs emprisonnés dans un container que la même quantité de dioxyde de carbone rejetée dans l’atmosphère. Notons en effet que les résidus radioactifs des centrales de fissions ne sont absolument pas volatiles.
La fusion offre encore plus d’avantages que la fission, et répond à l’ensemble des problèmes soulevés par les opposants à cette dernière :
• Il n’y a pas de risque d’emballement : si la réaction de fission peut échapper à tout contrôle, cela n’arrivera jamais dans le cas de la fusion. En effet, la réaction de fusion, pour se maintenir nécessite un apport constant en ’carburant’ (deutérium, tritium). Si on cesse d’apporter du combustible, la réaction s’éteint.
• Le combustible pour les centrales à fusion n’a pas d’usage militaire : contrairement à l’uranium ou au plutonium utilisés dans les centrales à fission, le deutérium et le tritium ne peuvent pas être utilisés comme base à une bombe atomique ; cela présente un avantage énorme du point de vue de la ’non prolifération’.
• Le combustible de base est abondant : uranium et plutonium sont des espèces très rares, par contre, les isotopes de l’hydrogène utilisés pour la fusion, sont présents en très grande quantité partout dans l’univers. Sur Terre, ont les trouve surtout dans l’eau.
• La fusion ne produit pas de déchets radioactifs. Certes, les résidus de la réaction (essentiellement de l’hélium) n’ont pas d’usage évident, mais ils ne présentent aucun danger radioactif, ni aucun impact sur l’environnement (pas d’effet de serre notamment).
Le dernier tore avant la fusion : ITER
Le réacteur expérimental ITER, en construction à Cadarache (France) a pour objectif de répondre a un important nombre de questions techniques relatives à la mise en œuvre de la fusion pour la production d’énergie. Si la production d’énergie par fusion est simple sur le papier, de nombreux points pratiques sont à mettre au point : il faut construire une enceinte capable de contenir un plasma 150 millions de degrés (soit dix fois la température au centre du soleil [6] ). ITER ne produira pas suffisamment d’énergie pour s’auto-alimenter (comme le fera une centrale à fusion), mais les réponses apportées par ITER serviront de base aux centrales électriques utilisant la fusion. C’est donc un enjeux colossal : sans ITER ou un réacteur expérimental similaire, la fusion ne sera jamais utilisée, ni même utilisable. C’est à cause de cette importance que des acteurs scientifiques du monde entier se sont rassemblés dans la collaboration ITER : Les États-Unis, la Chine, le Japon, la Corée du Sud, la Russie, l’Inde et l’Union européenne [7] .
L’Union européenne assure environ 50% du budget du projet ITER [8] (soit 250 millions d’euros par an), ce qui représente la moitié du budget européen pour les énergies non nucléaires, et seulement 1.3% du budget européen pour la recherche. L’Europe possède déjà une excellente expérience dans le domaine de la fusion avec JET (Joint European Torus [9] ) et Tore-Supra [10] . Depuis 1957 et EURATOM jusqu’à ITER, en passant par l’EPR [11] , l’Europe a toujours été au travail pour fournir à sa population une énergie nouvelle, tout en cherchant a en garantir la sûreté et la propreté.
L’avenir de la consommation énergétique
Aussi prometteuse et réalisable qu’elle soit sur le papier, l’énergie de fusion ne sera pas disponible avant peut-être encore plus de trente ans. En attendant, il faudra continuer à répondre aux besoins énergétiques croissants des populations, tout en réduisant l’impact global de l’activité humaine sur l’environnement. Le recours aux énergies renouvelables est un premier pas vers cela ; mais produire plus d’énergie, même propre, ne sera pas suffisant. Une solution simple et efficace pour avoir plus d’énergie à notre disposition est tout simplement... d’en utiliser moins ! La bataille de l’énergie ne se gagnera pas uniquement du côté de la production, mais aussi à la consommation. Les appareils de faible rendement, et les modes ’standby’ qui continuent a consommer, sont très gourmands en électricité, et pour rien...
La recherche d’une efficacité électrique a commencé en Europe lorsque le Parlement a interdit la vente d’ampoules à incandescence (dont jusqu’à 95% de la consommation est dissipée sous forme de chaleur). La réduction du gaspillage fait désormais partie intégrante de la politique énergétique européenne.
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