Jusqu’où iront les frontières de l’Europe ?

L’adhésion de la Turquie comme défi majeur de l’Europe

, par Maël Donoso

Jusqu'où iront les frontières de l'Europe ?

La question de l’adhésion de la Turquie ouvre nécessairement sur une autre question, fondamentale : celle des frontières de l’Europe. A travers ce questionnement pointe les possibles futurs d’une Europe fédérale comme puissance stratégique mondiale.

Les représentants du monde politique et de la société civile, qu’ils soient pro-européens ou eurosceptiques par ailleurs, s’accordent au moins sur un point : l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne est un dossier épineux, et posera sans doute de nombreux problèmes institutionnels, économiques et politiques, qui ont déjà été longuement débattus dans les médias. L’adhésion de la Turquie est d’autant plus sujette à controverse que cette question est réellement apparue dans le débat public peu après l’élargissement radical de 2004, lorsque dix nouveaux États membres ont rejoint l’Union. Pour y voir plus clair, il est sans doute nécessaire de prendre un peu de distance.

Les défis de l’élargissement

Témoins d’un élargissement apparemment incontrôlable et illimité, les citoyens se posent légitimement certaines questions. Où va l’Europe ? Combien d’élargissements y aura-t-il encore ? Quand auront-ils lieu ? Qui décide vraiment ? Il faut bien admettre que jusqu’à présent, aucune réponse claire n’a été apportée, au niveau européen, à ces questions. Mais peut-être n’est-il pas possible d’y répondre définitivement : la construction européenne est une équation complexe, qui dépend autant de la situation internationale que de la volonté des États membres, et il n’est sans doute pas possible de définir, une fois pour toutes, ce que sera le projet européen pour le vingt et unième siècle.

Cependant, même si la construction de l’Europe du futur est un sujet complexe, il est impératif d’apporter rapidement quelques éléments de réponse. En commençant par poser la question centrale des élargissements : jusqu’où iront les frontières de l’Europe ? Ou, plus précisément : dans l’état actuel du projet européen, et compte tenu des évolutions politiques probables, quels sont les pays qui auront vocation à rejoindre l’Union européenne dans les années ou les décennies à venir ?

Focalisés sur la Turquie, les débats sur l’élargissement montrent depuis longtemps des signes d’aveuglement. La sphère des États euro-compatibles est vaste et diversifiée, mais elle n’est pas infinie, et nous pouvons tout à fait en établir une liste exhaustive. L’important est que les citoyens puissent choisir, à long terme, un projet d’avenir pour l’Europe : la première étape est donc de présenter les principales options.

Les élargissements probables de l’Europe : pour une fédération politique continentale

Outre la Turquie, les prochains candidats à l’adhésion, qu’ils soient déjà déclarés ou simplement probables, sont les pays des Balkans. Ceux-ci sont au nombre de sept : la Slovénie, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro, l’Albanie, la Macédoine et le Kosovo (dont le statut d’État n’est pas encore reconnu par tous à l’échelle internationale). La population cumulée de ces pays est bien inférieure à celle de la seule Turquie, mais on conçoit facilement les difficultés institutionnelles que représenterait l’adhésion de sept nouveaux États sans une refonte des institutions européennes, via en particulier le Traité de Lisbonne.

Il existe également trois pays d’Europe occidentale ou septentrionale qui pourraient légitimement être candidats à l’Union, et dont l’adhésion ne devrait pas poser beaucoup de problèmes : la Suisse, la Norvège et l’Islande. Nous ne parlerons pas ici des cinq plus petits États de l’Europe, à savoir le Liechtenstein, Andorre, Monaco, Saint-Marin et le Vatican, dont la population est sans doute trop faible pour qu’on envisage, à l’heure actuelle, de les intégrer dans une structure de gouvernance européenne.

Les onze pays cités (avec la Turquie) formeraient avec les États membres actuels une Union européenne à 38. Ce nombre peut paraître impressionnant lorsqu’on considère les difficultés de fonctionnement, déjà nombreuses, d’une Union à 27. Pourtant, du point de vue économique et social, et en excluant les difficultés liées spécifiquement à la refonte des institutions, la Turquie est le seul pays de cette liste qui représenterait réellement un fort défi au moment de l’adhésion. Prises individuellement, les adhésions des dix autres États ne causeraient de loin pas autant de difficultés.

Beaucoup de réserves ont été émises quant à la pertinence géographique d’une Turquie européenne. Pour ces dix autres États, la question ne se posera pas, car chacun d’entre eux se trouve bel et bien en Europe, même si l’Islande est quelque peu excentrée. Réunis, ces pays parachèveraient donc l’unité géographique européenne, et si l’Union choisit d’évoluer sur une base fédérale, ils permettraient l’émergence d’une fédération politique continentale, disposant d’un espace cohérent et étendu.

Les élargissements possibles de l’Europe : vers une puissance stratégique mondiale

L’Union européenne à 38 est une fiction politique probable, mais nous pouvons envisager une fiction politique possible où les élargissements seront encore plus importants. Après la Turquie, l’Ukraine sera peut-être le prochain dossier épineux de la diplomatie européenne. Ce pays étendu et fortement peuplé, aux frontières de la Russie, a manifesté des désirs d’adhésion qui ne peuvent être ignorés. La Moldavie et, bien que cela soit difficilement envisageable actuellement, la Biélorussie pourraient lui emboîter le pas à long terme, et se présenter un jour comme candidats.

Les frontières sud-est de l’Europe sont mal définies, et il n’est pas exclu que la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan soient un jour reconnus comme des candidats possibles. On saisit facilement les risques diplomatiques, mais aussi les opportunités stratégiques d’une Union qui renforcerait sa présence dans le Caucase. Par ailleurs, on peut envisager que les frontières de l’Europe se déplacent plus loin encore. Ceci relève de plus en plus de la fiction, mais nous pouvons d’ores et déjà soulever une question cruciale dont l’Europe aura peut-être à débattre un jour : l’adhésion éventuelle de la Russie.

La Russie est de toute évidence un pays d’Europe, un pays dont l’histoire et la culture sont profondément européennes. Sa capitale, ses plus grandes villes, et les trois quarts de sa population se trouvent dans l’Europe géographique. À ce titre, plus encore que la Turquie, la Russie devrait avoir vocation à rejoindre l’Union. Après tout, ses 140 millions d’habitants représentent le double de la Turquie, mais beaucoup moins que les 480 millions de l’Union actuelle : une adhésion serait donc possible, du point de vue économique et politique, sans créer des déséquilibres insurmontables. Toutes proportions gardées, on pourrait comparer cette situation à la réunification de l’Allemagne.

Cependant, il est tout aussi évident que la Russie est elle-même une puissance d’envergure internationale, qui n’a pour le moment guère été impliquée dans le processus de construction européenne. Il est également remarquable qu’une intégration de la Russie modifierait radicalement la forme de l’Union, et multiplierait sa surface par quatre ou cinq. On pourrait imaginer l’intégration de la Russie d’Europe sans la Sibérie, à peu près comme dans le cas du Danemark, qui a été intégré sans le Groenland. Mais cela nécessiterait une refonte radicale de la Fédération russe, ce qui n’est guère probable dans l’immédiat.

Si cette Union à 45 relève de la fiction politique avancée, une Europe fédérale ainsi étendue deviendrait une force stratégique de premier plan à l’échelle mondiale, et ce fait n’échappera sûrement pas aux partisans d’une Europe-puissance. La Russie est, de toute manière, un partenaire indispensable de l’Union européenne, dans l’immédiat comme dans le futur, et son ancrage historique et culturel en Europe n’est pas remis en question. La question de son éventuelle adhésion finira donc forcément par apparaître à l’ordre du jour.

Les enjeux immédiats de la construction politique

La fédération continentale à 38 et la puissance stratégique à 45 ne sont que deux scénarios possibles, mais on peut en envisager bien d’autres. Par exemple le développement de liens multilatéraux avec toutes les grandes puissances mondiales, et l’établissement d’une euro-sphère diplomatique et économique, au sein de laquelle l’Europe pourrait rayonner et exporter son modèle. Ou encore un partenariat privilégié avec les Etats-Unis et le Canada, pour former une nouvelle alliance occidentale appuyée sur l’OTAN. Les solutions ne manquent pas pour poursuivre le développement de l’Europe, il faut simplement être en mesure de choisir entre elles.

En ce sens, l’adhésion de la Turquie est une question extrêmement importante, mais sur laquelle il faut éviter de s’aveugler. Un bon nombre de problèmes soulevés par la Turquie sont des défis très spécifiques, qui ne concerneront pas les autres élargissements. Les difficultés que nous rencontrerons sur ce dossier particulier ne doivent donc pas, en elles-mêmes, remettre en question la politique d’élargissement européenne. Par contre, il est possible et même souhaitable de discuter cette politique d’élargissement sur des bases plus générales, et de se demander en particulier à quel rythme l’Union peut s’étendre sans nuire à sa construction politique.

La construction d’une Europe fédérale est l’enjeu essentiel, quel que soit le projet global choisi. Les élargissements successifs sont un défi important, mais en donnant à l’Union un espace plus cohérent et plus étendu, ils peuvent également s’avérer un atout essentiel pour l’émergence d’une identité européenne. La question n’est donc pas facile à trancher, mais une chose reste sûre : aux yeux des citoyens, l’adhésion de la Turquie deviendrait sans doute beaucoup moins problématique si elle s’inscrivait dans une stratégie globale pour fonder l’Europe du futur.

Illustration : Carte de l’Europe d’Alexandre Vuillemin, 1843 (source : histoirepostale / Flickr.com)

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Vos commentaires
  • Le 10 novembre 2008 à 17:56, par Laurent Nicolas En réponse à : Jusqu’où iront les frontières de l’Europe ?

    La Slovénie a adhéré en 2004 et est passée à l’Euro en 2007 !! La notion de Balkans est aussi floue que celle d’Europe ; si on dit qu’il y a 7 Etats dans les Balkans, quid de la Bulgarie et de la Roumanie ?

    En ce qui concerne la Norvège et la Suisse, l’adhésion à l’UE est un sujet du débat politique national qui revient de temps à autres sur le devant de la scène, mais il faut bien comprendre que ces Etats ont souverainement refusé d’adhérer. La volonté de faire partie de l’Union est LA condition de départ, celle qui lance le débat, sans autre considération d’euro-compatibilité. On l’a bien vu avec la demande, en forme de défi, du Maroc sous Hassan II en 1987.

    La situation des micro-Etats permet de mieux comprendre le dilemme suisse ou norvégien : Andorre, Monaco ou le Vatican sont inextricablement liés à la gouvernance européenne. Ils respectent une grande partie de l’acquis communautaire (attention, pas tout, et la nuance a son importance), ont l’euro, ils sont signataires de multiples accords bilatéraux. Au final, ils subissent la gouvernance européenne sans avoir aucune possibilité de peser sur celle-ci. Et c’est le même problème pour la Norvège ou la Suisse, à la différence qu’ils ne peuvent pas influencer les politiques communautaires non pas parce qu’ils sont trop petits mais parce qu’ils ont refusé d’adhérer.

    Comparer la perspective d’une adhésion de la Russie avec la réunification allemande...ça demande des capacités d’imagination extraordinaires. Déjà, on se projette dans un avenir très lointain ; cela paraît irréalisable avant au moins 50 ans. Et de réalisable à souhaitable il y a plus qu’un pas. Réfléchir à une Russie dans l’UE complexifie énormément la réflexion sur l’état de la construction européenne. C’est dans l’ordre du pensable, ce n’est pas encore dans l’ordre du possible, comme peut l’être au contraire le cas de l’Ukraine.

    Je ne suis pas convaincu que la question de l’adhésion de la Russie s’inscrira forcément, tôt ou tard, à l’agenda de l’UE. Encore faut-il que les deux parties le souhaitent, c’est à dire qu’elles y aient intérêt. Il est aussi loin d’être certain que l’Europe devienne, grâce à l’adhésion de la Russie, une puissance stratégique, diplomatique. Déjà, elle le peut très bien sans la Russie et en prend le chemin, lentement mais sûrement. De plus, étant totalement dans l’imaginaire en parlant de l’adhésion russe, comment peut on affirmer qu’elle représenterait un bénéfice pour l’Europe ? pourquoi pas le contraire ? comment avoir des certitudes sur la base de conjectures si lointaines ?

    Les élargissements, seuls, ne sont rien. La construction européenne est le résultat de la dialectique permanente entre approfondissement et élargissement ; il est difficile d’affirmer que les élargissement permettent de donner du sens au projet européen. Ils y contribuent inévitablement, permettent son renouvellement, sa redéfinition ; mais pour qu’il y ait redéfinition et pas dilution, l’approfondissement démocratique et politique doit avoir sa dynamique propre.

  • Le 11 novembre 2008 à 12:57, par Camille Lépinay En réponse à : Jusqu’où iront les frontières de l’Europe ?

    Je partage l’opinion du commentaire précédent : envisager une demande d’adhésion de la part de la Russie est totalement irréaliste. Pour les Russes, la démocratie à l’occidentale et l’économie de marché ce sont les années Eltsine qui pour eux égalent le chao. Cette idée, dite ici un peu crument, se retrouve dans de nombreux ouvrages écrits par des gens ayant véritablement vécus en Russie comme par exemple les anciens correspondants du New York Times à Moscou Peter Baker and Susan Glasser, Kremlin Rising : Vladimir Putin’s Russia and the End of Revolution, Simon & Schuster (2005)). De plus, on a déjà beaucoup parlé lors de la crise géorgienne de la logique de puissance et de « concert des nations » derrière l’attaque russe. Donc imaginer que les russes abandonneront volontairement leur souveraineté est irréaliste. Or les Russes n’accepteront pas non plus que l’Union européenne aille jouer trop loin dans leur « empire perdu ». Ainsi, je ne crois pas à l’adhésion possible de l’Ukraine, de la Moldavie, de la Biélorussie ou des pays du Caucase, Certes, l’UE n’est pas encore vue comme une menace comme l’est l’OTAN mais si elle veut rester en bonnes relations avec la Russie, il ne faudra pas aller trop loin. Les Russes n’ont ainsi pas trop apprécié que les européens leur fassent la leçon lors de la révolution orange ukrainienne. A mon avis, le véritable défi pour l’UE sera d’inventer une relation avec l’Ukraine, la Moldavie, le Caucase et éventuellement une Biélorussie démocrate sous la forme d’une coopération plus ou moins étroite mais qui respecte la sensibilité russe et l’y associe. Pour ce qui est des autres pays, la Norvège, l’Islande et la Suisse décideront librement de leur adhésion ou non mais les événements récents en Islande montre à quel point l’Europe pourrait être non pas être uniquement coûteuse mais aussi un bon bouclier. Reste donc essentiellement les pays des Balkans occidentaux (sauf la Slovénie) et la Turquie. Pour les Balkans, il s’agit un peu pour l’Union européenne de « réparer le passé » et leur adhésion n’est pas vraiment discutée mais vue comme une chance d’apporter à long terme la paix dans la région. Donc, le seul pays qui pose vraiment la question « voulons-nous ou non nous élargir » est la Turquie. J’attends avec impatience les autres articles sur ce sujet.

  • Le 12 novembre 2008 à 15:08, par Jean-Jo En réponse à : Jusqu’où iront les frontières de l’Europe ?

    Sans vouloir jouer les méchants, ni les eurosceptiques (c’est loin d’être mon cas), comment peut-on présenter l’élargissement de cette manière ! L’article donne l’impression que nous n’avons comme perspective que la réflexion d’une sorte de « Jean-Marie Messier de l’élargissement » (attention je ne vise pas ici l’auteur de cet article mais le message qu’il semble véhiculer).

    En gros je résume : « Fusionnons, fusionnons ! ne nous posons pas la question des synergies, de la mise en place d’une culture d’entreprise commune, de la volonté de chacun de participer à une aventure collective ! Nous fusionnons parce que nous n’avons pas d’autres choses à proposer »

    Avant d’avoir un espace géographique cohérent, il me semble important d’avoir une volonté politique cohérente. Dans cette perspective, l’article n’est pas construit dans le bon sens : on ne peut pas dire

    1) présentons les options d’élargissement

    2) au final ce qui importe c’est moins l’élargiseement que le projet politique de construction d’une fédération (auquel je souscris).

    Dans tous les cas cet article a le mérite de montrer qu’il n’est pas évident d’associer intégration horizontale (élargissment) et verticale (fédéralisme). A titre personnel je ne crois pas que l’on puisse constituer une fédération à 38 Etats membres (déjà qu’à 27 cela n’a pas été le cas)=> les Etats Unis n’étaient que 13 et ils constituaient un ensemble relativement homogène sur le plan culturel.

    Enfin, ce n’est pas la taille d’un pays qui détermine l’aisance avec laquelle il s’intègre dans l’Union européenne=> exemples inversés : Espagne et Danemark.

  • Le 13 novembre 2008 à 18:21, par Maël Donoso En réponse à : Précisions sur les buts de l’article

    Pour répondre, tout d’abord, au message de Jean-Lo : je partage tout à fait ton opinion selon laquelle le projet politique commun, par exemple l’inscription dans une démarche fédéraliste, doit être la base et la condition de tout élargissement. Aucun Européen soucieux de l’intégration politique n’accepterait, je pense, la perspective d’un élargissement pour l’élargissement, dénué de but. Il est donc évident que je ne défends pas une extension des frontières de l’Europe qui ne serait pas basée sur un projet politique solide. Si nous sommes dans une perspective fédéraliste, le sous-entendu est donc que tous les États qui adhéreront à l’Union le feront pour s’inscrire dans un programme politique commun.

    Mon article ne propose évidemment pas un programme stratégique complet pour les futurs élargissements. Une telle étude serait faisable (et serait d’ailleurs intéressante à faire), mais réclamerait beaucoup plus de temps et la confrontation de plusieurs opinions. Mon but était beaucoup plus pragmatique : situer l’adhésion de la Turquie dans une perspective géographique plus large, par l’évocation de quelques possibles. On peut le voir comme un début pour une réflexion plus approfondie, mais bien sûr pas comme une conclusion. En d’autres termes, je ne me prononce pas pour l’un ou l’autre scénario, mais si ce débat intéresse certaines personnes, il pourrait être poursuivi.

    J’ai volontairement soulevé la question épineuse de la Russie, car il n’a échappé à personne que les relations UE-Russie sont pour le moins chaotiques par manque d’un projet d’avenir commun : les deux puissances savent que leurs destins sont liés, leurs sphères d’influence se rencontrent et se chevauchent progressivement, et la question de leurs relations futures est loin d’être résolue. Par ailleurs, je ferais preuve de plus de retenue lorsqu’il s’agit de l’avenir de la Russie. Camille, l’analyse que tu fais de la situation russe est sans doute correcte dans l’état actuel des choses, mais les relations internationales sont trop fluctuantes pour qu’on s’accorde des certitudes sur le long terme. Les projections politiques les mieux étudiées ont-elles réussi à prévoir, avant 1989, la chute du Mur de Berlin ou la dissolution de l’URSS ? Une adhésion de la Russie à l’Union est hautement improbable, mais sur le long terme, elle ne me semble pas impossible.

    Cela ne signifie pas que je soutiens cette éventualité. Encore une fois, je n’ai pas la prétention dans cet article d’évoquer les élargissements souhaitables, mais de fournir quelques scénarios d’élargissements possibles, en les classant par vraisemblance. Et je remercie tous les commentaires qui ont été faits, qui me semblent utiles et nécessaires pour faire avancer ce débat.

  • Le 3 décembre 2008 à 06:24, par Martina Latina En réponse à : Les dimensions de l’Europe.

    Puisque EUROPE désigne d’abord en langue sémitique le CREPUSCULE et ensuite, en grec au premier millénaire avant notre ère, la VUE-LARGE, la démocratie inscrite dès l’origine dans notre continent par la diffusion des moyens de communication phéniciens est évidemment appelée à propager toujours mieux la seule force dont une civilisation ait toujours besoin pour s’épanouir même dans l’obscurité qui se reforme sans cesse devant elle : l’énergie et la lumière qui rayonnent du dialogue fraternel ; à nous d’être, à la suite de la princesse levantine qui nous prêta son nom, des EUROCITOYENS éveillés et lucides, non seulement face au problème de nos limites extérieures, mais surtout face aux clivages internes qui entravent encore la marche de la JUSTICE SOCIALE pourtant vitale à la Construction européenne !

  • Le 3 décembre 2008 à 09:07, par Ronan En réponse à : Les dimensions de l’Europe.

    Mouais, attention à ne pas tomber dans le lyrisme à tous propos : d’abord parce que la Démocratie (au sens d’organisation pacifique d’un débat public contradictoire, mais appaisé...) n’est pas une propriété intellectuelle de l’Occident. Les travaux du Prix Nobel Amartya Sen (Prix Nobel d’économie 1998 ; Cf. lien électronique ci-dessous...) plaident dans le sens de plus de nuance et de moins d’ethnocentrisme européen.

    Ensuite, parce que les anciens Grecs rigoleraient bien - sans doute - si nous leur affirmions tout de go que nous leur devons la « démocratie ». Pour la bonne et simple raison que lorsque ce terme apparait, historiquement, c’est là un terme péjoratif et dépréciatif qui caractérise alors la dictature de la foule et qui est - dans l’esprit des Grecs anciens - plus négatif encore que les termes « démagogie » et « tyrannie » (termes politiques recouvrant alors des sens plus neutres voire positifs, à l’époque en tout cas...).

  • Le 4 décembre 2008 à 06:56, par Martina Latina En réponse à : Jusqu’où iront les frontières de l’Europe ?

    Vous avez raison, l’Inde continue de nous inspirer depuis des millénaires : nous le reconnaissons tard, mais en adoptant progressivement ses innovations révolutionnaires. Rappelez-vous cependant que la DEMOCRATIE toujours en devenir n’a pu naître que des instruments... démocratiques avant la lettre que sont la navigation efficace et le limpide alphabet, tous deux diffusés généreusement par les Phéniciens à travers le bassin méditerranéen : sans ces deux intermédiaires eux aussi orientaux, la TYRANNIE dont vous parlez aurait implosé au début du premier millénaire avant notre ère, et l’exposition visible actuellement au Château de Karlsruhe le montre à l’évidence ! Certes, comme Platon le déplorait avec une amère ironie, la démocratie athénienne souffrait de défauts et surtout d’un excès, la « démesure » qui précisément fit péricliter... Périclès et à terme la cité même d’Athènes ; la DEMAGOGIE néanmoins n’était pas plus recommandable aux yeux d’ARISTOTE ! Je reviendrais plutôt ce matin au dissident tchèque Jan PATOCKA et au livre paru en 1983 sous le titre PLATON ET L’EUROPE aux éditions Verdier (dans la collection LA NUIT SURVEILLEE !) : il s’agit d’un séminaire privé qui s’est tenu dès l’été 1973. On peut y lire entre autres, aux pages 99 et 100, que l’Europe est née du SOIN DE L’AME tel que Socrate le préconisait d’après Platon, mais qu’elle est en danger de DISPARITION depuis qu’elle a remplacé purement et simplement le soin de l’âme par LA DOMINATION DU MONDE ; car, d’après J. PATOCKA, l’Europe est ENTREVISION, UNE VIE FONDEE SUR LE REGARD DANS CE QUI EST. La traduction du tchèque par Erika Abrams n’a sans doute pas résolu toutes les difficultés de ce grand texte, où se lit en transparence et à l’avance, avec l’inventive résistance d’un Vaclav HAVEL, la Révolution de velours de 1989. Mais, tout en se gardant d’un lyrisme déplacé, il faut avouer que les deux étymologies d’EUROPE se trouvent ici réunies ; car on sait qu’en langue sémitique ce nom signifie CREPUSCULE et, en grec, LARGE VUE. Or quel facteur opéra cette mutation lumineuse, sinon le vecteur ALEPH-ALPHA ? Dans la forme TAURINE qui porte ce nom sémitique et qui reflète les moyens familiers aux PHENICIENS, la barque hydrodynamique ouvrant enfin l’inconnu semble se superposer à la marque ALPHAbétique croisant les peu commodes systèmes de notation précédents et orientaux pour affecter, après des millénaires, à chaque son un signe clair, à commencer par la première lettre qui sonne et se trace comme désignant la tête... bovine. Nous éviterons donc de tourner en rond si nous acceptons l’idée pourtant bizarre que LES FRONTIERES IRONT quelque part, si le TAURILLON n’oublie ni la rapidité ni la précision avec lesquelles un taureau mythique nous amena la première figure réelle d’EUROPE - et s’il évite de trahir le nom de celle-ci en devenant soudain myOPE !

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