Kader Arif, ses réponses pour une Europe forte et sociale

, par Laurent Nicolas

Kader Arif, ses réponses pour une Europe forte et sociale

Kader Arif, tête de liste du Parti Socialiste dans la circonscription du Sud Ouest, et signataire du Pacte des Jeunes Européens, a lui aussi répondu à nos questions pour faire vivre le débat de cette élection européenne.

Le Taurillon : Quelles doivent être les priorités du budget communautaire pour les 5 prochaines années ?

Kader Arif : Nous souhaitons avant tout un budget responsable, capable de faire face à la crise mondiale et de répondre aux besoins des européens en matière de croissance, d’emploi, d’énergie. Nous l’avons vu, les actions coordonnées contre la crise ne suffisent pas et menacent aujourd’hui la cohésion entre les Etats membres. L’augmentation du budget européen à 1,5% du PIB nous semble donc nécessaire pour que celui-ci ait un rôle de stabilisation économique. Il reviendra aux socialistes européens de se mobiliser sur la révision des perspectives financières 2007-2013. Une opportunité d’offrir à l’Union un budget digne de ce nom et surtout capable de relever les défis qui s’imposent à l’Union : la crise financière mondiale évidemment mais aussi le changement climatique, la crise alimentaire, la crise énergétique. Il s’agit également de concentrer nos efforts aux politiques de soutien à l’emploi et à la croissance pour qu’une véritable Europe sociale voit le jour.

Le Taurillon : Etes-vous favorable la création d’un gouvernement économique européen qui remplacerait l’actuel Eurogroupe ?

Kader Arif : Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la mise en place d’un gouvernement économique européen avec à sa tête un Ministre européen de l’économie et des finances. Ainsi il pourra, entre autres, proposer qu’une partie du revenu de l’impôt sur les sociétés devienne à terme une ressource propre du budget européen. Cet impôt prélevé en tout ou partie dans les Etats membres, alimenterait directement le budget de l’UE en tant que véritable ressource propre et créerait un lien direct entre l’Union et les contribuables européens sans augmentation de la charge fiscale. Pour cela, une coordination des politiques fiscales et un certain degré d’harmonisation sont nécessaires.

La réalisation d’une véritable harmonisation fiscale à 27 pays est un processus difficile, puisque ce sont les Etats membres qui restent largement compétents dans ce domaine et que les décisions se prennent à l’unanimité. Il s’agit également de défendre l’instauration d’un salaire minimum dans chaque pays de l’Union. Il n’est naturellement pas question d’instituer un salaire minimum européen unique, du même montant pour toute l’Union, mais de favoriser une augmentation du niveau des salires de tous les citoyens européens. Un haut niveau de salaire dans toute l’Europe est la meilleure protection contre les différentes formes de dumping et les délocalisations.

Des évolutions institutionnelles sont nécessaires, l’Europe a le devoir de se doter d’une autorité commune unique pour décider de la politique budgétaire et fiscale.

Le Taurillon : Quelles sont d’après vous les priorités européennes en matière énergétique ?

Kader Arif : Alors que l’Europe du XXIe siècle est à la recherche de ce qui pourrait symboliquement remplacer le charbon et l’acier comme moteur de l’intégration, il apparaît très nettement que la problématique énergétique pourrait remplir ce rôle, en ce qu’elle recouvre à la fois une dimension interne (accès, prix, droit des consommateurs), externe (sécurité et diversification de l’approvisionnement) et globale (changement climatique).

Avec le PSE, nous poussons au plan européen les questions de pauvreté énergétique, de solidarité entre Etats membres (densification des interconnections transfrontalières pour parer aux black-out électriques ou aux affaiblissements provisoires de flux gaziers) et de transition vers des énergies plus propres afin que l’Europe tienne les promesses de Kyoto, et soit aussi en position d’impulser les engagements de demain. Le défi du changement climatique requiert de réduire rapidement et sensiblement les émissions de gaz à effet de serre et d’accélérer la transition vers l’utilisation collective et concertée d’énergies non-fossiles.

Le Taurillon : Pour vous le Président de la Commission européenne doit‐il être issu de la majorité politique du Parlement européen ?

Kader Arif : Il nous semble important que le Président de la Commission européenne représente le choix politique des citoyens aux élections européennes. Organe exécutif de l’Union, la Commission est responsable de la mise en oeuvre des décisions du Parlement et du Conseil, c’est dire son importance même si elle reste politiquement indépendante des gouvernements nationaux. Cependant, nous considérons, outre l’élection des 736 députés européens, que l’enjeu des élections du Parlement doit être beaucoup plus visible car c’est aussi celui du choix du Président de la Commission. Chaque parti européen devrait pouvoir présenter leur candidat avant les élections donnant ainsi plus de poids à une élection peu populaire. Une vraie campagne dans laquelle chaque citoyen choisirait pleinement et en toute transparence l’orientation politique de l’Europe.

Le Taurillon : Etes-vous favorable à l’instauration d’un 9 mai férié dans toute l’Europe, à la place du 8 mai, pour célébrer à la fois la fin de la guerre et les débuts de la construction européenne ?

Kader Arif : Le 8 mai commémore légitimement la fin de la guerre 39-45 et la victoire des Alliés sur le nazisme. Depuis, l’Union européenne s’est construite dans la paix et chaque pays qui y adhère souscrit à des objectifs de paix, de progrès social, de développement économique et de solidarité. Un jour après, le 9 mai, a lieu la Journée de l’Europe en souvenir du 9 mai 1950 et de la déclaration de Robert Schuman et de Jean Monnet jetant les premières bases d’une fédération européenne.

Cette journée n’est pas fériée et passe bien souvent inaperçue de la plupart des Français. La réunion des deux journées en un seul jour férié, partagé par les autres pays européens, aurait bien sûr une signification profonde qui pourrait être à l’origine d’enseignement et d’exemple pour tous les jeunes Européens. Ce serait l’occasion de se souvenir que la construction européenne et la paix n’ont pas toujours été une évidence et qu’elles n’en sont que plus nécessaires.

Le Taurillon : Le Traité de Lisbonne a été ratifié par la quasi totalité des pays de l’Union. Son application est conditionnée par le résultat du second referendum en Irlande. Cette impasse montre les limites du processus actuel de modification et de ratification des traités, où un Etat, quelque soit sa taille, peut faire échec à la volonté générale européenne. Quelles sont vos propositions pour résoudre ce problème ?

Kader Arif : La ratification du Traité de Lisbonne par l’Irlande me semble plus complexe. Nous ne pouvons pas stigmatiser un peuple qui a pris une position qui n’était pas celle que nous aurions souhaité. On peut, certes, s’étonner des revendications irlandaises. En effet, ce pays a transformé son économie grâce aux fonds structurels. Aujourd’hui, ce « petit » pays craint de voir son rôle diminuer dans l’UE, notamment du fait des nouvelles règles de vote (commissaire européen). Il me semble qu’il s’agit d’un vote conservateur, rejetant l’harmonisation fiscale, favorable à la libre entreprise plutôt qu’une une hostilité franche vis à vis de l’Europe. Pourtant, nous devons aller de l’avant et faire avancer la construction européenne. Nous attendons prochainement le nouveau vote des Irlandais, qui du fait de la crise ont changé de point de vue sur le Traité de Lisbonne. Il est urgent aussi de s’interroger sur la façon de réconcilier l’Europe et les Européens. Nous avons besoin de redécouvrir une Europe des résultats, et de retrouver de la part des dirigeants des pays de l’UE un enthousiasme européen.

Le Taurillon : Soutenez vous la mise en place d’une carte Bleu & Or sur le modèle de la carte Verte américaine, qui permettrait aux citoyens extérieurs à l’Union Européenne de s’installer et de travailler légalement dans l’espace communautaire sans besoin de visa ?

Kader Arif : Nous voulons une politique d’immigration qui accorde davantage de place à l’immigration légale, qui favorise l’intégration qui respecte les droits fondamentaux et qui engage un véritable dialogue avec les pays tiers. En matière d’immigration légale, un premier pas timide a été réalisé avec l’adoption d’une "carte bleue" européenne permettant de faciliter l’accès des travailleurs hautement qualifiés (et de leur famille) au marché du travail européen. Nous avons également œuvré à la création d’un socle commun de droits pour les travailleurs migrants en situation régulière incluant notamment des conditions de travail similaires à celles applicables aux travailleurs nationaux, et le transfert vers le pays d’origine des droits accumulés en matière de retraite. Nous sommes vivement opposés à l’"immigration choisie" prônée par la droite. Nous souhaitons , au contraire, promouvoir une politique d’immigration légale basée sur des règles justes, en élargissant par exemple le système de la "carte bleue" aux travailleurs peu ou pas qualifiés.

Le Taurillon : Quelles sont selon les vous les priorités en matière de politique européenne de défense ?

Kader Arif : L’UE doit être à l’avant-garde de l’action pour la paix et le développement social et économique durable dans le monde, conditions premières de la sécurité à laquelle ont droit tous les êtres humains. Dans le monde instable d’aujourd’hui, trop de femmes, d’hommes et d’enfants sont confrontés à des menaces de tous ordres. Les Etats de l’UE doivent donc agir encore plus solidairement pour garantir la sécurité de nos pays et de nos peuples. Dans un premier temps, nous proposons que l’UE travaille davantage dans le domaine de la prévention, de la résolution des conflits et de la stabilisation en améliorant les capacités conjointes des Etats et en assumant la responsabilité partagée de missions de maintien de la paix dans les zones de crise, dans un cadre défini par les Nations Unies.

Nous proposons également d’intensifier les efforts européens en faveur du désarmement international, particulièrement en perfectionnant les accords internationaux de contrôle des armements et non-prolifération, et de rendre plus strictes et transparentes les règles du Code de conduite européen sur les exportations d’armes. Nous souhaitons un monde sans arme nucléaire. Il va de soi qu’une véritable politique de partenariat est à améliorer pour assurer une stabilité mondiale. Nous voulons donc, par exemple, renforcer les partenariats européens avec les pays proches. Nous souhaitons la création d’une Union de la Mer Noire et d’un Partenariat de l’Europe Orientale afin de renforcer notre coopération avec nos voisins à l’Est de l’Europe. L’UE doit conduire un dialogue structuré avec la Russie, notamment sur les questions de la démocratie et des droits de l’homme, de l’énergie et de l’extension des domaines de coopération, qui pourraient inclure une initiative régionale pour la Mer Baltique.

Illustration : Portrait de Kader Arif

Source :site de Kader Arif, député sortant

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