Mondialisation

L’Union européenne face au défi de la mondialisation

, par Anne-Christine Desnuelle

L'Union européenne face au défi de la mondialisation

Depuis presque huit ans, dans un contexte mondial de plus en plus globalisé, l’Union européenne s’est fixée, dans la déclaration de Lisbonne, comme objectif de « devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale » pour 2010.

Le but de la stratégie de Lisbonne était de créer une stratégie globale, afin de permettre à l’Union européenne de s’adapter « au formidable bouleversement induit par la mondialisation et par les défis inhérents à une nouvelle économie fondée sur la connaissance ».

Une étude réalisée par la Fondation pour l’Innovation Politique , sous la direction d’Elvire Fabry, visait à partir d’un panel de huit États membres (Suède, Estonie, Pologne, France, Allemagne, Royaume Uni, Espagne, Italie) à analyser l’évolution des débats publics sur la mondialisation. D’une part, l’étude comportait, un sondage qui portait sur deux tranches d’âge, les 16-29 ans et les 30-50 ans, de manière à analyser s’il y avait un clivage générationnel significatif. D’autre part, des études qualitatives ont été réalisées par des experts des différents pays pour préciser l’état du débat public sur la mondialisation, identifier les enjeux qui priment, les acteurs qui pèsent dans le débat, les attentes en termes de régulation.

On s’aperçoit que dans la majorité des huit pays étudiés, la mondialisation semble considérée comme un fait inévitable auquel il faut s’accommoder et dont on peut tirer parti. La dimension économique de la mondialisation ne serait pas jugée négativement :
 Lorsqu’on demande aux sondés d’arbitrer entre les propositions suivantes « la mondialisation augmente mes opportunités personnelles/ la mondialisation constitue une menace pour le marché de l’emploi dans mon pays », les Européens privilégient en moyenne l’aspect « opportunités ».
 C’est en Pologne et en Estonie que les citoyens sont les plus positifs.
 Seuls deux pays présentent un visage différent : la France et l’Allemagne, pour lesquels les menaces sont jugées comme plus importantes que les opportunités.
 On notera qu’au Royaume-Uni le degré de menace est estimé aussi important que les opportunités possibles.

En France, on peut dire que la vision d’une mondialisation perçue comme un projet politique auquel il faut résister reste très répandue dans la société. Plus particulièrement, les Français ne refusent pas le changement, mais l’angoisse sociale exprimée tient à leur perte de confiance dans la capacité des élites sociales, politiques et économiques à anticiper et accompagner les mutations liées à l’Europe et la mondialisation. Si la diversité des perceptions de la mondialisation est grande, en revanche il y a un grand consensus sur le besoin de réguler la mondialisation.

Après cinquante ans d’effort et de réalisations exceptionnelles comme le marché intérieur, la monnaie unique, l’Union européenne doit donc encore faire ses preuves aux yeux de ses citoyens sur la scène internationale afin d’y défendre efficacement ses intérêts, de peser dans les décisions, et de s’ouvrir, sans craintes, au monde. Le risque est de voir l’Union européenne de moins en moins puissante dans les instances mondiales alors que les États membres y sont surreprésentés, faisant perdre toute crédibilité aux institutions communes. Le meilleur exemple est celui des instances financières dans lesquelles malgré l’€uro, l’Union, en tant que telle, est totalement absente.

En France, ... il y a un grand consensus sur le besoin de réguler la mondialisation

L’interpénétration des économies européennes est plus forte que jamais du fait notamment du marché intérieur, ce qui assure un progrès social important. Mais il est nécessaire pour l’Union de défendre de façon très énergique et virulente l’intérêt européen en tant qu’objectif spécifique assurant une cohérence que les États membres ne peuvent assurer indépendamment . L’intérêt européen doit être défini avec précision, articulé avec fermeté, défendu avec détermination pour que l’Europe puisse mettre en place les fondements appropriés de l’action future. L’Union européenne a été l’une des principales prescriptrices de normes commerciales, sanitaires, sociales et environnementales, via notamment la production normative de l’OMC. Elle a ainsi promu ses valeurs communes dans le monde. L’Union européenne devrait s’efforcer de développer une stratégie normative encore plus conquérante pour le marché international.

La stratégie de Lisbonne relancée en mars 2005 reste aujourd’hui plus que jamais d’actualité. Lors de laréunion informelle de Hampton Court, en octobre 2005, les Chefs d’État et de gouvernement ont dressé la liste des grands défis posés par la mondialisation dans les domaines de l’innovation, l’énergie, la migration, l’éducation et la démographie. L’UE travaille dès à présent sur de nombreux aspects de sa stratégie dont elle aura besoin pour relever avec confiance le défi de la mondialisation. L’Union européenne devra intensifier le travail dans ces domaines pour dynamiser sa capacité à influencer l’agenda de la mondialisation.

L’Union Européenne doit être en mesure de proposer à ses citoyens une vision mobilisatrice de la manière dont l’Europe s’adapte, dans un contexte mondial, à des besoins nouveaux, tout en protégeant leurs intérêts et en réformant sa gouvernance économique et sociale pour préserver la prospérité, la solidarité et la sécurité à l’intention des générations actuelles et futures. Des défis d’une telle ampleur ne peuvent être relevés efficacement qu’en tirant pleinement parti du partenariat entre les États membres et l’Union.

Il appartient donc à chaque État membre de relever le défi de la réforme économique et sociale et d’aider l’Europe – tant au niveau de l’Union qu’au niveau national – à faire ce qu’il faut pour tirer parti de la mondialisation. De son côté, la Commission devrait présenter des initiatives détaillées, qui montreront de quelle manière la dimension européenne peut offrir une vision à long terme et un champ d’action allant au-delà des possibilités des États membres individuels.

Comme le rappelle la Communication de la Commission sur le défi de la mondialisation , les dirigeants européens doivent avoir une vision claire des éléments clés d’une action européenne, et notamment :
 des principaux messages à adresser aux citoyens au sujet de la réaction de l’Europe face à la mondialisation,
 de la manière dont les divers éléments de l’action interne et externe de l’UE doivent converger,
 de la manière dont les initiatives nationales et communautaires peuvent être coordonnées pour accroître au maximum les avantages qu’en tireront les citoyens et les consommateurs.

Ces éléments doivent constituer le point de départ des travaux du Conseil européen du printemps 2008, qui sera le principal rendez-vous annuel chargé de faire le point sur la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi et de faire converger les différentes initiatives envisagées : il s’agira de montrer comment son nouvel agenda politique, conjointement avec un dynamisme politique renouvelé, fera de l’Europe un acteur déterminé et efficace à l’ère de la mondialisation.

Lors du dernierConseil européen, du 14 décembre 2007, une déclaration spécifique a été annexée aux conclusions de la Présidence sur la mondialisation afin d’en définir plus spécifiquement les enjeux mais aussi les moyens dont l’Union dispose aujourd’hui avec le Traité de Lisbonne s’il est ratifié. Elle s’efforce de concilier l’ouverture de l’Europe au monde avec l’exigence de règles internationales garantissant une concurrence loyale et équitable. Le texte énumère les différentes exigences : prendre en considération les intérêts de tous les Européens, renforcer les organisations internationales. La suppression des entraves aux échanges est citée, et en même temps l’exigence de conditions de travail décentes, le respect de la propriété intellectuelle, l’intégration des immigrés. Il reste à trouver l’équilibre et la hiérarchisation de toutes ces exigences.

L’Union européenne doit proposer une réaction coordonnée à ce défi majeur qu’est la mondialisation : expliquer aux citoyens que l’Union européenne représente, pour les Européens, le meilleur moyen d’imprimer leur empreinte dans la mondialisation.

Illustration : visuel issu du site du Mouvement Européen - France. Réalisation par Fabrice Tabar.

Nous remercions le Mouvement Européens - France de nous avoir autorisé à reprendre cet article paru dans sa publication « Le Courrier Européen » dans son numéro 8.

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