Une taxe oui, mais quelle taxe ?
La Taxe sur les Transactions Financières (TTF) proposée par la Commission européenne se veut ambitieuse. Elle taxerait tous les établissements financiers basés ou établis dans Union européenne. La Commission a aussi adopté une définition large des établissements concernés, allant des banques, aux entreprises d’investissements en passant par les fonds de pensions.
Les taux retenus pour la TTF sont de 0.1% sur les obligations et les actions et de 0.01% sur les produits dérivés, que les opérations se fassent sur les marchés ou de gré à gré. Les deux parties à la transaction devront s’acquitter de la taxe.
Salon José Manuel Barroso, la TTF devrait rapporter 55 milliards d’euro à l’UE. Ce nouveau revenu serait ensuite partagé entre les Etats et l’UE, mais permettrait néanmoins à cette dernière de remplacer une partie des contributions étatiques.
Que l’illusion ne nous aveugle pas
Sans vouloir jouer les Cassandre, il ne faut pas se réjouir trop vite de cette bonne nouvelle.
Tout d’abord, cette mesure doit être acceptée par le Conseil et les réticences britanniques se sont déjà fait sentir. Londres a fait savoir qu’elle craignait une délocalisation des activités financières actuellement établies à la City. Il est donc possible que les Etats vident ce projet de sa substantifique moelle.
Ensuite, même si la mesure est adoptée, la part restant dans l’escarcelle de l’UE risque d’être faible en comparaison de celle accordée aux 27. Il est donc absolument nécessaire que la Commission ne cède pas aux Etats dans la redistribution des revenus liés à cette taxe
Il faut aussi prendre garde que cette nouvelle ressource financière ne soit pas utilisée comme prétexte pas les Etats pour réduire drastiquement leurs contributions à l’UE. Au vu des longues tractations sur les contributions à apporter au budget de l’Union, cet argument serait vite utilisé par les Etats membres.
Une mesure sans précédent
Au-delà, de l’efficacité réelle ou supposée d’une telle taxe sur la limitation de la spéculation, et des craintes formulées précédemment, cette mesure est un pas en avant.
En effet, la Commission prouve qu’elle n’est pas cette entité à la solde des marchés financiers. L’Union européenne prend les devants sur une mesure demandée par 65% des Européens. C’est une décision importante qui redore le blason des institutions européennes engluées dans la crise grecque. Les critiques sur une Commission peuplée uniquement de technocrates loin du peuple se feront sans doute atones pour quelques jours.
Et surtout, l’UE commence à disposer peu à peu d’un budget propre. Par cette mesure nous nous dirigeons à petits pas vers une autonomisation des ressources financières européennes. Il faut que les institutions européennes se saisissent de l’occasion pour montrer qu’elles sont en mesure de mener à bien des projets ambitieux.
On peut saluer l’initiative de la Commission. Nous nous plaignons trop souvent de certaines de ces directives, pour savoir reconnaître une proposition audacieuse lorsqu’elle se présente.
Financièrement ce n’est pas une révolution, mais symboliquement le message est fort.
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