Partis politiques

Merci au PS de ce vote courageux !

Sur la question de la ratification du Traité de Lisbonne en Congrès

, par Maurice Braud

Merci au PS de ce vote courageux !

Après l’article "L’Europe divise toujours le PS", nous ouvrons nos colonnes à nos amis de Action fédéraliste « Socialisme & Liberté ». Ils soulignent le fait que le Parti Socialiste a choisi de ré-affirmer son engagement européen malgré les défauts du nouveau texte. Voici l’article de Maurice Braud.

Jean Quatremer, journaliste du quotidien Libération et animateur du blog « Coulisses de Bruxelles, UE » a publié récemment un billet sur son blog, à l’occasion de la définition de la position du Parti socialiste sur le texte du Traité dit de Lisbonne par le bureau national du PS, qui appelle quelques remarques.

Un clivage entre pro et non-européens de 60 % contre 40 %

Tout d’abord, pour être exact, en plus des deux abstentions, il faut noter un refus de vote et, d’autre part, indiquer aux lecteurs que plusieurs membres du Bureau national présents au début de cette réunion, favorables en outre à une réponse positive, n’ont pu finalement participer au vote, celui-ci intervenant finalement très tard.

En conséquence, et contrairement à ce qu’indique Jean Quatremer, l’écart entre, d’une part, celles et ceux qui approuvent un texte qui facilite un meilleur fonctionnement de l’Union européenne à défaut d’en permettre la relance et, d’autre part, les autres, n’est finalement pas aussi réduit que cela : c’est plus ou moins le résultat du référendum interne de décembre 2004 entre militants socialistes, selon un rapport grosso modo de 60/40.

Est-ce que deux sensibilités sur l’Europe peuvent continuer de cohabiter dans la même formation politique ? C’est la question que pose Jean Quatremer, et à laquelle il apporte sa réponse. Pourtant, à y regarder d’un peu plus près, il n’est pas sûr que les vrais clivages soient là où les situe Quatremer.

Des dissensions qui existent aussi à l’UMP

Sur l’Europe, les diverses formations politiques françaises à prétention majoritaire (RPR/UMP et PS notamment) abritent depuis longtemps des sensibilités européennes diverses. Les RPF/UDR/RPR furent longtemps remarquables par leur opposition majoritaire à la construction communautaire, mais en développant peu-à-peu néanmoins, d’abord sous Georges Pompidou et Jacques Chaban-Delmas, puis avec Edouard Balladur et finalement Nicolas Sarkozy un noyau politique singulièrement plus favorable à l’UE.

Aujourd’hui cette sensibilité pro-européenne est désormais majoritaire à l’UMP, avec le renfort récent des libéraux ex-Républicains, Indépendants et autres Démocratie Libérale, auxquels pour être complet il faut ajouter quelques ex-UDF (Philippe Douste-Blazy). Notons cependant que, fort prudemment, le Président de l’UMP Nicolas Sarkozy a évité en 2005 de faire une campagne active en faveur du référendum pour le traité constitutionnel, soucieux de l’équilibre interne de son organisation, avec sur les flancs une frange souverainiste non négligeable menée notamment par Nicolas Dupont-Aignan, et d’éviter de renforcer une initiative du Président Jacques Chirac.

Ce clivage interne perdure au sein de l’UMP, même si momentanément et immédiatement, après les élections présidentielles, il est moins visible et audible. Plus, la frange anti-européenne se renforcera vraisemblablement en son sein dans les années à venir, si l’UMP est soucieuse dans la durée de « siphonner » l’électorat FN. Nicolas Sarkozy d’ailleurs ne s’y trompe pas, et s’il n’oublie pas un 11 novembre de pavoiser de drapeaux européens l’Arc de l’Etoile, il n’omet pas non plus de stigmatiser injustement la BCE.

Le sujet européen, une division historique au PS

Quant au PS, c’est là aussi une fort vieille histoire, qui a peu à voir avec la question de l’économie de marché et du capitalisme. Guy Mollet, cité injustement par Quatremer, en est la meilleure expression : révolutionnaire dans l’opposition et social-démocrate au pouvoir sans doute (et encore faudrait-il expliquer de quoi l’on parle !), mais toujours – avec obstination jusque dans la défaite – résolument européen. A l’inverse, Alain Savary dans les années 50, le radical Pierre Mendès France et quelques autres, sans être ni des gauchistes ni des étatistes invétérés, s’opposèrent qui à la CED, qui au traité CEE. Et en 2005, l’opposition au traité constitutionnel au sein du PS ne peut être comprise à travers le seul prisme droite/gauche, entre partisans de l’économie de marché et anti-libéraux. Laurent Fabius comme expression suprême de l’antilibéralisme ? Allons, soyons sérieux !

La vérité est que, plus que jamais, présidentialisation de notre système politique aidant, les grands partis majoritaires qui doivent produire et soutenir les candidats à la présidentielle doivent pour cette fin agréger des catégories sociales - mais aussi des aspirations - diverses, parfois concurrentes, quelquefois contradictoires.

Le Parti socialiste, comme l’UMP ou toute autre formation politique qui se donne pour vocation de devenir majoritaire et de porter son champion à la Présidence de la République doit et devra construire un discours composite susceptible de répondre aux attentes d’électorats multiples.

François Bayrou, au cours de la dernière campagne présidentielle, n’a pu échapper lui non plus à cette terrible loi, et celles et ceux qui attendaient de lui – enfin !- un engagement militant en faveur de l’Europe fédérale et un programme politique construit autour de cette exigence en sont restés pour leurs frais. À partir de l’instant où François Bayrou a commencé à croire à la possibilité d’être présent au second tour, il était contraint de mettre la question européenne au second plan.

Un choix qui affirme l’orientation pro-européenne du Parti Socialiste

Aussi ne faut-il pas cracher sur la soupe, mais au contraire se réjouir du vote courageux des socialistes français !

Comme en 2005, ils ont plus de coups à prendre dans cette affirmation européenne que de gains à en espérer. Aucune autre formation politique française n’a débattu de ce sujet aussi franchement, démocratiquement et ouvertement. L’Action fédéraliste « Socialisme & Liberté » (AFSL) salue le résultat du vote des instances du PS. Sans doute le nouveau traité ne permet-il pas véritablement de relancer la construction européenne, mais il autorise un fonctionnement plus cohérent des institutions communautaires. Il reste maintenant à tracer la voie de l’avenir.

Les socialistes, en France comme en Europe, doivent y prendre toute leur part. L’Action fédéraliste « Socialisme & Liberté » s’attachera au cours des mois prochains à susciter diverses initiatives en ce sens.

L’Action Fédéraliste, Socialisme et Liberté (A.F.S.L.) se donne pour objectifs essentiels :
 d’approfondir et de promouvoir le fédéralisme sous toutes ses formes.
 d’agir sur l’opinion publique, et plus particuliérement dans les milieux populaires et syndicaux, en faveur de l’unité fédérale de l’Europe. L’AFSL prône en outre pour la France des institutions décentralisées et des structures internes de caractère fédéral de nature à faciliter son insertion dans un ensemble européen fédéral.

Dans son action, comme dans son recrutement, elle s’affirme socialiste, démocratique, laïque et d’inspiration fédéraliste.

Illustration : logo du Parti Socialiste issu du blog Design et Typo.

Vos commentaires
  • Le 10 janvier 2008 à 08:00, par valery En réponse à : Les socialistes encore dans la confusion...

    Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, annonçait mardi 8 janvier que les députés PS voteraient la ratification mais ne participeraient pas au Congrès à Versailles.

    Une telle prise de position à de quoi étonner, d’abord parce qu’elle semble ne pas recueillir l’accord de tous les dirigeants socialistes et d’autre part parce qu’elle manque singulièrement de cohérence.

    En effet si l’on soutiens un traité internaitonal il est alors nécessaire d’aller voter la révision constitutionnelle correspondante.

    On pourrait se réjouir de savoir qu’une telle attitude implique que la ratification du traité de Lisbonne se fera sans difficulté. Toutefois il me semble surtout qu’il faille regretter un comportement qui relève avant tout de la politique politicienne. La seule attitude responsable consisterait à assumer leurs choix et à expliquer et promouvoir le nouveau traité (lequel succède au défunt projet de constitution européenne de 2004).

  • Le 10 janvier 2008 à 17:14, par Ronan En réponse à : Les socialistes encore dans la confusion...

    Et bien moi j’aime bien l’attitude du PS en la matière : (1) d’abord parce qu’elle rend quasi certaine la ratification du dit Traité (vu que la révision de la Constitution - aux 2/3 des Députés et sénateurs présents ce jour là, il me semble - paraît désormais plus que jamais acquise...) ;

    (2) ensuite parce l’absence à Versailles de certains Députés plus ou moins eurosceptiques risque donc bien de nous priver du ’’sit-in altermondialiste géant’’ ou de la violente ’’contre-manifestation’’ façon ’’réunion de l’OMC (ou du G8 ?!) à Seattle’’ imprudemment annoncé(e)s par certains contre la ratification de ce Traité...

    Fin proche, annoncée mais prévisible (donc...) d’un ’’buzz’’ médiatique disproportionné et d’un ’’psychodrame’’ aux allures - plus que jamais - de tempête dans un verre d’eau. (Vu de province, toute cette agitation ’’parisienne’’ autour de la ratification du Traité européen semble d’ailleurs lointaine, disproportionnée, incompréhensible et - somme toute - assez ridicule...).

    Les ’’alter-européens’’ et les ’’souverainistes’’ vont enfin pouvoir vraiment se compter. Et je vous paie mon billet qu’en guise de ’’manifestation de masse’’, ils seront finalement bien moins nombreux que les Fédéralistes à Nice, en 2000 (et - somme toute - assez ridicules). Du coup, il leur sera d’autant plus difficile pour eux de prétendre - à eux seuls - représenter ce ’’Peuple’’ dont ils prétendent, à longueur de temps, être la seule voix représentative et légitime...

    Aussi, il est vrai qu’il faut tout de même dire que nos compatriotes ont - en ce moment - bien d’autres chats à fouetter que d’aller se geler dans des ’’sit-in’’ incertains et hivernaux...

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