Ce village polonais de Bukowo (i. e : le ’’lieu des hêtres’’) est une petite communauté agricole de Pologne dont James A. Michener, le fameux auteur américain aux best-sellers bien connus [1], se propose de nous raconter l’histoire pluriséculaire.
Et ce, à travers le récit de la vie de trois familles polonaises d’origines sociales diverses dont les destinées se fondent cependant avec le cours des événements.
Le récit d’une Histoire tumultueuse et méconnue
C’est ainsi et de manière très plaisante que ce livre nous révèle l’histoire tumultueuse de la Pologne depuis les invasions tataro-mongoles du XIIIe siècle jusqu’à nos jours (ou, tout du moins, jusqu’aux événements de 1980-1981 : la genèse du syndicat libre ’’Solidarnosc’’ et le coup d’état de décembre).
Et ce, à travers la saga familiale des magnats (i. e : grands aristocrates) Lubonski de Gorka, des petits nobles Bukowski et des modestes Buk, une famille de petits paysans polonais séculairement et solidement enracinés sur les rives de la Vistule.
Envahie par les Chevaliers teutoniques au Moyen Age, pillée par les Suédois au XVIIe siècle, menacée par les Ottomans aux Temps moderne puis divisée entre Prussiens, Autrichiens et Russes à l’extrême fin du XVIIIe siècle, la Pologne a connu une histoire tourmentée et difficile : cessant même d’exister pendant tout le XIXe siècle jusqu’à cette première guerre mondiale à l’issue de laquelle elle aura finalement arraché son indépendance recouvrée.
Pays envahi, pays divisé, pays occupé, pays opprimé par les Russes et par les Prussiens, par les Nazis et les Soviétiques, la Pologne n’est cependant pas seulement le pays éternellement rebelle du XIXe siècle ou le pays d’Auschwitz, le pays qui subit également le drame de Katyn, massacres et déportations.
Le portrait d’un peuple attachant
Mais la Pologne, c’est aussi le pays de Nicolas Copernic et de Jan Kochanowski, le pays d’Adam Mickiewicz et de Frédéric Chopin : un grand royaume multiculturel, multiconfessionnel et multinational de l’Europe médiévale et du début des Temps modernes qui rayonnait alors, autrefois, dans toute l’Europe centrale, d’ ’’une mer à l’autre’’ : de la mer noire à la Baltique.
Morale de cette histoire : l’image d’un peuple qui naît - de l’aveu même de l’un des protagonistes du récit - avec dans une main une épée et dans l’autre une brique et qui, après chaque défaite, reconstruit sans cesse ses maisons et ses foyers incendiés.
Ici nos héros s’appellent Szymon, Janko, Kazimir, Krzyztof, Pawel, Lukasz, Cyprjan, Roman, Feliks, Andrzej, Wiktor. Et leurs courageuses compagnes : Biruta, Danuta, Zofia, Barbara, Elzbiéta, Krystyna ou Jadwiga. Et leurs adversaires restent toujours les mêmes : les forces d’oppression venues l’étranger comme de l’intérieur, l’orgueil de la noblesse et l’absence de courage politique des dirigeants du pays.
Ces héros nous enmènent sur les champs de bataille de Legnica [2] de Grunwald [3], derrière les remparts de Czestochowa assiégée [4] ou sous les murs de Vienne [5] ; sur la route médiévale de l’ambre, dans les grands domaines terriens nobiliaires d’Ukraine, dans l’enfer du camp de concentration nazi de Majdanek ou dans ces meetings politiques improvisés où, en 1980-1981, on conteste l’ordre établi, communiste.
Dans ce roman fleuve, outre le bonheur de la lecture, James A. Michener nous offre là - dans cette riche fresque - les clés de l’âme polonaise : le portrait passionnant d’un peuple mal connu, parfois heureux et souvent malheureux, passionné, romantique et déchiré, mais attachant, car courageux et obstiné.
Un ouvrage indispensable à lire pour mieux comprendre les actuels déchirements de la vie politique polonaise, pour mieux décrypter ses grilles de lectures, pour mieux comprendre ses comportements, pour mieux identifier ses peurs. A lire, absolument.
1. Le 6 décembre 2009 à 21:19, par Henri
En réponse à : Pologne (James A. Michener)
Merci pour cet article !
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