Municipales 2008

Pour un droit de vote complet pour les citoyens européens

, par Dumitru Drumea

Pour un droit de vote complet pour les citoyens européens

Le traité de Maastricht donne une dimension politique à la construction européenne. Il donne le droit de vote aux citoyens de tout pays de l’Union européenne aux élections municipales et européennes. Mais ne faut-il pas étendre ce droit à toutes les élections nationales ?

Au mois de février 2008 j’ai reçu ma carte d’électeur en France, qui me permet de voter aux élections municipales à Grenoble, ville que j’habite depuis déjà quatre ans, ainsi qu’aux élections européennes, car depuis le 1er janvier 2007 mon pays est membre de l’Union européenne (UE). Cette année, j’ai donc voté pour la première fois en France.

Le vote des Européens et les municipales

Grâce à la libre circulation des personnes, il y avait de plus en plus d’Européens qui partaient dans un autre pays européen pour y résider. Le traité de Maastricht donne justement à ces Européens le pouvoir de voter aux élections municipales et européennes dans les pays dans lesquels ils vivent, travaillent payent des impôts ou encore font leurs études. On leur donne la possibilité de participer plus activement à la vie politique locale via les élections municipales, mais aussi à la vie politique européenne, car ils sont les citoyens de l’Europe.

En tant qu’étudiant étranger en France depuis quatre ans je ne me prive pas de la possibilité de voter aux élections municipales 2008 car j’estime avoir vécu assez dans ma commune pour comprendre les politiques locales et savoir si elles amènent la ville dans le bon sens. En plus, en tant que contribuable au budget municipal, il me semble normal que je décide de la façon dont mon argent est utilisé. Pour ce qui est des Européens, il est logique que tous les européens puissent y participer, indifféremment de leur pays de résidence, car l’avenir de l’Europe nous concerne tous.

Impossible de voter aux élections nationales

Quant aux élections nationales, elles sont pour l’instant inaccessibles pour les citoyens de l’UE, autres que les nationaux. Autrement dit, même si on vit dans un pays européen depuis très longtemps, qu’on y travaille, mais qu’on n’a toujours pas la nationalité de cet État, on ne peut pas voter pour le président, les partis, etc. C’est fort dommage, car nous, les Européens qui vivons dans un pays européen autre que notre pays natal, sommes aussi soumis aux lois de l’État d’accueil. On participe à la vie de cet État et nous devrions donc pouvoir aussi voter aux élections nationales.

La citoyenneté européenne ne fait pas disparaître la citoyenneté nationale. Finalement, nous sommes unis dans notre diversité. Mais une citoyenneté européenne complète, supranationale, pourrait amener l’Europe sur la voie fédérale. Permettre ou ne pas permettre aux Européens de voter aux élections nationales est aussi la réponse à la question : veut-on une Europe politique ?

Un tel droit donné aux « étrangers » aurait un impact très fort sur la perception des étrangers. Premièrement, les Européens résidant dans un État européen autre que le leur ne seraient à terme plus considérés comme étrangers. Cela serait une vraie révolution dans la conscience des citoyens de l’UE. Deuxièmement, avec un tel scénario, on pourrait parler d’une réelle citoyenneté européenne. Cela pourrait marcher : ça marche dans les États fédéraux comme aux États-Unis, en Allemagne, en Russie, pourquoi cela ne marcherait-il pas dans une Fédération Européenne ? Aujourd’hui tout citoyen américain a le droit de voter dans l’État où il réside, même si ce dernier n’est pas celui où il est né.

Il est vrai que le droit de vote aux élections nationales doit s’accompagner de certaines règles, établies au niveau de l’Europe. de mon point de vue, il faut avoir vécu dans un pays plus de 3 ans, y avoir sa résidence principale, un travail, etc. Il faut aussi veiller à ce que les gens n’aient pas le droit à un double vote, c’est-à-dire voter dans plusieurs pays de l’Union : celui où il est né et celui où il réside.

Au travers les élections nationales vers une fédération européenne

Rapprocher l’Europe de ses citoyens est la pierre d’angle de la construction d’une Europe forte, unie, autrement dit, une Europe fédérale. Il faut associer les citoyens à la vie politique européenne pour qu’ils puissent se sentir les maîtres de l’Europe, pour qu’ils sachent que l’Europe est faite pour eux et n’est pas seulement l’affaire des chefs d’États.

Le vote des Européens aux élections nationales constituent aussi le maillon nécessaire pour remplir la chaîne classique des élections dans une fédération : local – État fédéré – État fédéral. Aujourd’hui, il se trouve que c’est l’agrégation des États fédérés qui décide de l’avenir commun de l’UE à travers le Conseil européen. Très souvent, les États membres ne tiennent pas compte de l’intérêt général de l’Europe et essayent de promouvoir leurs propres intérêts nationaux, souvent même nationalistes.

Le fait que les Européens puissent voter à toutes les élections dans n’importe quel pays de l’Europe dans lequel ils habitent constituerait un volet important pour aller vers l’idée d’une fédération européenne, le seul moyen de rendre l’Union européenne forte, unie et capable d’agir pour assurer la prospérité à ses citoyens.

Illustration : carte électorale « délivrée à un citoyen d’un État membre de l’Union européenne autre que la France ». Réalisation photographie : Dumitru Drumea.

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Vos commentaires
  • Le 13 mars 2008 à 12:52, par dhalber DD En réponse à : Pour un droit de vote complet pour les citoyens européens

    Le problème est bien posé. La citoyenneté européenne est encore incomplète.

    Mais cette situation paradoxale recueille l’assentiment des états de l’union, soucieux de ne pas voir leur échapper un contrôle étatique - et national - de l’Union. C’est dans la logique intergouvernementale. L’Union est dans sa conception fondatrice une union d’états avant d’être une union de peuples... C’est d’ailleurs la raison profonde de l’absence de signification des référendums conçus dans un cadre strictement national... C’est aussi pourquoi l’Union est une apparence de démocratie.

    La citoyenneté de toute personne de l’Union Européenne est, de fait, à double niveau : le niveau local, le plus ancien, qui est celui de l’Etat de naissance du citoyen. Le niveau global, qui est celui de l’Union, en passe de devenir « sans frontières internes », ouverte sur un espace commun de circulation. « On » ( au nom de quel droit ?) concède quelques miettes à ce niveau global jugé( bien à tort) le moins important. Par exemples les élections dont ne dépend pas, en apparence du moins, le sort de l’Union...Mais en revanche, l’essentiel de la vie politique de l’Union continue de se jouer au niveau considéré par ses dirigeants comme le plus déterminant : le niveau national. Et la, pas question de la moindre concession aux forces nouvelles ! Surtout pas de « pollution » du bon vieux système intergouvernemental par la menace locale ou supranationale. Préserver à tout prix les vieilles cloisons mentales et politiques qu’on croit maitriser, tel est le consensus.

    Pas de « non nationaux » ( c’est-à-dire « indigènes » ou assimilés) à priori suspects d’être de « mauvais » nationaux. Le vieux réflexe sécuritaire et conservateur de la citoyenneté nationale va donc continuer à jouer le rôle principal en politique pendant encore un certain temps. Que les fédéralistes trop pressés se le disent !

    Mais c’est frustrant d’être un citoyen incomplet, amputé d’une partie essentielle de ses droits. Qui sera le Caracalla de l’ Europe ( constitution antonine de de 212 étendant la citoyenneté romaine à tous les habitants de l’empire) ?

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