Mouvement Européen

Quel modèle pour l’Europe sociale ?

, par Sophie Gérardin

Quel modèle pour l'Europe sociale ?

Le Mouvement européen a organisé une conférence le 10 décembre 2005 sur le thème : quel modèle pour l’Europe sociale ? Pour répondre à cette question, Pierre Moscovici, président du Mouvement européen, avait invité des personnalités fortement engagées en Europe : Stuart Bell, député britannique, Elisabeth Guigou, ancien ministre et députée, Alain Lamassoure, ancien ministre et député européen et Magnus Robach, du bureau du Premier ministre suédois, directeur général de la coordination européenne.

Y a-t-il, en Europe, un modèle social ou des modèles sociaux ? Le modèle social européen est-il en crise ? Et si oui, quels remèdes peut-on appliquer ? Autant de questions d’actualité posées aux invités.

Il ne peut y avoir de modèle social digne de ce nom, sans une économie forte pour le soutenir, sans une volonté politique pour le porter.

Élisabeth Guigou a ouvert le débat en insistant sur la crise de l’Europe, qui est, selon elle, très grave. S’appuyant sur l’héritage de Bismarck et de Beveridge, la députée a d’abord évoqué les composantes communes du modèle social européen, avec la création de la sécurité sociale et le rôle prédominant des Etats-nations. Mais depuis quelques années, l’Europe doit faire face à deux défis de taille : la mondialisation et le vieillissement de sa population. L’euro est une réponse face au défi de la mondialisation. Mais pour accompagner la libéralisation des mouvements de capitaux, l’Union européenne (UE) ne dispose d’aucune harmonisation, ni d’aucun gouvernement économique. Elle manque tout autant de volonté politique. La mise en place du fond social européen (depuis le traité de Rome) a permis de répondre à nos exigences en matière économique et sociale. Aujourd’hui, Elisabeth Guigou plaide pour davantage de solidarité et une augmentation de la part du PIB de l’Union pour les politiques sociales.

Pour Stuart Bell, il existe plusieurs modèles sociaux en Europe. Le traité de Rome incluait déjà la dimension économique et la dimension sociale. Mais aujourd’hui, il note un déséquilibre entre les deux. Lui aussi évoque les difficultés de l’UE à surmonter la concurrence étrangère et notamment celle des pays émergents, comme la Chine et l’Inde. Depuis 1997, l’Angleterre a développé un modèle social « à l’anglo-saxonne ». Elle a mis en place un programme pour la création d’emploi et a fortement investi dans le service public. La flexibilité du travail est le maître-mot de cette politique.

Le modèle social suédois a aussi été évoqué, grâce à la présence de Magnus Robach. Ce modèle se caractérise par un certain réformisme et une volonté de compromis entre les partenaires sociaux, dès les années 1930. La Suède a bien sûr souffert de la fermeture de ses chantiers navals et de ses industries textiles, dans les années 1970 et 1980. Mais, elle a su s’en relever en adaptant et en modernisant son marché du travail (développement de la mobilité des travailleurs, protection importante des individus, rôle moindre de l’Etat...). Sur les retraites, le pays a adopté un compromis entre le système par capitalisation et le système par répartition. Le modèle suédois repose sur l’ouverture des marchés à la concurrence. Très rapidement, la Suède a développé une politique en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes, puis en faveur de l’environnement. Voilà un domaine pour lequel l’Europe doit s’engager.

D’après Alain Lamassoure, quatre points que l’on retrouve dans la Charte des droits fondamentaux, unissent les Européens :
 l’opposition à la peine de mort,
 une forme de séparation entre le religieux et le politique,
 une certaine conception du rôle de l’Etat en matière sociale notamment,
 le sentiment que les Européens se sentent une responsabilité dans l’avenir de la planète. Mais, ces points communs ne fondent pas un modèle social européen. Il faut d’abord approfondir le débat en France sur ce sujet. Selon lui, les Européens ne sont pas encore prêts à transférer, au niveau européen, la politique de l’emploi et la protection des travailleurs. La France accepterait volontiers une harmonisation fiscale et sociale, à condition que ses partenaires adoptent sa législation en la matière, c’est-à-dire sans compromis, ni discussion !

L’ancien ministre évoque lui aussi le défi démographique de l’UE. Population vieillissante et politique de migrations, tels sont les thèmes qui devraient être débattus entre les pays membres.

Pour développer le budget de l’UE, Alain Lamassoure propose la création d’un impôt européen, ce qui ne fait pas l’unanimité, ni parmi les invités, ni parmi le public. Il suggère de prélever une taxe commune sur les recettes créées par la mondialisation.

Les quatre invités se sont néanmoins tous accordés sur un point : il ne peut y avoir de modèle social digne de ce nom, sans une économie forte pour le soutenir, sans une volonté politique pour le porter. A l’heure où l’Europe doit affronter deux défis importants - celui de la mondialisation et celui de la démographie - la solidarité entre les nations européennes doit être plus forte que jamais.

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