Certes les concessions accordées aux eurosceptiques, sur le drapeau, l’hymne, la dénomination des « lois », le titre de « ministre des affaires étrangères » ou l’intégration dans le traité de la charte des droits fondamentaux, pour formelles qu’elles puissent paraître, ne se révèlent pas glorieuses. Le report jusqu’en 2014, voire en 2017, de l’entrée en vigueur du vote à la double majorité pour satisfaire les exigences polonaises marque aussi une reculade.
Mais l’essentiel du contenu du TCE, au demeurant assez modeste, a été préservé : extension du champ de la majorité qualifiée, création du « haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité », allongement à deux ans et demi de la durée de la présidence du conseil, élection du président de la commission par le parlement européen, renforcement de la co-décision. L’important reste d’en finir avec un débat sur la ratification ratée du TCE qui empoisonne et paralyse depuis déjà deux ans la construction européenne. La page de ce traité doit être tournée pour repartir de l’avant.
Déjà réfléchir à l’après Traité
Cela ne signifie pas qu’il n’y ait aucune leçon à tirer de cette mésaventure. En vérité, l’échec du TCE découlait naturellement de la logique de fait d’une ratification unanime par tous les Etats membres, chacun selon son mode. Ce qui manquait déjà de crédibilité à 12, lorsque les Danois avaient une première fois en 1992 rejeté le Traité de Maastricht, n’avait aucune raison d’en retrouver à 25 treize ans plus tard. Bref, il s’avère nécessaire de concevoir un autre mode d’approbation des avancées européennes, moins national dans son esprit, plus cohérent dans sa méthode. Faire voter sur un texte tous les Européens le même jour serait sans doute un progrès, même si cela impose de réviser l’une ou l’autre constitution. Surtout, la quasi certitude qu’au moins l’un ou l’autre pays refuseront d’avancer doit conduire à une autre vision moins binaire de l’acte, qui échappe en fait à la loi du « tous ou rien ».
L’Union doit pouvoir avancer dès lors qu’une masse critique en son sein le souhaite, quitte à concevoir d’emblée plusieurs niveaux d’intégration. La règle, qui a finalement prévalu pour la monnaie unique, de limiter son extension à ceux qui le veulent et qui le peuvent, apparaît plus réaliste. Il convient juste d’en généraliser l’application à une série d’avancées proposées, formant un ensemble de compétences significatives, pour qu’elle ne s’applique de façon totalement anarchique domaine par domaine. Tel est le principe de la création d’une "avant-garde" permettant aux nations les plus volontaires d’approfondir la construction européenne.
Retrouver l’ambition européenne
L’écueil de l’illisibilité, faute de grande avancée significative en son sein, du TCE (2005) devra aussi être pris en compte à l’avenir. Ce mal avait pourtant déjà compromis les traités d’Amsterdam (1999) et de Nice (2000) qui, faute d’apport majeur, étaient totalement opaques pour les citoyens. Le traité de Maastricht (1992) avait une force, celle de la création d’une monnaie unique. Les suivants semblaient s’apparenter à de piètres replâtrages. Quel sens cela a-t’il de provoquer un gigantesque débat public sur tout le continent, si cette montagne effervescente doit accoucher d’une souris institutionnelle ?
Le prochain pas de l’intégration devra donc proposer une approche plus ambitieuse et plus compréhensible par nos concitoyens. Rassembler les diplomaties et les armées européennes sous une autorité fédérale démocratique va de soi au regard de l’impuissance croissante de nos vieilles nations à se faire entendre sur la scène planétaire. Confier à cette autorité, ne serait-ce que par le poids financier de ces nouvelles missions un réel pouvoir fiscal et budgétaire, au sens de la politique macro-économique, en juste complément de la politique monétaire européenne, s’impose tout autant.
Assurer une symbiose entre le noyau fédéral ainsi créé et une union confédérale plus large, intégrant aussi les autres membres qui pour l’instant ne souhaitent pas aller plus loin, sera à la portée d’une ingénierie constitutionnelle européenne, qui a déjà prouvé parfois même à l’excès sa puissante créativité. Laissons-là s’exprimer à nouveau.
1. Le 5 septembre 2007 à 17:41, par Shokut En réponse à : Relancer le débat européen sur de nouvelles bases
Quand je lis ça, je me demande à quoi a servi mon vote en 2005.
Le peuple a rejeté la constitution européenne. Sarkozy propose un version bis très peu différente de la première (l’essentiel du contenu du TCE, au demeurant assez modeste, a été préservé") et envisage de la faire passer en force (sans référendum) et vous, vous réfléchissez à comment faire pour intégrer malgré tout ce qui n’a pas été repris de la constitution Giscard (les symmboles, le ministre des affaires étrangères, etc.).
Pourquoi ne pas tirer les conclusions évidentes du vote de 2005, c’est à dire qu’il faut réorienter la construction européenne, ce qui implique de revenir sur les traités actuels, notamment Maëstricht ? Pourquoi s’obstiner à nous imposer ce que nous avons refuser ? Pourquoi nier la souverainté des peuples avec un référendum pan-européen ? ( autre mode d’approbation des avancées européennes, moins national dans son esprit )
2. Le 6 septembre 2007 à 21:30, par Valéry En réponse à : Relancer le débat européen sur de nouvelles bases
je me demande à quoi a servi mon vote en 2005
Le traité qui avait été soumis à l’époque a depuis été abandonné. Il n’entrera jamais en vigueur et de nombreuses avancées qui avaient été obtenu par les élus ayant participés à son élaboration lors de la Convention sur l’avenir de l’Europe ont été abandonnées. Nous avons en lieu et place un mini-traité qui comporte de nombreux reculs.
Sur la méthode retenue par Sarko, celle-ci avait été annoncée avant son élection. Cela ne l’a pas empêché de recueillir une large majorité des suffrages ce que je regrette pour ma part.
Pourquoi ne pas tirer les conclusions évidentes du vote de 2005, c’est à dire qu’il faut réorienter la construction européenne, ce qui implique de revenir sur les traités actuels, notamment Maastricht ?
Parce que la seule conclusion que l’on puisse tirer du vote est constater la réponse à la question posée qui ne portait pas sur les traités actuels mais sur un nouveau texte. Le traité sur l’Union européenne signé à Maastricht avait été aussi je vous le rappelle adopté par référendum. Le vote de 2005 empêche l’Europe de bénéficier des progrès que comportait le traité constitutionnel mais n’implique nullement qu’il faille renoncer aux avancées antérieures. Cette interprétation est celle des adversaires de toujours du projet européen mais ne reflète nullement la portée du vote. C’est en faisant campagne sur des sujets qui ne concernaient pas le texte et en interprétant le résultat de manière fantaisiste que les nationalistes procèdent.
Pourquoi s’obstiner à nous imposer ce que nous avons refuser ? Pourquoi nier la souverainté des peuples avec un référendum pan-européen ? ( autre mode d’approbation des avancées européennes, moins national dans son esprit )
La démocratie implique que l’on accepte les choix de la majorité : il se trouve qu’une très large majorité des pays Européens ont accepté le traité constitutionnel. Il est bien légitime que celui-ci soit le point de départ de la renégociation. Ce qui est regrettable c’est que les reculs majeurs qui sont en train de s’opérer ne respectent ni les réserves exprimées par une partie des citoyens qui souhaitaient que l’Europe aille plus loin, notamment dans le sens du social, ni ceux qui avaient estimés le traité constitutionnel satisfaisant.
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