Accord Turquie-UE : l’Europe vend ses valeurs à un prix dérisoire

, par Nathan Delbrassine

Accord Turquie-UE : l'Europe vend ses valeurs à un prix dérisoire
Le Conseil européen a négocié cet accord avec les autorités turcs derrière des portes closes, contre l’avis du Parlement européen. - European Council (CC/Flickr).

Depuis de nombreuses années maintenant, l’Europe se débat avec une crise migratoire sans précédent. Constatant que les matraques et les barbelés sont inefficaces pour endiguer l’afflux de réfugiés, l’Union européenne s’est tournée vers ses voisins. Toutefois, l’accord entre l’Union européenne et la Turquie peut-il être considéré comme la solution à ce problème ?

Le vendredi 18 mars 2016 est un jour sombre pour l’Union européenne. Ce jour marque un tournant dans la déconstruction européenne. Celle-ci s’est engagée à payer 6 milliards à la Turquie pour avoir le droit de lui refiler les migrants dont elle ne veut pas entendre parler. En effet, une fois les migrants arrivés sur le sol grec, ceux-ci se verront conduits vers la Turquie pour ensuite remettre le pied sur le sol européen. Si nous pouvons, aujourd’hui, aisément nous accoutumer à la schizophrénie et l’absurdité de certains mécanismes mis en place par le Conseil européen, nous sommes forcés de constater et dénoncer avec gravité la lâcheté et la mise en vente à prix cassé de la culture européenne. 6 milliards d’euros ! Voici pour les dirigeants européens la valeur monétaire des principes fondateurs de l’Union européenne, ces administrateurs de l’Union s’émouvant des longues luttes et atrocités qui ont fait émerger cette culture embarrassante. Ceux-là mêmes qui se démènent pour déroger au droit international en toute légalité et fuir leurs responsabilités.

Il est amusant de constater que la bonne exécution des prescriptions supranationales sont désormais entre les mains d’un pays mainte et mainte fois condamnée par la Cour de Strasbourg pour ses atteintes manifestent à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La dernière en date, et la mise sous tutelle du quotidien « Zaman ». Ainsi, toutes les garanties européennes reposent désormais sur les épaules d’un pays qui les méprisent. Voici donc le nouvel idéal européen. De plus, en niant ses responsabilités, l’Union européenne se suspend une épée de Damoclès au-dessus de la tête. En effet, elle refuse catégoriquement de gérer elle-même son flux migratoire, en la sous-traitant à des pays tiers, elle s’expose à de possibles pressions sur la scène internationale. Effectivement, si l’Europe venait à prendre une décision déplaisante pour les autorités turques, celle-ci pourrait menacer d’arrêter de gérer les flux migratoires de l’espace communautaire, laissant le continent démuni face à son échec.

Le 18 mars 2016 est désormais jour de deuil. Nous avons définitivement enterré l’Union européenne et ses valeurs ! En effet, comment encore parler de solidarité, de respect de la dignité et des droits de l’Homme quand ces principes ne prévalent que pour les hommes blancs occidentaux ? L’Union européenne n’était déjà plus que l’ombre d’elle-même, mais aujourd’hui les membres du Conseil européen ont montré leur réelle volonté politique. Ils ont démontré que leur seule volonté commune est de déconstruire l’Europe, ses garanties et ses idéaux. Comment nous regarder encore dans une glace ? Comment encore promouvoir ces valeurs vendues en pièces détachées au marché noir des idées embarrassantes ? Nous leur donnerions bien un carton rouge, mais ils ne souhaitent que l’exclusion, c’est pourquoi nous leur brandissons un carton bleu cerclé d’étoiles jaunes.

Nous avons honte ! Nous avons honte d’être européen et de voir notre plus grande richesse marchandée, car quoiqu’en disent ces « Européens » nous venons de vendre notre bien culturel et ses « droits inaliénables » à des négociants dont le fonds de commerce est la détresse et la guerre. Nous venons de nous vendre à prix dérisoire pour gagner quinze jours dans le processus d’autodestruction de l’espace communautaire. A tous ces marchands du temple, cette Europe-là n’est pas la mienne. Enfin, à ceux qui prendraient la fermeture des frontières intérieures et extérieures de l’Union comme solution européenne, je leur demanderai simplement si le mur de Berlin empêchait les citoyens du bloc communiste de passer à l’Ouest ou si le mur entre les Etats-Unis et le Mexique à endiguer le flux migratoire.

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