Au Parlement européen, le sujet de l’aide à l’Ukraine brise les règles

, par Quentin Fady

Au Parlement européen, le sujet de l'aide à l'Ukraine brise les règles
Crédits : © European Union 2024 - Source : EP

L’Ukraine, actuellement en difficulté, cherche un soutien auprès des occidentaux dont l’Union européenne. Mais la session plénière du 17 septembre a démontré que cette notion de soutien variait selon les eurodéputés.

L’Ukraine, et plus précisément la “Pérennité du soutien financier et militaire des États membres de l’Union à l’Ukraine”, était un des sujets de la plénière de rentrée du Parlement européen, à Strasbourg. L’Ukraine est actuellement dans une situation critique : elle subit les attaques de la Russie dans le Donetsk, malgré une incursion de son armée dans la région russe de Koursk. Une de ses demandes principales est la levée des restrictions d’armes occidentales pour toucher la Russie.

Aujourd’hui, l’Ukraine a le droit d’utiliser certaines armes occidentales pour toucher le territoire russe dans un périmètre restreint. Mais l’Ukraine veut aller plus loin et utiliser les missiles à longue portée livrés par les Occidentaux pour toucher la Russie plus en profondeur. Ce sujet a été l’occasion pour les eurodéputés de réaffirmer leur positions quant à cette guerre. Le sujet a fait l’objet d’une séance de débat le mardi 17 septembre, puis d’une session de vote le jeudi 19 septembre.

Des idées communes partagés par des acteurs inattendus

Si la gauche et la droite soint traditionnellement opposées sur la plupart des sujets, elles se rejoignent, sur certains points, quand survient le sujet de l’Ukraine.

GUE/NGL (gauche radicale) et le groupe d’extrême droite l’Europe des nations souveraines (ENS), des partis opposés sur le plan de l’échiquier politique, étaient tous les deux en faveur de mettre un arrêt à “l’escalade militaire”. Lors de la session de débat, Petar Volgin du groupe ENS affirmait : “L’occident utilise les armes alors qu’elle ne peut pas vaincre la Russie”. Özlem Demirel (GUE/NGL) allait dans le même sens : “avec de plus en plus d’armes, nous n’aurons pas de solution”. Si les raisons d’un tel positionnement diffère, la position reste bel et bien la même : réduire le soutien à l’Ukraine dans sa guerre contre la Russie.

En face d’autres partis, qui n’ont pourtant pas vraiment pour habitude d’être d’accord entre eux, étaient pour le soutien militaire. Le socialiste (S&D) Sven Mikse “invit[ait ainsi] tous et toutes à aider l’Ukraine à battre la Russie sur le champ de bataille”. Les Verts/ ALE avec Villy Søvndal déclaraient quant à eux : “nous devons faire en sorte que nos armes puissent lutter contre les attaques de la Russie”. Renew (centre libéral) par la voix de Nathalie Loiseau dénonçait les limites à l’usage des armes livrées à l’Ukraine : “Les restrictions que l’on impose à l’Ukraine pour se défendre n’ont de pas de sens, on l’oblige à se battre une main attachée dans le dos”. Enfin, le PPE (centre-droit) ne fut pas en reste, avec Michel Gahler qui déclarait qu’il fallait “lever toutes les restrictions à l’utilisation des armes sur le sol russe”.

Des partis divisés

Et au milieu de ces positions tranchées, des partis indécis et fragmentés. Ce fut le cas chez les Patriotes pour l’Europe (PfE, extrême-droite), où a émergé un argument pour les moins diplomatiques avec Tamás Deutsch, qui déclarait : “Cette stratégie pro-guerre devrait laisser sa place à une autre pensée. [...] Les relations diplomatiques devraient être en place, un cessez-le-feu devrait être en place, et les négociations devraient commencer”. De l’autre, un côté plus nuancé avec son collègue Pierre-Romain Thionnet qui pense que “force et négociation ne s’opposent pas”.

Le parti des Conservateurs et Réformistes européens (CRE, droite radicale) a également été touché par une fragmentation. Même si quasiment tous les eurodéputés de CRE tenaient une ligne relativement similaire, c’est à dire pro-ukrainienne, une division s’est illustrée au moment du “catch the eye”, une procédure permettant aux députés de parler pour eux mêmes, sans avoir l’aval de leur groupe parlementaire.

Deux interventions d’eurodéputés CRE se sont ainsi suivies. D’abord celle d’Aurelijus Veryga qui demandait : “Les Ukrainiens ont-ils la volonté de résister ? Je pense que la réponse à cette question est oui ! Les Ukrainiens se battent pour leur liberté. Ils se battent pour leur indépendance. L’aide apportée à l’Ukraine c’est notre devoir”. Suivi de l’intervention contradictoire de Fernand Kartheiser : “L’aide humanitaire et la diplomatie doivent remplacer les fournitures d’armes et le soutien financier.

Un semblant de consensus ?

En conclusion de cette session de débat, le commissaire au commerce, Valdis Dombrovskis, est venu déclarer que le Parlement avait trouvé un consensus, avant de se faire interrompre par un “not true” balancé par un eurodéputé. Le commissaire a alors également parlé de ceux qui voulaient une “droiture morale”, c’est-à-dire ceux pour une voie diplomatique.

Malheureusement pour les sceptiques, lors de la session de vote du jeudi 20 septembre, la résolution appelant "les États membres à lever immédiatement les restrictions sur l’utilisation des systèmes d’armes occidentaux fournis à l’Ukraine contre des cibles militaires légitimes sur le territoire russe" qui "entravent la capacité de l’Ukraine à exercer pleinement son droit de légitime défense en vertu du droit international public et laissent l’Ukraine vulnérable aux attaques contre sa population et ses infrastructures" a été adoptée avec 425 voix pour, 131 contre et 63 abstentions. Comme quoi M. Dombrovskis n’avait pas tort…

Cette résolution étant une invitation, il revient à présent aux Etats membres de prendre leur décision individuellement.

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