Bas Eickhout : "Les Verts sont pro-européens, pro-changement”

, par Jeanne Morel, Juuso Järviniemi, Traduit par Marine Delgrange

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Bas Eickhout : "Les Verts sont pro-européens, pro-changement”
Photo de Lucile Briolat - Jeunes Européens Sciences Po.

Invité à un évènement organisé par les Jeunes Européens - Sciences Po à Paris le 2 avril, le Spitzenkandidat du Parti européen des Verts Bas Eickhout a présenté les priorités de son parti pour les prochaines élections, sans hésiter à lancer des pics aux autres partis. En plus de l’environnement, des taxes et de l’Etat de droit, Eickhout a évoqué la vision des Verts du cadre institutionnel européen et de ce qui adviendra après les élections de mai prochain.

Nous sommes aussi critiques du statu-quo

Dans son introduction, Bas Eickhout a remis en question l’approche "c’est nous ou les populistes" encadrant les élections. "Vous donnez ainsi à ceux critiquant l’Europe une seule option : les populistes", a-t-il dit. Les verts, quant à eux, se positionnent comme critiques envers l’Europe d’aujourd’hui, tout en restant pro-européens.

Les trois priorités de la campagne de 2019 des Verts ne sont pas surprenantes : le climat, les taxes et l’Etat de droit sont les principaux thèmes du parti pour les élections. Sur le climat, la politique actuelle des Verts ne considère pas la croissance économique comme incompatible avec l’environnementalisme. En outre, pour le candidat, le pilier de la campagne des Verts qu’est l’action climatique est à la fois un "agenda économique et géopolitique". En plus de l’économie verte, Bas Eickhout défend l’idée que l’énergie renouvelable présente des intérêts stratégiques. "En ne supportant pas l’action climatique, les populistes rendent l’Europe dépendante du Moyen-Orient", a-t-il dit en ajoutant que l’Europe importe chaque jour un milliard d’euros de pétrole.

En ce qui concerne les taxes, Bas Eickhout a attiré l’attention sur le fait que bien que les marchés soient déjà européens, les entreprises peuvent choisir entre plusieurs Etats ayant différents taux d’imposition des sociétés. Sur la question de l’”Etat de droit”, le candidat des Verts a attaqué l’actuelle Commission européenne. Le PPE et les sociaux démocrates y exercent un rôle proéminent dans la "politisation de l’Etat de droit" en prenant les mesures qui s’imposent contre la Pologne - dont le parti au pouvoir appartient au groupe conservateur CRE - tout en montrant plus de réserve vis-à-vis de la Hongrie - dont le parti au pouvoir appartient au PPE - ou de la Roumanie - dont le parti au pouvoir se trouve dans le groupe des sociaux démocrates.

La critique des partis "traditionnels"

De fait, Bas Eickhout n’a pas hésité à critiquer les partis traditionnels pro-européens : la droite-centriste du PPE, les sociaux démocrates et l’ALDE, tous y sont passés. Manfred Weber en était un des principaux destinataires, Bas Eickhout étant plusieurs fois revenu sur la nécessité pour la tête de liste du PPE de changer son approche afin de gagner le soutien des Verts.

Du côté des sociaux démocrates, Bas Eickhout, dont le parti national aux Pays-Bas est GroenLinks, s’est attaqué au parti travailliste, son concurrent. Selon lui, le parti travailliste néerlandais a en effet un "problème de crédibilité". Alors que Jeroen Dijsselbloem, l’un des membres du parti, fut un partisan proéminent des politiques d’austérité dans l’Eurogroupe au cours de la crise économique, Frans Timmermans, qui représente le même parti, parle aujourd’hui de la solidarité européenne dans sa campagne pour les élections européennes.

Lorsqu’interrogé à propos du plan des libéraux de l’ALDE de présenter des candidats pour la présidence de la Commission européenne qui ne se seraient pas présentés comme Spitzenkandidat, Bas Eickhout a asséné à la faction libérale : "Ce que les libéraux sont en train de faire est très flou. Pour être honnête, c’est juste pour plaire à (au président français Emmanuel) Macron. Guy Verhofstadt était en tête de liste il y a cinq ans et il était l’un des plus audibles parmi les défenseurs du Spitzenkandidaten. Maintenant, il veut attirer Macron dans le groupe libéral et c’est pour cela qu’il a soudain dit "Enfin, je ne crois pas vraiment à ce système" parce qu’il savait que Macron en était critique. Je pense qu’en cela les libéraux sont très hypocrites, et nous n’entrerons pas dans leur jeu".

Le Parlement choisit le Président de la Commission

Pour les raisons évoquées, Bas Eickhout a affirmé que les Verts excluaient de voter pour un candidat à la Présidence de la Commission qui ne se serait pas présenté comme Spitzenkandidat. Alors que les Verts sont fortement engagés dans le système du “lead candidate”, ils précisent à présent leur position en affirmant qu’un candidat doit "rédiger un programme sur la base duquel il est possible de dire si on le soutient ou non, donc il aura vraiment besoin d’obtenir un majorité derrière lui".

Interrogé sur l’unique chose qu’il changerait dans les traités européens s’il le pouvait, Bas Eickhout a répondu en deux points. Le premier : mettre fin à l’unanimité qui, d’après lui, fait obstacle à l’adoption de réformes dans des domaines tels que l’énergie ou les impôts. Le second : la Commission ne devrait pas être constituée d’un représentant de chaque pays. "La Commission européenne est un corps politique, et nous devrions être clair sur ce point. Elle devrait aussi être contrôlée politiquement, ce qui implique deux changements importants. L’un serait d’avoir moins de Commissaires, l’autre que le Parlement européen puisse révoquer un Commissaire individuellement".

Le système des partis européens est nécessaire pour que le système fonctionne. Au cours de son entretien, Bas Eickhout a dit que les partis nationaux de la famille politique des Verts utilisaient dans leur campagne les deux têtes de liste de leur groupe (Bas Eickhout et Ska Keller). "Je pense que nous sommes maintenant invités dans chaque pays européen. Je suis allé en Finlande, je suis allé en Suède, je suis allé au Danemark, et c’était toujours suite à l’invitation du parti des Verts nationaux. (...) Ils savent que c’est dans leur intérêt d’inviter aussi des candidats européens pour montrer qu’ils font partis d’un mouvement européen plus important”.

Un scientifique devenu politicien

A peine Bas Eickhout a-t-il commencé son intervention qu’il a décidé de ne pas utiliser son micro et a divisé le temps entre vingt minutes pour son introduction et le reste pour les questions et les réponses. Amical et convaincant, Bas Eickhout a même plaisanté et s’est excusé d’avoir dépassé le temps alloué. Le Spitzenkandidat des Verts ne vient pas d’un environnement politique mais a fait des études de chimiste et est devenu modélisateur du changement climatique. C’est en 2005, au cours des débats qui ont eu lieu dans sa ville à propos de la Constitution européenne, qu’il a commencé à s’impliquer en politique, a débattu et est finalement devenu membre de la liste européenne des Verts aux Pays-Bas. Malgré dix ans passés en tant que député européen, Bas Eickhout n’est pas tombé dans le piège des réponses vagues mais a fait attention à donner des exemples concrets afin de répondre aux étudiants durant l’événement, et même dans le café après son intervention.

Interrogé à ce propos, il a convenu que les scientifiques peuvent être d’une grande aide pour les politiciens élus sur des sujets très spécifiques et que leur aide devraient être davantage mobilisée. Il a ensuite reconnu que sa connaissance des enjeux environnementaux a fortement aidé à sa nomination.

A propos de la faible participation des jeunes aux élections, Bas Eickhout a reconnu à quel point ce problème et les raisons qui l’expliquent constituent un défi à relever. Il est convaincu que le Parlement européen, avec sa moyenne d’âge au-dessus des 50 ans, a besoin d’être rajeuni, et que les députés européens devraient montrer que les jeunes peuvent être actifs en politique.

Bas Eickhout n’est finalement pas un candidat typique pour un rôle si important, et il semble dévoué à sa cause. Il admet que les Verts ne gagneront pas ces élections, mais rappelle que le parti exerce toujours une influence conséquente sur les sujets environnementaux et est une part nécessaire de la coalition formée avec d’autres grands groupes. Proche des gens, Bas Eickhout semble plus humain que beaucoup de politiciens, dans un monde dans lequel les leaders élitistes sont de moins en moins appréciés, et dans lequel le climat est devenu l’une des priorités numéro un.

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