Chute de la dynastie Al-Assad en Syrie : l’UE réagit au quart de tour

, par Alice Heurtin

Chute de la dynastie Al-Assad en Syrie : l'UE réagit au quart de tour
Idleb, Syrie, Mar 15, 2023 par Ahmed akacha / Pexels Idleb, Syrie, Mar 15, 2023 par Ahmed akacha / Pexels

Alors que les rebelles du groupe syrien HTS, anciennement affilié à Al-Qaïda et considéré comme terroriste par les Occidentaux, ont pris la tête du pays, le 8 décembre au matin, certains pays de l’Union Européenne ont directement suspendu l’examen des demandes d’asile de réfugiés syriens en attendant une réévaluation de la situation sur place.

HTS prend le pouvoir en Syrie

Le 8 décembre 2024, la capitale de la Syrie, Damas, tombe aux mains du groupe rebelle HTS (Hayat Tahrir al Sham). Sa chute est le point d’orgue d’une offensive éclair des rebelles syriens, qui a commencé par la chute de la ville d’Alep, deuxième ville du pays, fin novembre. Cela met fin à 54 ans de dictature par la famille Al-Assad, d’abord par le père, Hafez al-Assad, puis par le fils, Bachar Al-Assad qui a trouvé refuge en Russie. Cette libération fut à l’origine de scènes de liesse, en Syrie et partout dans le monde. Une victoire synonyme de liberté retrouvée pour un peuple qui pendant 24 ans fut aux mains du “boucher de Damas” qui réprima de manière sanglante l’ensemble de la population civile à coups de bombardements, de tortures et de scènes de terreur.

L’UE suspend les demandes d’asile ?

Quel lien avec l’Europe ? Depuis les printemps arabes en 2011 puis avec la crise migratoire de 2015, l’Union Européenne a accueilli près de centaines de milliers de réfugiés syriens. Certains ont obtenu leur demande d’asile quand d’autres sont encore en attente. Par exemple, l’Allemagne compte aujourd’hui la plus grande diaspora syrienne de l’Union Européenne avec 974 136 personnes de nationalité syrienne qui y résident selon les chiffres du ministère de l’intérieur. Aujourd’hui, avec la chute du régime de Bachar Al-Assad, les demandes d’asile de syriens sont menacées au sein de l’UE. En effet, à peine le régime syrien tombé, le débat concernant les réfugiés a resurgit. Certains pays à l’image de la Suède, du Danemark ou de la Belgique ont décidé de suspendre l’examen des demandes d’asile des Syriens. L’Autriche va même plus loin en annonçant réfléchir à : “un programme de rapatriement et d’expulsion vers la Syrie”

Une réaction précipitée ? L’UE et la France sous pression

Néanmoins, cet empressement et la réactivité de l’Union Européenne pose question alors que la situation en Syrie et plus généralement au Proche-Orient reste instable, malgré les déclarations rassurantes d’HTS concernant les droits des minorités et les libertés fondamentales. Le groupe était anciennement considéré comme une branche d’Al-Qaïda et reste considéré comme un groupe terroriste islamiste, c’est pourquoi, malgré ces déclarations, les occidentaux ne sont pas convaincus. C’est dans ce contexte que le 10 décembre, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe prévient : “Le principe de non-refoulement interdit de renvoyer des personnes vers un pays où elles seraient exposées à un risque réel de subir des préjudices. Sur cette base, l’évolution rapide de la situation sur le terrain en Syrie exige des décisions prudentes et fondées sur des preuves.”

Quelle est alors la position de la France ? Alors que nous n’avons pas encore un nouveau gouvernement, le ministre démissionnaire de l’intérieur, Bruno Retailleau a déclaré travailler également sur une suspension des demandes d’asile en France. L’Ofpra, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui est une agence indépendante de l’Etat, traite actuellement 700 demandes d’asiles syriennes et a affirmé en avoir reçu 7 000 depuis début 2023 : bien moins que notre voisin d’outre-rhin. Néanmoins, que ce soit au niveau français ou européen, certaines ONG, à l’image d’Amnesty International, s’inquiètent. Par le biais d’un communiqué de presse, Amnesty alerte face au fait de voir les Syriens sacrifiés sur l’autel d’intérêts politiques, à l’image d’une politique contre les réfugiés au sein de l’Union Européenne.

Les événements de ces derniers jours en Syrie ne doivent en aucun cas faire penser que la paix et la stabilité sont imminentes en Syrie et au Proche-Orient. Les tensions meurtrières entre Israël, le Hamas et le Hezbollah enflamment encore la région. Dans ce contexte, l’Union Européenne doit faire la part des choses en fonction de l’évolution de la situation. La chute du régime de Bachar Al-Assad ouvre un nouveau chapitre plein d’incertitudes, où les défis humanitaires, sanitaires et politiques nécessiteront une réponse coordonnée de l’ensemble de la communauté internationale.

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