Un budget 2025 dans l’impasse
Avec un gouvernement démissionnaire, l’adoption du budget 2025 avant la date limite du 31 décembre 2024 devient improbable. Si le budget 2024 devait être reconduit, Maxime Darmet, économiste chez Allianz, avertit qu’une telle mesure aggraverait le déficit public, en hausse de 2 milliards d’euros. Les dépenses sociales, indexées sur l’inflation, continueraient d’augmenter, tandis que l’État serait contraint d’abandonner les hausses fiscales envisagées, comme la surtaxe sur les très hauts revenus et les grandes entreprises. Selon la banque Natixis, le déficit pourrait alors atteindre 5,3 % du PIB, un niveau préoccupant alors que la France est déjà sous surveillance de Bruxelles pour déficit excessif.
Des conséquences directes pour les ménages et collectivités
La motion de censure, bien qu’elle marque un tournant politique, n’épargne personne :
- Les ménages : 400 000 foyers supplémentaires paieront l’impôt sur le revenu en 2025, et environ 18 millions verront leur fiscalité augmenter. Selon Pierre Madec (OFCE), l’absence de dégel du barème fiscal aggrave la situation : la hausse des revenus, supérieure à l’inflation, entraîne mécaniquement une augmentation de l’impôt.
- Les retraités : Les pensions seront revalorisées au rythme de l’inflation dès le 1er janvier, une mesure que le gouvernement Barnier voulait limiter aux plus petites pensions.
- Les collectivités locales : Privées de la dotation d’État, les collectivités pourraient compenser ce manque à gagner en augmentant les taxes locales, notamment la taxe foncière.
Pour Charles-Henri Colombier (Rexecode), ce gel des dépenses publiques nuira à la croissance économique. La France, dont l’investissement public est un pilier, risque d’accuser le coup, d’autant plus que cette situation pourrait décourager les investisseurs étrangers.
La défiance des marchés financiers
La chute du gouvernement a déjà eu un impact immédiat sur les taux d’emprunt français. En quelques heures, le taux de l’emprunt public a grimpé de 2,86 % à 2,92 %, un signe de nervosité des marchés. Comme le rappelle Patrick Martin, président du Medef, cette instabilité pourrait coûter cher à la France en termes de crédibilité auprès des créanciers et des partenaires européens.
La comparaison avec la Grèce, en faillite il y a douze ans, refait surface, la France empruntant désormais à des taux similaires. Toutefois, la Banque centrale européenne (BCE) veille au grain : grâce à sa politique de baisse des taux, engagée en juin pour contrer l’inflation en zone euro, la pression reste maîtrisée.
Un défi pour l’Union européenne
Si la situation actuelle ne menace pas d’entraîner un “shutdown” à l’américaine, elle fragilise la position économique de la France au sein de l’UE. Bruxelles reste vigilante quant à la trajectoire budgétaire du pays, et l’Union pourrait intervenir si le déficit public continue de déraper. Une absence prolongée de budget aurait des répercussions sur l’économie française, mais aussi sur la stabilité de la zone euro, dans laquelle Paris joue un rôle clé.
L’issue de cette crise demeure incertaine, mais une chose est sûre : l’Union européenne ne laissera pas l’un de ses membres les plus influents sombrer. L’adoption rapide d’une solution politique est désormais cruciale pour éviter une contagion économique et rassurer les investisseurs.
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