A la représentation du Parlement européen en France à ce moment-là, avec d’autres partenaires associatifs, nous avons deux réactions : « Mais, il est fou ! il veut mettre l’extrême droite au pouvoir ! » et « on est en train de se faire voler le résultat des européennes ». A l’issue d’une campagne électorale européenne qui a assez peu parlé de l’Europe et de son avenir, peu ouvert les regards des français sur l’Union en restant dans une approche franco-centrée, voilà l’opinion de nouveau polarisée sur la France. De fait, les électeurs et les électrices n’ont pas eu de présentation des député.es européen.nes élu.e.s lors de la soirée électorale. Ces représentant.es resteront inconnu.es, des journalistes et du public.
Il s’en est suivi une campagne législative folle : alliance d’Eric Ciotti, le président du parti de droite Les Républicains, avec le Rassemblement national, tentative d’alliance entre Reconquête ! et le RN, alliance des partis de gauche, du nouveau parti anticapitaliste au parti socialiste, scission au sein de la majorité présidentielle. Ce qui est flagrant, c’est que la France n’a pas cultivé de mémoire ni de culture antifasciste ! Nombreuses ont été les voix qui ont fait une équivalence entre l’extrême-droite et le parti de la gauche radicale, La France Insoumise, souvent en l’élargissant abusivement à l’ensemble de l’alliance de gauche appelée le Nouveau Front Populaire. Jusqu’au premier tour, la majorité présidentielle s’est beaucoup plus positionnée contre la gauche que contre l’extrême droite, faisant redouter une possible victoire de l’extrême-droite et son arrivée au gouvernement.
A l’issue du premier tour, caractérisé par un grand nombre de triangulaires (les candidats peuvent se maintenir au 2nd tour s’ils ont récolté plus de 12,5% des voix des inscrits), des désistements nombreux ont finalement eu lieu pour faire barrage à l’extrême-droite. L’attitude des partis du Nouveau Front Populaire et de Ensemble, la coalition de la majorité présidentielle, est à saluer et un réflexe républicain s’est tout de même exprimé.
Dimanche 7 juillet, 19h30, les sondages sortis des urnes commencent à circuler. Soulagement qui se confirme tout au long de la soirée : le Nouveau Front Populaire (182 député.es) est en tête suivi de Ensemble (168). Le Rassemblement national (143) n’est que troisième. La formation d’un gouvernement s’annonce maintenant très compliquée, avec une majorité possiblement introuvable.
Une Europe fédérale pour faire face à la montée du national-populisme
Dans une Europe intergouvernementale, l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement d’extrême droite aurait été tragique non seulement en France, mais aussi pour l’ensemble du processus d’intégration et de l’Union européenne. Alors qu’une proposition sérieuse de réforme des traités est sur la table et que le Président Macron a été et demeure l’un des présidents le plus pro-Européen que la France ait eu sous la Vème République, l’Union européenne ne pouvait pas se permettre de perdre l’implication d’un Etat-membre et l’apparition d’une minorité de blocage eurosceptique dans les institutions européennes, pour améliorer son fonctionnement et ce d’autant plus dans une perspective d’élargissement. Le contexte de la guerre en Ukraine a également été complètement évincé en France, dans une opinion publique qui perçoit mal l’enjeu existentiel de ce conflit pour elle-même et pour l’Europe. Sans compter la question des nominations aux top jobs, que Meloni et Orban voulaient repousser en attendant le résultat des législatives françaises.
Dans une Europe fédérale, l’impact de l’arrivée au pouvoir d’un nouveau gouvernement d’extrême-droite, que ce soit en France, ou ailleurs, n’aurait pas tant d’importance pour le maintien du fonctionnement institutionnel de l’ensemble de l’édifice. Face à la montée du national-populisme en Europe, organisé et coordonné, nous avons besoin de la Fédération européenne pour consolider le projet de paix que nous avons construit, et nous devons la bâtir avant que l’internationale des nationalistes ne détruise les projets européens.
La nécessaire réforme institutionnelle française
Ce que cette aventure politique montre est également l’essoufflement des institutions de la Vème République ; une Vème République déjà condamnée comme nationaliste et autoritaire par Spinelli et le Congrès du Peuple européen dès 1958. Comment est-il possible qu’une personne, prenne une décision d’une telle ampleur, nationale, européenne, seule ? Dans quelle autre démocratie mature est-ce possible ? L’UEF France souhaite travailler avec les autres acteurs du pays pour une rénovation des institutions, allant vers une plus forte autonomie des collectivités locales, une reconnaissance du rôle des corps intermédiaires et un renforcement de la démocratie et de la participation citoyenne. Nous avons les exemples de l’Espagne et du Royaume-Uni ou de l’Italie, nous avons l’exemple du fédéralisme allemand ou suisse.
Dans une situation où la France risque d’être ingouvernable, le Président de la République a 3 ans avant les prochaines élections présidentielles pour organiser un travail constitutionnel, impliquant largement la société civile et les citoyens, menant à une assemblée constituante pour construire enfin une démocratie contemporaine en voie vers le fédéralisme. Cette nouvelle constitution doit être consciente de l’implication de l’Etat dans un tissu de niveaux de décisions, locales, européennes, mondiales, politiques, économiques, écologiques… et sortir de la logique monarchique d’une République où le Président peut se considérer et agir comme un monarque absolu.
Enfin, la prégnance de l’extrême-droite, la libération de la parole raciste, nous oblige à envisager le militantisme autrement, sûrement en dehors et en complément de l’UEF, pour inventer de nouvelles formes de rencontre avec ces citoyens, et pouvoir en France, mais aussi dans le reste de l’Europe, retisser du lien social et civique. Nous ne balaierons pas l’extrême-droite et ses idées sans proposer des alternatives politiques tenant compte de ces plus de 10 millions de citoyens français qui votent pour l’extrême-droite.
1. Le 24 juillet à 11:00, par Illan En réponse à : Dans une Europe fédérale, l’impact de l’arrivée d’un gouvernement d’extrême-droite dans un État membre serait moins fort
Bonjour,
Il y a de gros soucis de lecture dans cet article. Sans vouloir trop développer, je vais répondre à un point central mais qui est absent de votre article : le peuple.
Les élections en France sont franco-centrées car les problématiques que vivent les françaises sont prégnantes. La gauche s’entête à ouvrir un volet trop sociétale (LGBT, minorité) alors que la tendance semble être au niveau économique et social (retraite, immigration, sécurité). Également non précisé, l’extrême droite avec ses 11 millions de voix soit 33% n’a reçu que 140 sièges sur 577.
De plus en parlant d’une partie constitutionnelle, le référendum constitutionnel de 2005 sur l’Europe a été refusé par les français et tous les sondages continuent de montrer que les français refusent la federalisation et souhaitent un statu quo.
Je respecte le fédéralisme européen pour l’idéal auquel ça pourrait nous atteindre et votre travai
Suivre les commentaires : |