Un accord sur le Brexit est conclu. Depuis quelques mois, les dirigeants européens s’agitent dans tous les sens pour garder le Royaume-Uni dans l’Union européenne, mais la question qui demeure est le pourquoi de toutes ces discussions.
David Cameron en vainqueur
Ce vendredi 19 février, David Cameron a gagné. En effet, l’Union européenne a cédé une grande partie des exigences du Royaume-Uni, consacrant définitivement le « statut spécial » de la Grande-Bretagne. Même la limitation de l’accès aux allocations familiales pour les ressortissants européens vivant au Royaume-Uni a été concédée. Dès lors, on peut se demander si le terme de négociation est approprié. En outre, le Premier ministre britannique a déclaré que « le Royaume-Uni ne fera jamais partie d’un super Etat de l’Union européenne, le pays n’adoptera jamais l’euro, nous ne participerons pas aux parties de l’Union qui ne fonctionnent pas [Schengen, l’euro] » et il ajoute : « Il ne sera plus jamais question d’avoir quelque chose sans contrepartie. »
Autre boutade, David Cameron a fanfaronné devant les télés britanniques en prononçant ces mots : « Je n’aime pas Bruxelles. J’aime la Grande-Bretagne. » Des propos singés par les autres dirigeants européens et les figures des institutions européennes lors de leur communication à la presse.
Seules concessions obtenues, la préservation du marché unique et la possibilité pour la zone euro de poursuivre son intégration sans blocage de la part de Londres, entérinant l’Europe à plusieurs vitesses.
« L’Europe à la carte »
Décidément, David Cameron n’a rien compris à l’Europe. L’Union européenne n’est pas une grande surface où l’on peut prendre ce que l’on veut en fonction de son intérêt du moment, mais un espace de développement du bien-être et de l’État de droit. Néanmoins, qui pourrait reprocher au Premier ministre britannique son attitude ? Comment David Cameron pourrait-il comprendre que l’Union européenne n’est pas un club de vacances « all inclusive » lorsqu’on lui déroule le tapis rouge à chacune de ses demandes ?
Si le comportement de ce gouvernement nationaliste ne surprend guère, celle de l’Union européenne et du Conseil européen, en revanche, pose question. Comment peut-on accepter qu’un Etat membre nie à ce point les valeurs fondamentales de l’Union européenne ? Plus encore que cette attitude de béni-oui-oui, pourquoi l’Europe a-t-elle discuté ? Bien que la question migratoire ait été soulevée, les chefs d’État et de gouvernement préfèrent débattre de questions nationales au lieu de dégager les mêmes compromis titanesques pour résoudre le délitement de l’espace Schengen, la crise des réfugiés et le mépris de l’État de droit par certains des Etats membres. En effet, le Premier ministre britannique est parvenu à transformer un problème national en question européenne. Nous avons bel et bien besoin de l’agitation et de l’action des chefs d’État européens, puisqu’ils adorent rappeler qu’eux seuls peuvent décider des grandes orientations politiques de l’Union, mais sur la scène européenne.
Du temps perdu
David Cameron est arrivé à mobiliser toute l’attention européenne. D’ordinaire, cette question aurait été réglée en deux coups de cuillère à pot : « le Royaume-Uni a assez martelé sa souveraineté pour être capable de prendre sa décision seule, l’Union européenne n’a donc pas à lui tenir la main ». Voilà la réponse qu’il fallait donner. De quoi l’Europe discute-t-elle ? Nous aurions dû laisser le Royaume-Uni se débattre avec une question britannique. La Grande-Bretagne n’a eu de cesse, tout au long de la construction européenne, de revendiquer sa souveraineté nationale et bien aujourd’hui elle s’exprime. Laissons ce pays face aux responsabilités qu’il revendique, mais qu’il ne veut jamais prendre et consacrons toutes les forces et dynamiques européennes à la résolution des problèmes que nous rencontrons actuellement. L’Europe ne doit plus se laisser distraire de ces questions existentielles par des questions nationales et secondaires. Le Brexit étant avant tout une question britannique, le Conseil européen aurait dû appliquer au Royaume-Uni la formule devenue culte grâce à un jeu de télévision français : « c’est à prendre ou à laisser ».
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