Les raisons du projet d’assouplissement du cadre existant
La Commission européenne souhaite assouplir la réglementation du marché de la titrisation en raison du rapport Draghi insistant sur l’absence d’un grand marché de la titrisation en Europe du fait des contraintes réglementaires mais aussi du manque de confiance des investisseurs. En 2023, le marché de la titrisation en Europe s’élevait à 213 milliards d’euros contre 1 300 milliards d’euros aux États-Unis.
L’objectif de la Commission est de développer le marché de la titrisation pour augmenter les capacités de financement des prêteurs mais aussi pour baisser le coût de financement.
La titrisation permet aux banques de faire sortir du bilan les actifs titrisés. Dû à certaines réglementations bancaires, les risques liés aux prêts doivent être compensés par les fonds propres des banques. Ainsi, sortir ces prêts du bilan des banques permet à la fois de débloquer des fonds propres pour investir dans d’autres actifs mais aussi pour obtenir des liquidités liées à la vente de ces titres.
En ce qui concerne la baisse du coût de financement, la titrisation permet à des institutions financières de créer des titres financiers mieux notés, ce qui permet d’emprunter à moindre coût. Par exemple, une institution notée “AA” par les agences de notation, titrisant un actif noté “AAA” lui permettra de payer un taux d’intérêt inférieur uniquement si cette institution doit emprunter auprès d’un autre organisme. Ces titres peuvent être utilisés comme garanties de prêt par les banques pour emprunter sur les marchés financiers et s’acquitter d’un taux d’intérêt plus faible. Ainsi,grâce à la volonté de la Commission de faciliter le financement de l’économie, de soutenir l’innovation et de développer le marché des capitaux, la titrisation est un instrument essentiel.
Les nouvelles réformes proposées par la Commission
L’assouplissement des réglementations du marché de la titrisation suit donc plusieurs étapes. Tout d’abord, certaines critiques du marché européen de la titrisation visaient les nombreuses formalités administratives nécessaires avant de s’engager dans ce type d’activités. Ainsi, dans le projet de la Commission, l’objectif est de réduire les exigences en termes de diligence raisonnable (“due diligence”) et de transparence. Le but est de réduire d’environ 35% les informations obligatoires à fournir.
De plus, la Commission souhaite faciliter l’inclusion des actifs titrisés dans le coussin de liquidités des banques. En d’autres termes, l’objectif est de simplifier la réglementation afin qu’une institution financière puisse inclure plus facilement les actifs titrisés qu’elle possède dans ses actifs dit “liquides”, c’est-à -dire, ceux que l’institution peut échanger rapidement. Enfin, la nouvelle règlementation souhaite diminuer les fonds propres nécessaires pour engager des activités de titrisation. Cela implique que les fonds propres destinés à servir de collatéral pour ces activités seront moins élevés qu’auparavant.
Un projet qui fait débat
Certains acteurs du secteur critiquent cependant cette volonté d’assouplir la réglementation bancaire en soulignant que la solidité du cadre réglementaire a permis en Europe de résister à des crises telles que celles du covid et de l’énergie. Depuis les années 1980, les successions de crises bancaires ont poussé le secteur financier à mettre en place le cadre de Bâle, pour mettre en place des recommandations de réglementations financières au niveau international.
Le report par l’UE de la mise en place des dernières recommandations de Bâle III (décidé en réaction à la crise de 2008) en raison de la volonté de l’UE d’attendre leur mise en place par les États-Unis a également été très critiqué et fait courir le risque d’une course à la dérégulation financière.
La proposition de la Commission doit encore être examinée par le Parlement et le Conseil de l’UE. La volonté de réduire le poids règlementaire, motivée par la publication du rapport Draghi, se manifeste par la volonté européenne de stimuler l’investissement économique et de l’innovation. De nombreuses critiques persistent, en particulier contre le marché de la titrisation qui fait écho à la crise de 2008.
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