Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

, par Charles Nonne

Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l'ONU ?
Thomas Mayr-Harting, chef de la délégation de l’Union européenne, présente ses lettres d’accréditation au Secrétaire général, Ban Ki-moon Crédit photo : UN Photo/Rick Bajornas

L’accord électoral récemment conclu entre le Parti socialiste et Europe Écologie Les Verts (EELV) a été abondamment commenté en ce qui concerne ses positions sur l’énergie nucléaire. Une autre proposition, beaucoup moins remarquée, fait aujourd’hui l’objet d’attaques répétées de la part des opposants politiques à la future coalition : l’attribution d’un siège européen au Conseil de Sécurité de l’ONU. Si cette mesure semble aujourd’hui peu réaliste, elle traduit néanmoins la nécessité de réinventer la place de l’Europe sur la scène internationale.

Le Conseil de sécurité est l’un des organes principaux de l’Organisation des Nations unies. Il comporte quinze États membres, dont dix sont élus par l’Assemblée générale des Nations unies. Les cinq autres membres – Chine, États-Unis, Russie, France, Royaume-Uni – sont membres de droit de ce Conseil. Ces cinq mêmes membres disposent chacun d’un droit de veto leur permettant de bloquer un processus de décision dès lors qu’une mesure prise au Conseil de sécurité porte préjudice à leurs intérêts.

Le Conseil de sécurité est probablement l’organe le plus puissant du système des Nations unies ; il est, en vertu de la Charte des Nations unies, compétent pour maintenir la paix et la sécurité internationales. Il dispose à cet effet de moyens particulièrement efficaces. Il peut notamment autoriser l’intervention de forces armées lorsque la paix internationale ou la sécurité de populations civiles sont menacées, le dernier exemple en date étant celui de l’intervention de l’OTAN en Libye.

Les membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU sont aujourd’hui les mêmes qu’il y a cinquante ans, lorsque les Alliés ont mis fin à la Société des Nations en 1946 pour construire un nouvel ordre international, plus efficace et plus légitime. La France, incarnée par des figures de la Résistance et du Comité français de Libération nationale, pouvait encore espérer retrouver un statut de grande puissance.

En 1954, elle lançait son premier programme visant à constituer un arsenal nucléaire ; les Trente Glorieuses donnaient une impulsion décisive à son industrie. De Gaulle était parvenu à faire accepter la France comme l’un des vainqueurs de la seconde guerre mondiale. C’est dans ce contexte que le statut de membre permanent du Conseil de sécurité lui fut accordé in extremis.

Alors que la question de la composition du Conseil de sécurité est fréquemment posée en ce qui concerne la représentativité de régions comme l’Afrique ou l’Asie, la question d’un siège européen unique relevait jusqu’aujourd’hui de l’utopie. Or, l’accord électoral récemment conclu entre le PS et EELV en vue de l’élection présidentielle de 2012 prévoit que « la France fera des propositions précises pour réformer et démocratiser l’ONU afin qu’elle structure un ordre juridique et normatif global ». Parmi ces propositions figure l’attribution, à l’Europe, d’un siège au sein du Conseil de sécurité des Nations unies.

Le siège français, un héritage illégitime ?

La proposition de l’accord électoral fait face aujourd’hui à une levée de boucliers de la part de nombreux responsables politiques, de droite comme de gauche, qui insistent sur la grandeur et l’indépendance de la nation française. Le souhait d’une réforme de l’ONU a rencontré l’opposition de plusieurs chefs de parti, au premier rang desquels François Bayrou, Jean-François Copé, Jean-Pierre Chevènement.

En effet, l’accord propose un changement radical dans la vision française des relations internationales ; car il semble impossible que la France et la Grande-Bretagne conservent leur statut de membre permanent au Conseil de sécurité, si l’Union européenne venait à acquérir ce statut. Dans une telle hypothèse, il est certain que le Conseil de sécurité reflèterait davantage les rapports de force existant aujourd’hui sur la scène internationale.

Force est d’admettre que la France n’a plus sa grandeur passée. François Bayrou, fédéraliste notoire, a critiqué l’idée d’un siège européen, considérant que le statut de membre permanent est « la seule arme qui permette encore à la France d’être au rang des puissances majeures » ; mais si tel est le cas, et si la France n’a plus les moyens économiques et politiques de peser sur la scène internationale, son statut de membre permanent du Conseil de sécurité est-il encore pleinement justifié ? Quelle est sa légitimité à siéger aux côtés des superpuissances d’aujourd’hui, alors même que l’Allemagne, du fait de son histoire, n’a pas ce privilège ?

Une réforme essentielle pour l’avenir de la diplomatie européenne

Bien évidemment, la procédure de modification des organes de l’ONU est aujourd’hui trop complexe pour envisager une réforme en profondeur du Conseil de sécurité. En outre, l’action européenne aux Nations unies n’aura aucune efficacité tant que la diplomatie de l’Union européenne continue d’être dirigée par des personnalités obscures, choisies pour leur manque d’ambition et leur faible compétence dans les affaires internationales. Il semble donc que les sièges permanents français et britannique ont encore leur importance.

Du reste, l’accord PS-EELV montre désormais qu’une partie de la classe politique est prête à remettre en cause cinquante ans d’orgueil national, et à accepter l’état du monde de demain. La France n’est plus la grande puissance qu’elle fut en 1945 ; elle ne sera en mesure de retrouver une position d’influence qu’à travers une diplomatie européenne efficace et ambitieuse. Seule l’Europe pourra, à terme, occuper la place qui échut par le passé à la France.

Reste donc en suspens une question vitale pour notre diplomatie. Qu’est-ce qui relève de l’utopie : conférer à l’Europe les moyens légitimes de sa puissance, ou cultiver l’espoir nostalgique de voir la France retrouver une place qu’elle a perdue depuis un demi-siècle ?

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Vos commentaires
  • Le 29 novembre 2011 à 07:28, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    La France a perdu sa puissance il y a maintenant plus de 70 ans, pas un demi-siècle. En même temps quand on voit ce qu’elle en faisait...

  • Le 29 novembre 2011 à 12:25, par Chamaillé thomas En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    Bonjour à tous,

    Je suis toujours époustouflé par le zèle missionnaire des habitués de ce site. Certes je conçois que l’on défende ses convictions ardemment mais il est évident que beaucoup sont passés de la conviction à la religion. L’Europe le veut. Ce nouveau béthyle n’a ni forme, ni image ni projet, il est. Et cela leur suffit.

    Que l’on me comprenne bien, si je en suis pas (du tout) fédéraliste, je comprends qu’on puisse l’être et cette position est tout à fait honorable. En revanche, quand la dévotion est telle qu’elle fait perdre tout sens et toute raison je suis plus inquiet. Il suffit de lire régulièrement les commentaires (les articles sont plus nuancés) pour comprendre le drame que nous vivons :

    « la voix eurosceptique - vocifère l’opposition radicale à l’acception fédérale, la haine de l’autre, la rage de la fiscalité, l’intolérance, la fraude sociale et la consommation gaspilleuse de la zone euro » : que voilà un portrait subtil, nuancé et ouvert...Au delà de l’exercice de style, c’est emblématique de la façon de penser ici : l’autre, voilà l’ennemi, ce qui ne manque pas d’ironie quand on lit les appels à la tolérance et à la « diversité ».

    Surtout, et depuis quelques années que je m’intéresse à ces questions, aucun fédéraliste n’a répond clairement à ces interrogations autrement que par une méthode Coué idéologique (il faudra convaincre nos partenaires ou « nous voulons une autre Europe ») :

     Comment,si le fédéralisme était appliqué, être sûr que notre « modèle social » serait préservé quand la majorité des pays de l’UE y sont hostile.
     La majorité des pays sont également ouvertement atlantiste, dès lors comme l’UE pourrait elle être indépendante (si en plus on se met à accepter des capitaux chinois...)
     Les pays millénaires ou plurimillénaires en Europe se sont construit sur des conceptions idéologiques très différentes qui sont profondément ancrées, que faire si elles s’opposent trop radicalement.

    Je limite à trois questions pour ne pas être trop long. Mais je serai également surpris de lire une part d’autocritique :
     Maastrich fut mal conçu de l’avis même de tenants de la monnaie unique car bancal, dès lors ne trouvez vous pas qu’on a menti aux peuples lors de la présentation du traité (que l’on présentait comme + de croissance, +d’emplois etc...d’ailleurs on rira beaucoup plus d’après Kouchner, jaune à coup sûr.)
     Que pensez vous des référenda de 2005, Irlandais, Hollandais qui ont été honteusement bafoués, de l’attitude des dirigeants sur le « référendum grec » et d’une manière générale sur le fonctionnement démocratique dans le cadre ACTUEL de l’UE

    Enfin, trouvez vous que disons, la Suède, l’Australie, la Corée du Sud, le Canada par exemple se trouvent si mal en point, eux qui sont pourtant isolés, sans l’UE/l’euro, puisqu’on nous prétend que la France est trop petite pour le monde à venir ?

    Cordialement

    Thomas Chamaillé

  • Le 29 novembre 2011 à 14:04, par Jonathan Leveugle En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    Bonjour,

    En tant que rédacteur en chef du Taurillon, je me permets de vous répondre.

    Merci pour vos commentaires.

    Tout d’abord, les commentaires n’engagent que leurs auteurs et en aucun cas le Taurillon. Ils ne reflètent en rien notre manière de penser qui se trouve dans nos articles. Les commentaires sont, comme dans la plupart des sites d’opinions, plus durs et hargneux que la ligne du média dans lequel ils s’expriment. Comme vous le soulignez vous même, nous sommes plus réfléchis et nous mesurons nos propos. Nous ne sommes en aucun des euro-béats comme j’ai pu le lire sur certains blogs souverainistes (en témoigne d’ailleurs cet article).

    Concernant vos interrogations et notre manière de penser. Je ferai tout d’abord une remarque liminaire qui, selon moi, différencie fondamentalement les souverainistes des fédéralistes. Nous faisons le même constat mais nous apportons des réponses totalement opposées. Il est clairement écrits dans la présentation de notre site que nous ne faisons en aucun cas l’apologie de l’UE actuelle. Nous ne sommes pas bête au point de ne pas voir qu’une crise grave est en train de secouer l’Europe et qu’il faut des changements profonds.

    Je ne vais pas me lancer dans une dissertation sur le fédéralisme qui n’a pas sa place ici. Je vais essayer d’être bref. Le fédéralisme se base sur une idée très simple, faire en sorte que les problèmes soient traités à l’échelon le plus approprié. Il ne s’agit en aucun cas de transférer l’ensemble des pouvoirs détenus actuellement par le gouvernement français à Bruxelles, mais bien de transférer ce qui doit être résolus à une échelle européenne.

    Vous posez la question de l’atlantisme d’une partie des États européens. Le problème n’est pas que la Roumanie soit atlantiste et pas la France. Vous vous focalisez sur un faux problème. La question primordiale est qui peut me défendre ? Chaque pays se la pose et essaye de trouver une solution. La Roumanie, et d’autres, ont trouvé la réponse dans un rapprochement avec les États-Unis, la France, elle, croit encore qu’elle peut se défendre seule. Mais pourquoi, ce choix atlantiste ? Ce n’est pas que les PECO ont un gêne les portants vers Washington, c’est tout simplement qu’à l’heure actuelle il n’y a pas de défense européenne fiable et ce n’est pas la France qui a les moyens de les défendre. Construisons donc une véritable Europe de la défense, forte et unie. Attention, je ne parle pas d’un intergouvernementalisme en matière de défense comme il en existe déjà aujourd’hui et qui est inefficace. Non je parle d’une défense européenne, décidée par une Parlement européen élu démocratiquement et responsable devant les peuples. Comment voulez vous décider d’un engagement militaire si 27 États doivent être d’accord, c’est ridicule.

    Une autre de vos questions réside dans la protection du modèle social français. Encore une fois, le fédéralisme ne signifie pas transfert de toutes les compétences à Bruxelles. Aux États-Unis, les États ont de grandes prérogatives en matière sociale et économique. La France gardera sa spécificité économico-sociale, fruit de son histoire. Il faut une véritable pédagogie pour expliquer ce qu’est le fédéralisme. Nous sommes tellement emprunt de jacobinisme républicain que beaucoup de souverainistes ne comprennent pas la signification d’un tel modèle. Il ne s’agit pas de dépouiller l’État français de toutes ses prérogatives qu’il a de toute façon perdue. En effet, les fédéralistes veulent justement un retour de la démocratie et la reprise en main de l’économique par le politique. La France a de toute façon perdu la capacité de contrôler la finance, non pas à cause de l’UE, mais du modèle économique libéral qu’elle a choisi. Au lieu de vouloir nier, l’évidence des faits en voulant un retour en arrière, pour dire avant c’était mieux, nous proposons de redonner la voix au peuple à une échelle ou il pourra contrôler l’économique, c’est à dire à l’échelle européenne. Je prends l’exemple de la finance, au vu de l’actualité, mais on prendre l’exemple de l’énergie, l’environnement, l’immigration... qui sont aussi des problématiques européennes qui en peuvent être traitées de manière intergouvernementale.

    Sur les empires millénaires avec des identités différentes, il me semble que vous vous trompez totalement. Si je comprends bien, selon vous il existerait des identités millénaires différentes que l’Europe ne peut réunir. Faux. Tout d’abord il n’existe aucune identité millénaire invariable. Ce serait vraiment trop long de partir sur une dissertation sur l’identité, mais sachez que c’est un concept mouvant qui change et s’enrichit de ses différentes interactions. Ainsi, il n’existe pas d’identité française millénaire. L’identité française actuelle (d’ailleurs en crise), est au mieux le fruit du Second Empire mais surtout de la IIIème République. Les différentes identités composant l’Europe ne sont donc pas des blocs immuables opposés mais s’entrecroisent. Au delà de ça je vous répondrai que le fédéralisme n’est pas le moulage des identités pour n’en faire qu’une. Encore une fois, pour comprendre ce concept, il faut sortir du cadre républicain jacobiniste actuellement en crise. Il existe en Europe des valeurs communes permettant la création d’un espace politique commun. Nous respectons tous au sein de l’UE la démocratie, les Droits de l’Homme, la liberté de pensée... Ces valeurs fondent un socle sur laquelle l’Europe politique se base. Ensuite, il existe des différence identitaire que chaque État, dans une Europe fédérale peut garder. Prenons l’exemple de la laïcité. En Europe, il y a l’idée répandue et partagée de tous que le religieux est séparé du politique, c’est à dire qu’il n’y a pas de théocratie dans laquelle le religieux est le fondement du politique. Mais cette séparation revêt des formes très différentes entre une France très laïque (sauf en Alsace Lorraine) et une Irlande ou une Italie où l’Église joue encore un rôle important dans la vie publique. Chaque État fait comme bon lui semble et ce n’est pas à l’Europe de décider à sa place. Aux États-Unis, chaque entité fédérée possède une grande liberté dans ces domaines.

    Pour finir je vous répondrai sur l’UE actuelle. Nous ne ferons pas d’autocritique car tout simplement nous avons critiqué ce que vous dénoncez. Bien sur que la zone euro est bancale et qu’il faut des réformes, nous n’arrêtons pas de le proclamer (lisez nos articles avant de nous critiquer). Nous disons qu’il faut une intégration fédérale de nos économies pour trouver une solution à la crise. Enfin sur le fonctionnement démocratique, nous plaidons aussi pour un renforcement démocratique de l’UE. Ces deux critiques me semblent usurpées au vu de notre ligne éditoriale (lisez nous ;)

    Je n’ai sans doute pas répondu à toutes vos questions mais j’ai essayé comme j’ai pu.

    Ce fut un plaisir et n’hésitez pas à nous solliciter de nouveau, nous vous répondrons avec plaisir.

    Cordialement,

    Jonathan LEVEUGLE

  • Le 29 novembre 2011 à 18:58, par Chamaillé Thomas En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    Monsieur LEVEUGLE,

    dans un premier temps merci d’avoir pris le temps de répondre, et surtout de manière à la fois précise et complète. Jouons carte sur table (puisque je connais votre position que la mienne soit connue également), je suis militant à Debout la République, le parti de Nicolas Dupont Aignan, qui je crois a eu droit à un carton rouge, mais c’est de bonne guerre. De même, je m’excuse d’avoir précipitamment assimilé le Taurillon et nombre d’hommes politiques se revendiquant plus ou moins du fédéralisme. Et si, je vous ai lu ! Et reconnais volontiers d’être allé trop vite en besogne.

    Je vais revenir sur plusieurs points que vous évacuez un peu trop vite à mon sens ou sur lesquels je suis en profond désaccord.

    En effet vous évoquez le fédéralisme ne invoquant le principe de subsidiarité (déjà à l’œuvre dans le fait), mais le fédéralisme ça n’est pas ça, ou pas que ça : c’est la mise en place de 2 niveaux institutionnels à la fois partenaires et concurrents, mais aussi, et ça n’est pas la moindre des choses, de deux niveaux « d’allégeance » citoyenne ou représentation identitaire de la part des citoyens. (je reconnais volontiers qu’il faudrait préciser le vocabulaire.) Dans de nombreux états fédéraux, le partage se fait autour des fonctions dites « régaliennes », comme le politique étrangère, l’armée...C’est à dire ce qui forge la souveraineté d’un état. Dès lors, dans un système fédéral, les états abandonne ENTIÈREMENT leur souveraineté (le droit exclusif d’exercer l’autorité politique (législative, judiciaire et/ou exécutive) sur une zone géographique ou un groupe de peuples —Wikipédia, pour aller vite) et en sont réduis à inaugurer les chrysanthèmes, bref, à se contenter de légiférer sur des aspects seconds (pas forcément mineurs parfois). Or, le poids des décisions de l’État fédéral est tel qu’il peut empêcher/invalidé des décisions qui sont pourtant des prérogatives de l’État. En somme la marge de manœuvre est extrêmement réduite. Cela peut se concevoir entre des peuples dont les bases culturelles et les héritages sont suffisamment proches pour que ce partage soit accepté et que les décision fédérales se fassent sans trop de heurts. Il n’existe rien de cela en Europe car tout simplement le peuple européen est comme l’Homme de Diogène, il n’existe pas. Aussi je crois que c’est une erreur de vouloir le créer de force, par le prisme institutionnel et une propagande éhontée (j’ai sous les yeux un agenda europa distribué aux lycéens, on dirait un tract soviétique, et ce coup je pèse mes mots). Cette absence se retrouve d’ailleurs dans les difficultés de l’euro et la question des zones monétaires optimales nécessaires à une monnaie unique : La mobilité des travailleurs est faible ou nulle car personnes ne cherchent à aller vivre dans un autre état européen (culture, langue, distance etc..), ce qu’on retrouve par contre aux Etats unis. Je crois profondément que nier cette réalité au profit d’une ambition ou d’un rêve est dangereux car cela amène à sa suite de grands malheurs. A la suite de cela, et en complément je me permets un petit détour sur l’identité. Si comme vous le rappelez il n’existe pas d’identité millénaire immuable, en revanche il existe une Histoire millénaire qui participe fortement (et notamment en France) du sentiment identitaire. Cette Histoire se retrouve aussi bien dans les choses en apparences triviales, (gastronomie) que dans les choses plus importantes (rapports aux pouvoirs et à institution, aux libertés, à la géographie..). Cette histoire infuse en permanence, aujourd’hui encore et construit les identités au fur et à mesure. Le « jacobinisme » est tout autant l’oeuvre de Robespierre de de Charlemagne, Louis XIV, Napoléon ou la IIIe république.. Or plus celle-ci est ancienne, plus les particularismes sont tenaces. Faut il les éradiquer, je ne le crois pas. Et je compte la dedans la question du droit, qui est fondamentale, ce qui me permet de rebondir sur la question du modèle français : contrairement à ce que vous prétendez l’UE empêche la préservation de ce modèle, notamment en imposant la fin des monopoles publics (EDF/GDF, SNCF etc...) ; des actions ont été, et sont, de plus en plus souvent portées devant la CEDD (cour européenne des droit de l’homme) pour des questions de discrimination religieuse (et les textes européens sur le droit des minorités est d’ailleurs un outil de ce levier judiciaire). En vertu de la « méthode Monnet », ces transferts sont de plus en plus nombreux, ajouté au bilan catastrophique de l’UE qui n’aura réussi qu’à faire des œufs carrés, et à mettre en œuvre une libéralisation économique sauvage basée sur le moins disant social, une dérive antidémocratique. Cette volonté d’intégration est d’autant plus étonnante que sur des questions comme la finance ou l’écologie l’échelon européen n’est pas davantage pertinent que l’échelon nationale et que seule une solution mondiale pourrait exister. Je crois normal une coopération de nations unies par la géographie et ayant une base culturelle commune, mais ce désir de fédéralisme me semble parfois être une forme de réminiscence d’un désir d’empire, courant parmi les élites et depuis longtemps. (Cela me fait penser à cette phrase de Drieu « que nous est notre patrie nous qui rêvions d’empire » dans Mesure de la France.)

    Je m’excuse pour le caractère décousu et parfois un peu « rapide » de l’argumentation, le temps me manque, mais je reviendrai volontiers.

    Cordialement

    Ps : j’attends ma réponse sur la Suède/Corée/canada..l’UE est elle si indispensable ?

    Thomas Chamaillé

  • Le 29 novembre 2011 à 19:05, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    @Jonathan : « la France, elle, croit encore qu’elle peut se défendre seule. Mais pourquoi, ce choix atlantiste ? » : en même temps elle est membre de l’OTAN depuis sa fondation et a rejoint récemment les dernières structures auxquelles elle ne participaient pas.

    La défense est depuis 60 ans un projet collectif, à dimension euratlantique et deplus en plus européenne. Dès lors que l’on partage des valeurs et des intérêts communs il est logique de les défendre ensemble face aux menaces, également communes.

    Le romantisme désuets des militants nationalistes qui évoquent une vision mythologique de l’Histoire de France et ses images d’Epinal peuvent sembler sympathiques mais ne sont guère utiles pour comprendre les réalités auxquelles nos gouvernants doivent se confronter.

  • Le 30 novembre 2011 à 07:35, par Valéry-Xavier Lentz En réponse à : Faut-il un siège européen au Conseil de sécurité de l’ONU ?

    Pour répondre à vos questions :

    * Maastrich fut mal conçu de l’avis même de tenants de la monnaie unique car bancal : oui, et les fédéralistes l’ont dit et redits à l’époque. Nous avons soutenus le traités en raison des nombreux progrès démocratiques et parce que une monnaie fédérale devrait plus tard entraîner la création d’un gouvernement fédéral. Nous y sommes. Il est plus que temps de faire le pas. * Que pensez vous des référenda de 2005, Irlandais, Hollandais qui ont été honteusement bafoués : faux. Ce sont les pays ayant ratifiés le traité, que ce soit par référendum ou via leurs représentants, qui ont été bafoués ainsi que ceux qui n’ont pas pu s’exprimer. Largement majoritaires, leurs choix ont été ignorés et le traité abandonné au profit d’un mini-traité qui n’était pas à la hauteur des enjeux. Les fédéralistes sont favorables à la seule voie démocratique possible : l’adoption des traités si une majorité qualifiée les ratifie. * pour info la Suède fait partie de l’Union européenne.

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