En bref, pourquoi / pourquoi pas ?
Une langue commune unique permettrait à un demi-milliard de personnes de communiquer plus facilement pour échanger, voyager, commerce, travailler, accéder aux informations, apprendre, penser et créer. Cela favoriserait un sentiment d’unité parmi ses locuteurs et favoriserait l’émergence d’une culture partagée. Apprise à tous, cette langue comblerait l’écart entre une minorité éduquée dans des familles bilingues ou dans des écoles internationales, et la grande majorité de la population.
Quelle langue choisir par les 24 langues européennes officielles ?
Une sorte de présélection a déjà été effectuée. Seulement trois langues ont le statut de langues de travail dans les institutions européennes (français, anglais, allemand ndlt). Cependant, si on prend en compte l’utilisation de ces langues comme langues étrangères, l’anglais a indubitablement la suprématie sur ses deux rivaux, l’allemand et le français.
Comment cela fonctionnerait-il ?
Une langue commune unique serait extrêmement bénéfique d’un point de vue institutionnel. La communication serait bien plus facile au sein des institutions, ainsi qu’entre les politiciens européens et les citoyens. Par exemple, des élections pourraient être organisées au niveau européen et non plus seulement au niveau national. Les économies serait également significatives, car l’Europe dépense des milliards d’euros chaque année pour la traduction et l’interprétation.
Cela ne signifierait pas pour autant la négation des langues maternelles des citoyens, mais seulement une diffusion large des connaissances à propos d’une langue commune, promouvant ainsi la communication et la collaboration transfrontalières.
Nos efforts devraient se concentrer sur l’enseignement de l’anglais à travers l’Europe, et cela devrait être financé et promu à l’échelle européenne. Soit on laisse le statu quo institutionnel inchangé, dans lequel il y a 3 langues de travail, et les institutions -principalement le Parlement européen – sont obligées de traduire tous les documents en 24 langues. Ou on allège le fardeau de la traduction et de l’interprétation sans remettre trop profondément en cause les règles existantes. La confédération suisse est un modèle intéressant à cet égard, dans lequel tous les citoyens attendent des institutions qu’elles interagissent avec eux dans leur langue maternelle. Mais seulement deux langues sont utilisées au sein des institutions. Ce genre d’évolution peut être un premier pas vers une généralisation de la solution.
Qu’en pensent vraiment les européens ?
Selon l’Eurobaromètre 386 de 2012, « les européens sont également largement en faveur d’une capacité des personnes en Europe à parler une langue commune, avec environ 7 sur 10 répondants (69%) qui sont d’accord avec ce point de vue ». « Deux tiers des européens (67%) considèrent l’anglais comme l’une des deux langues les plus utiles, et moins d’un sur cinq mentionne l’Allemand (17%), le Français (16%) et l’espagnol (14%) ». De plus, « il y a eu une diminution depuis 2005 de la proportion d’européens qui pensent que le français et l’allemand sont importants (respectivement moins 9 points de pourcentage et moins 5 points) ».
« Presque tous les européens (98%) pensent que les langues étrangères seront utiles aux enfants dans le futur. Encore, l’anglais est perçu comme la langue la plus utile par 8 européens sur 10 (79%). Un répondant sur 5 mentionne le français ou l’allemand (20% chacun). […] La proportion d’européens qui pensent que le français et l’allemand sont importants à apprendre a baissé depuis 2005 (respectivement 13 points de pourcentage et 8 points de pourcentage). »
Le souhait d’une large majorité d’européens est assez clair. L’anglais devrait devenir la langue européenne commune.
Quel impact sur les autres langues européennes ?
L’impact est incertain car il dépendrait très largement des politiques linguistiques mises en place au niveau national. La préservation des autres langues européennes est clairement une priorité, mais l’enseignement de l’anglais serait complémentaire et armerait les européens pour vivre et travailler à l’étranger. On peut envisager que cela accélèrerait le recul du français comme langue internationale. L’allemand comme langue internationale serait également affecté à la marge.
Comment cela modifierait les cultures nationales et la politique ?
Cela aussi dépendra beaucoup des politiques nationales. On espère que cela stimulera l’émergence d’une culture européenne partagée.
Les relation UE / Grande Bretagne seront-elles affectées ?
On croit que la relation s’améliorera grâce à un abaissement de la barrière du langage, peut-être plus entre les citoyens qu’entre gouvernements. Les citoyens britanniques ne sont pas tous les partisans d’une ligne dure de sortie de l’UE…
Cela changera-t-il l’image de l’UE ?
L’UE sera certainement plus intégrée et unie que les autres puissances, au moins en apparence. La préoccupation de savoir si l’UE sera affaiblie ou non par l’adoption de l’anglais pendant le processus du Brexit est trop concentrée sur le court terme. Le monde va dans cette direction : on peut soit s’y préparer et embrasser le changement en préparant les européens pour un monde de langues nationales cohabitant avec des « super langues », soit ne rien faire et voir notre compétitivité décroitre. Il s’agit de préparer le futur pour la prochaine génération d’européens , c’est bien plus grand que le Brexit.
Quel impact sur le droit européen ?
Cette question est sensible car depuis que la Grande-Bretagne est entrée dans l’UE il y a eu des disputes acharnées entre les tenants d’un droit continental et les défenseurs du droit britannique. Conserver le français comme une langue officielle de la Cour Européenne de Justice pourrait être une solution. Il incombe aux juristes de débattre et de décider quel statut l’anglais doit avoir dans le champs du droit européen.
Quel serait le principal avantage d’une langue commune ?
Cela créerait un sentiment grandissant d’unité entre les locuteurs et les inclurait dans une culture partagée. Les bénéfices économiques seraient visibles, comme une intégration renforcée dans les échanges commerciaux, une baisse du chômage, une mobilité augmentée et une compétitivité améliorée, surtout dans les pays comme l’Italie ou le taux de chômage est relativement élevé et le bilinguisme moins commun qu’ailleurs en Europe.
Quelle serait le plus grand inconvénient ?
Les élites perdraient un avantage compétitif décisif sur les autres classes sociales, qui n’avaient pas accès jusqu’ici à une éducation bilingue.
Si l’anglais devient dans tous les cas une langue européenne commune, est-ce qu’une telle intervention est nécessaire ?
Les européens pourraient choisir de laisser faire les tendances économiques actuelles, qui façonneront progressivement leur environnement culturel. Cependant ils pourraient officiellement décider d’utiliser l’anglais comme une langue commune pour accélérer l’économie européenne et l’intégration politique, une étape nécessaire si les européens veulent améliorer leur influence économique et politique dans un monde changeant et hostile.
1. Le 5 septembre 2017 à 16:48, par Valéry En réponse à : L’anglais comme langue européenne commune
Excellente idée pleine de bon sens. Trop sans doute pour tous ceux qui ne pensent qu’à travers un prisme idéologique.
2. Le 19 février 2018 à 17:22, par Gallerne Jean-Michel En réponse à : L’anglais comme langue européenne commune
Pardonnez-moi de contredire cette vision un peu trop simpliste ! On ne construit pas un ensemble consensuel avec une langue hégémonique (ni un droit d’ailleurs !). Vous risquez un diglossie à tous les niveaux de la construction européenne. Je vous propose d’aller voir du côté des pays d’Afrique comme le Cameroun, par exemple. Les canadiens l’ont bien compris.
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