Le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov reçoit le prix Sakharov 2018

, par Odile Romelot

Toutes les versions de cet article : [English] [français]

Le cinéaste ukrainien Oleg Sentsov reçoit le prix Sakharov 2018
Présentation du prix Sakharov devant le bâtiment du Parlement européen à Bruxelles © European Union 2018 - Source : EP - Emilie Gomez

Oleg Sentsov n’a pas été libéré pour la remise du prix Sakharov qui lui a été décerné le 12 décembre 2018, lors de la session plénière au Parlement de Strasbourg. Le cinéaste ukrainien, originaire de Crimée, est emprisonné en Russie depuis mai 2014. Il est accusé de « terrorisme » et de « trafic d’armes » par la Russie, alors qu’il luttait contre l’annexion de la Crimée. Le Parlement européen a décidé de lui remettre le prix Sakharov, souhaitant ainsi reconnaître sa lutte pour la libération de la Crimée et des prisonniers politiques ukrainiens.

Le prix Sakharov pour la liberté de l’esprit a été créé en 1988 en l’honneur d’Andreï Sakharov. Ce physicien soviétique a participé aux recherches et à la conception de la première bombe à hydrogène soviétique durant la Guerre froide. Conscient du danger que représentait cette bombe, entre les mains d’un complexe militaro-industriel soviétique en pleine expansion, Andreï Sakharov développa une attitude critique à l’égard du gouvernement de l’URSS. Avant d’être contraint à « l’exil interne », il ne cessa de dénoncer le parti unique et sa bureaucratie corrompue, l’injustice sociale, la répression et le non-respect des droits de l’homme.

Une valeur fondatrice de l’Union européenne, le respect des droits de l’homme

Le respect des droits de l’homme est l’une des valeurs fondatrices de l’Union européenne, qui souhaite, à travers le prix Sakharov créé par le Parlement européen, soutenir les personnes impliquées dans leur défense. Sans distinction de nationalité, ce prix récompense des citoyens ou des ONG s’impliquant de manière exceptionnelle et courageuse contre les violations des droits de l’homme.

Le Président du Parlement européen, Antonio Tajani, a notamment déclaré « Grâce à son courage et à sa détermination, et en mettant sa vie en danger, le réalisateur Oleg Sentsov est devenu un symbole de la lutte pour la libération des prisonniers politiques en Russie et dans le monde entier. En lui décernant le prix Sakharov, le Parlement européen lui exprime sa solidarité et soutient sa cause. Nous demandons sa libération immédiate. Son combat nous rappelle qu’il est de notre devoir de défendre les droits de l’homme partout dans le monde et en toutes circonstances ».

Quel espoir pour Oleg Sentsov ?

Agé de 42 ans, Oleg Sentsov est un réalisateur et scénariste ukrainien. Dès 2013, il devient membre du mouvement AutoMaidan au sein duquel il lutte pour la liberté, les droits de l’homme et la paix en Ukraine. C’est toutefois son rôle lors de l’annexion de la Crimée qui lui vaut d’être arrêté par le FSB, le service de sécurité russe, puis amené en Russie. Pour avoir organisé des missions humanitaires auprès des soldats ukrainiens en leur apportant nourriture et médicaments, tout en participant à l’évacuation de leur famille, Oleg Sentsov comparait devant un tribunal militaire russe. Il est ensuite condamné à vingt ans de prison.

En 2018, Oleg Sentsov a mené une grève de la faim durant 145 jours pour demander la libération de 70 prisonniers politiques ukrainiens retenus en Russie. Sans succès, il a abandonné sous la menace d’être nourri de force. Malgré une mobilisation d’artistes, d’intellectuels et de politiques à travers le monde, la position de Moscou ne devrait pas évoluer. En effet, Oleg Sentsov, nationalisé russe unilatéralement par les autorités de Russie, est accusé de « terrorisme » et de « trafic d’armes ». Selon le discours officiel, pourquoi faudrait-il alors relâcher homme reconnu coupable de terrorisme ?

En octobre 2018, Oleg Sentsov est déclaré citoyen d’honneur de la Ville de Paris. C’est maintenant le Parlement européen qui lui rend hommage. Le lauréat 2018 n’a pas pu quitter la colonie pénitentiaire de Labytnangui pour recevoir le prix Sakharov le 12 décembre à Strasbourg. C’est sa cousine, Natalya Kaplan, qui s’y est rendu à sa place.

Il semblerait que le gouvernement russe demeure inflexible quant au prisonnier Oleg Sentsov, et sa libération prochaine est plus qu’improbable. Les titres honorifiques peuvent-ils infléchir la décision russe ? Ou permettent-ils de donner bonne conscience aux démocraties occidentales sans exercer une véritable pression politique et économique sur la Russie ? Attend-on de l’Union européenne qu’elle impose ses valeurs hors de ses frontières ?

Mots-clés
Vos commentaires
modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?

Pour afficher votre trombine avec votre message, enregistrez-la d’abord sur gravatar.com (gratuit et indolore) et n’oubliez pas d’indiquer votre adresse e-mail ici.

Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom