Les élections européennes : entre regain de participation et nouveaux enjeux générationnels

« Démocratie ? 1944-2024 » : Le Taurillon entre Alsace et Auvergne

, par Kylian Rochetin

Les élections européennes : entre regain de participation et nouveaux enjeux générationnels
Le Parlement européen de Bruxelles lors de la soirée électorale du 9 juin 2024. © European Union 2024 - Source : EP

Les premières élections européennes de 1979 ont été marquées par un franc succès, avec un taux de participation élevé atteignant 63 % à l’échelle de l’Europe. Ce record historique n’a jamais été dépassé, car, au fil des scrutins, la mobilisation des électeurs n’a cessé de diminuer. Cependant, les deux dernières élections, en 2019 et 2024, ont enregistré une légère hausse de la participation. Le 9 juin dernier, près de 51 % des citoyens européens se sont rendus aux urnes, un taux légèrement supérieur à celui de 2019.

Les élections européennes constituent un pilier essentiel de la démocratie au sein de l’Union européenne, le niveau de participation reflète l’intérêt porté par les citoyens aux institutions et contribue à renforcer leur légitimité. Dans cette perspective, il est crucial de surveiller de près ce taux de participation, tant au niveau européen qu’au sein des États membres.

Les élections européennes : entre regain d’intérêt et défis persistants de mobilisation

Les élections européennes de 2024 s’inscrivent dans la continuité de celles de 2019 en poursuivant la progression du taux de participation des citoyens au scrutin. Avec une augmentation de 0,27 %, ce résultat permet de maintenir la participation au-dessus du seuil symbolique des 50 %. Toutefois, le véritable sursaut de mobilisation a été observé entre les élections de 2014 et de 2019, marquant un gain significatif de 8 points de pourcentage. Après quatre décennies de baisse continue, ce rebond a permis de remettre les institutions européennes au cœur de l’attention politico-médiatique.

Avant 2014, les élections européennes peinent à mobiliser les électeurs. En 2018, un Eurobaromètre a mis en évidence un déficit de confiance significatif envers les démocraties nationales, un phénomène qui a également affecté les institutions européennes. Selon cette enquête, seulement 42% des citoyens européens déclarent avoir confiance en l’Union européenne. Les scrutins de 2019 et 2024 ont marqué un tournant en rompant avec la dynamique descendante, grâce à un taux de participation dépassant, pour la première fois depuis longtemps, le seuil des 50 %. D’après l’Eurobaromètre publié en avril 2024, l’intérêt des Européens pour les élections de juin dernier est en hausse. Selon l’étude, 60 % des citoyens se disaient intéressés par ce scrutin.

Les crises récentes et la situation géopolitique ont particulièrement mis en lumière le rôle de l’Union, déclanchant un intérêt accru pour ses institutions : qu’il s’agisse de la gestion de la pandémie de COVID-19 ou de la position adoptée face au conflit en Ukraine. Cependant, ce regain d’attention pour les élections ne doit pas occulter le niveau élevé d’abstention qui persiste.

Les disparités de participation aux élections européennes : entre progrès significatifs et baisses préoccupante

L’analyse des taux de participation aux élections européennes met en évidence de fortes disparités entre les États membres. En tête de liste figurent la Belgique (89,82 %), le Luxembourg (82,29 %), Malte (73 %), l’Allemagne (64,78 %) et la Hongrie (59,26 %). La France, quant à elle, se classe au 10e rang avec un taux de participation de 51,49 %. C’est la première fois que la France dépasse la moyenne des taux de participation parmi les États membres !

À l’autre extrémité du spectre, les cinq États enregistrant les taux les plus faibles sont la Croatie (21,34 %), la Lituanie (28,35 %), la Bulgarie (31,80 %), l’Estonie (33,70 %) et la Lettonie (33,82 %). Globalement, les taux de participation les plus faibles sont majoritairement observés dans les États d’Europe centrale et orientale. Cette disparité s’explique par plusieurs facteurs. Dans des pays comme la Belgique et le Luxembourg, le vote est obligatoire et assorti de sanctions en cas d’abstention, ce qui stimule fortement la participation. La Bulgarie applique également le vote obligatoire, mais sans sanctions prévues, ce qui limite son efficacité. La tenue simultanée des élections législatives anticipées en Bulgarie n’a fait que contribuer à un taux d’abstention déjà particulièrement élevé aux élections européennes.

Certains Etats ont relevé une plus forte participation, tels que la Hongrie (+15,9%), Chypre (+13,87%), la Slovénie (+12,47%) et la Slovaquie (+11,64%), mais également la République tchèque qui connait une progression significative de 7,73 points. Historiquement, une importante disparité a toujours existé entre les États d’Europe de l’Ouest et ceux d’Europe centrale et de l’Est en matière de participation aux scrutins européens. Cependant, il est important de noter que ce sont également plusieurs de ces États de l’Est qui affichent les plus fortes hausses de participation, traduisant une évolution encourageante dans la mobilisation électorale.

A l’inverse de ces augmentations, il faut aussi relever des baisses significatives de participations en particulier en Lituanie (-25,13%), en Grèce (-17,3%) et en Espagne (-11,52%). Ces baisses s’expliquent par une perte du lien entre les gouvernements en place et les citoyens.

Les élections européennes regagnent-elles un intérêt auprès des jeunes ?

Le vote des jeunes est difficile à mobiliser, l’abstention dans cette tranche d’âge reste très élevée à travers l’ensemble des États européens. Cependant, cela ne signifie pas que les jeunes se désintéressent de la politique. Ils peuvent même parfois créer la surprise, comme ce fut le cas lors des élections européennes de 2019. À cette occasion, la mobilisation des jeunes a dépassé les attentes : alors que les prévisions estiment leur participation à 32 %, elle a finalement franchi la barre des 40 %. Cette hausse a principalement bénéficié aux partis écologistes, portés par des propositions en faveur du Pacte vert... mais pas seulement.

Les jeunes ont aussi montré un intérêt grandissant pour les partis d’extrême droite. En France, 32 % des 18-35 ans ont voté en faveur du Rassemblement National lors des dernières élections. En Allemagne, 22 % des moins de 30 ans se sont tournés vers l’Alternative für Deutschland (AfD). Aux Pays-Bas, les 18-34 ans placent majoritairement leur confiance dans le parti de Geert Wilders. En Espagne, un phénomène inattendu s’est produit avec l’émergence d’Alvise Pérez, un youtubeur d’extrême droite, qui a réussi à obtenir des sièges au Parlement, illustrant l’attractivité croissante de ces idées auprès de la jeune génération.

Confrontées à la montée des nationalismes portés par les extrêmes droites européennes, les institutions communautaires continuent de faire l’objet de vives contestations. L’incertitude autour de la participation électorale demeure, rendant prématuré tout pronostic quant à la pérennité du léger regain d’intérêt observé lors de ce scrutin.

Cet article a été écrit dans le cadre de « Démocratie ? 1944-2024 », le Taurillon entre Alsace et Auvergne, un partenariat entre les Jeunes Européens Strasbourg et Auvergne.

Cet article est écrit dans le cadre du projet Erasmus+ « Check’Europe ». Il est financé par l’Union européenne. Les points de vue et avis exprimés n’engagent toutefois que leur(s) auteur(s) et ne reflètent pas nécessairement ceux de l’Union européenne ou de l’Agence exécutive européenne pour l’éducation et la culture (EACEA). Ni l’Union européenne ni l’EACEA ne sauraient en être tenues pour responsables.

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