Les enjeux de la plénière constitutive du nouveau Parlement européen

, par Louise Guillot

Les enjeux de la plénière constitutive du nouveau Parlement européen
Crédits : © European Union 2019 / Source : Parlement européen. Photo : Marc Dossmann Les députés européens lors de la dernière session plénière de la mandature 2014-2019 du Parlement européen le 26 mars 2019 à Strasbourg.

Ce mardi 2 juillet 2019, les députés européens nouvellement élus se réunissent au siège du Parlement européen à Strasbourg pour la première plénière de la mandature 2019-2024. Cette session plénière, dite constitutive, va permettre au nouveau Parlement de se mettre en route. Les députés vont devoir élire le président du Parlement européen, les vice-présidents, les questeurs, définir le nombre de commissions parlementaires et désigner leurs responsables. C’est donc un programme chargé qui attend les députés et de longues heures de négociations…

L’Allemand Manfred Weber et le Belge Guy Verhofstadt au coude à coude pour la présidence du Parlement européen

D’après Politico, les négociations sont toujours en cours pour savoir qui obtiendra la présidence du Parlement européen. Plusieurs noms circulent mais il semblerait que le combat se tienne entre le candidat tête de liste du Parti Populaire Européen (droite conservatrice), Manfred Weber, et le libéral du groupe nouvellement nommé « Renew Europe », Guy Verhofstadt, dont le parti constitue la troisième force au sein de l’hémicycle.

Manfred Weber, pourtant Spitzenkandidat du parti arrivé en tête des élections européennes, a été écarté par le Conseil européen pour la présidence de la Commission européenne. Il n’est pas parvenu à réunir une majorité de chefs d’Etat et de gouvernement pour proposer sa nomination au Parlement européen. Les négociations se poursuivent donc dans la plus grande incertitude du côté du Conseil européen et elles sont très tendues puisque Donald Tusk, président du Conseil européen, a décidé de suspendre la réunion et de la reporter à demain (mardi) 11h.

Evidemment, ces négociations ont un impact sur les discussions entre les groupes politiques au sujet de la présidence du Parlement européen et la question est maintenant de savoir si le Parlement va attendre et repousser l’élection de son président en fonction de l’évolution de la position du Conseil Européen sur les autres « top jobs » européens (que sont la présidence du Conseil Européen, le Haut Représentant de l’UE pour les Affaires Extérieures et la Politique de Défense et de Sécurité Commune, et la présidence de la Commission européenne). Effectivement, le Parlement peut choisir de faire pression sur le Conseil européen en désignant son ou sa président.e sans attendre, ce qui réduirait la marge de manœuvre laissée au Conseil Européen et la liste des personnalités européennes en course pour les « top jobs ». Mais le Parlement peut aussi retarder le vote tout en poursuivant des négociations informelles avec le Conseil européen dans le but de satisfaire toutes les familles politiques et la recherche d’un équilibre entre les institutions. Les députés qui souhaitent se porter candidat à la présidence du Parlement ont jusqu’au 2 juillet en fin de journée pour y procéder. Tout au long de la journée, Strasbourg aura un oeil sur Bruxelles...

Les commissions parlementaires les plus convoitées

Il est probable qu’on assiste à certains changements dans la structure et la composition des commissions parlementaires. En effet, d’après son règlement intérieur, le Parlement européen comporte 20 commissions parlementaires permanentes, parmi lesquelles une commission en charge de l’environnement, une autre pour les affaires étrangères, le budget ou encore les affaires économiques et monétaires. Mais les eurodéputés peuvent décider de modifier le nombre et le portefeuille de certaines commissions et ont aussi le pouvoir de créer des commissions spéciales ou d’enquête comme cela avait été le cas lors du Dieselgate avec la commission EMIS, ou la commission TAX3 qui avait été constituée suite à la publication des Panama Papers, Lux Leaks pour aborder les questions de l’évasion fiscale en Europe.

La répartition des présidences et vice-présidences des commissions parlementaires s’appuie sur un calcul mathématique compliqué : la règle d’Hondt. Cette règle attribue un certain nombre de points à chaque groupe politique en fonction de son nombre de sièges au sein de l’hémicycle, et c’est en dépensant ces points que les groupes se voit attribuer les différents postes. Les postes les plus importants valant plus de points, les négociations sont souvent rudes entre les groupes, chacun tentant d’exercer son influence pour peser davantage dans une commission et donc sur un sujet. C’est ensuite au sein de la Conférence des présidents de groupe politique que tout se joue et se décide. Il est nécessaire en amont de se mettre d’accord sur des noms à proposer pour chaque groupe et chaque poste, et donc composer avec les différentes délégations nationales, avant de pouvoir entamer les négociations avec les autres forces politiques.

La commission ENVI (environnement, santé publique et sécurité alimentaire) sera la plus importante en nombre de sièges puisqu’elle totalisera 76 membres, et c’est le Français Pascal Canfin (La République en Marche, Renew Europe) qui est pressenti pour en prendre la présidence d’après Le Figaro. A l’inverse les commissions les moins importantes en termes numériques sont JURI et DEVE, mais cela ne signifie pas que le travail parlementaire n’y ait pas chargé, ni que les sujets abordés ne sont pas capitaux.

D’après nos informations, il semblerait que le groupe « Identité et Démocratie » composé d’eurodéputés nationalistes et europhobes du Rassemblement National, de la Ligue italienne, du parti belge de Vlaams Belang ou encore du FPÖ autrichien, brigue la présidence des commissions parlementaires AGRI et JURI. Les négociations sont toujours en cours et rien n’est encore décidé, mais il semblerait que les autres groupes politiques pro-européens se rassemblent pour faire barrage à l’extrême droite et tentent de limiter au maximum leur influence dans l’hémicycle.

Les questeurs en question

La session plénière sera aussi l’occasion de désigner les cinq questeurs du Parlement européen. D’après le règlement intérieur, ces questeurs, qui sont des députés européens, sont en charge des tâches administratives et financières qui concernent justement les eurodéputés. Ils font le lien entre les députés et le Bureau du Parlement européen, et agissent donc sur le fonctionnement interne de l’institution.

L’occasion de premiers débats politiques

Cette première session plénière de la mandature est l’occasion de tenir les premiers débats politiques du Parlement nouvellement constitué. Au programme ce jeudi 4 juillet, une discussion sur les conclusions des réunions du Conseil Européen de juin. Les débats promettent d’être vifs puisque les chefs d’Etat et de gouvernement n’ont pas réussi à se mettre d’accord et que le flou reste total pour savoir qui prendra la suite de Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission européenne à la rentrée prochaine.

Voilà donc un rapide panorama des principaux enjeux de la session plénière constitutive de la mandature 2019-2024 du Parlement européen. Rien n’est encore joué et il s’agit maintenant de voir quelle majorité arrivera à se constituer dans l’hémicycle et quel compromis sera trouver entre les groupes politiques. Ces nominations sont capitales puisqu’elles influenceront le travail des commissions parlementaires pendant les cinq années à venir. Rendez-vous ce mercredi 3 juillet pour l’élection du président et des vice-présidents du Parlement.

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