Les futures relations UE – Royaume-Uni
Alors que la Commission présentait le 28 février dernier un projet d’accord de retrait du Royaume-Uni de l’UE, [1] le Parlement a adopté sa position sur un potentiel cadre relatif à leurs relations futures après le Brexit. Il a identifié quatre potentielles orientations pour cette nouvelle relation : défense et affaires étrangères, sécurité intérieure, relations économiques et commerciales et une coopération thématique transfrontalière. Il a également encouragé à instaurer un mécanisme de résolution des différends performant et réaffirmé l’importance du rôle de la Cour de Justice de l’Union européenne. Il a enfin soutenu la proposition de la Commission de fixer la période de transition de l’entrée en vigueur de l’accord de retrait au 31 décembre 2020.
En lien avec le Brexit et suite à la relocalisation de l’Autorité bancaire européenne (ABE) et de l’Agence européenne du médicament (AEM) de Londres vers Paris et Amsterdam, respectivement, en novembre 2017, les députés ont validé le transfert de l’AEM à Amsterdam alors que la construction du bâtiment censé accueillir le siège de l’agence enregistre du retard. Ils ont toutefois réclamé un suivi plus régulier des avancées des travaux et ont déploré le rôle minimal octroyé au Parlement par rapport à la Commission et au Conseil dans le cadre de cette procédure.
Pour un cadre financier pluriannuel (CFP) post-2020 plus ambitieux
Les députés ont appelé à aligner le budget post-2020 de l’UE avec ses objectifs politiques, en complétant les contributions nationales par de nouvelles sources de revenus sous forme de ressources propres (possibles taxes environnementales, sur les transactions financières ou encore dans le numérique) et en finançant de nouvelles priorités (migration, environnement, sécurité), alors que le prochain budget européen devrait être amputé de 10 milliards € à cause du Brexit. Ils ont également proposé une hausse du budget de 1 à 1,3% du PIB européen pour financer les nouvelles ambitions politiques affichées sans sacrifier les politiques agricoles et de cohésion, et à supprimer tout rabais ou exemption favorable à un Etat. Enfin, ils ont soutenu le renforcement de programmes tels qu’Erasmus+, la recherche, le soutien aux PME (Petite et moyenne entreprise) et aux jeunes dans le domaine de l’emploi.
Concernant plus spécifiquement la politique de cohésion, le Parlement veut définir des « stratégies sur mesure » pour les régions les plus en retard (au nombre de 47 en 2017 selon la Commission) et à maintenir le niveau de financement en faveur de cette politique malgré les pressions budgétaires, alors que l’investissement public reste limité par les mesures d’austérité budgétaire dans de nombreux pays. Il propose ainsi de mieux adapter le financement au contexte spécifique des régions les plus pauvres, notamment dans les domaines de l’éducation et de la formation, de l’accès au crédit pour les entreprises, de la qualité de gestion des institutions régionales et dans des secteurs tels que l’économie circulaire, le tourisme et l’agriculture.
La Commission publiera ses propositions en mai prochain et l’objectif est de conclure les négociations Parlement-Commission-Conseil avant les élections européennes de mai 2019.
Liberté de la presse en danger
Suite à l’assassinat du journaliste slovaque Ján Kuciak et de sa compagne Martina Kušnírová, le Parlement a réclamé l’ouverture d’une enquête de l’UE associant Europol et l’OLAF (Office européen de lutte anti-fraude), une meilleure protection juridique nationale et européenne des journalistes et plus largement des lanceurs d’alerte, et un contrôle plus rigoureux de l’utilisation des fonds européens. En effet, le dernier article en projet de Ján Kuciak, publié à titre posthume, portait sur des soupçons d’influence d’organisations criminelles, notamment italiennes, sur une partie de la sphère politique slovaque, et en lien sur une utilisation abusive de fonds européens par ces organisations de connivence avec des politiciens slovaques. Face à la pression de l’opposition et des manifestations de dizaines de milliers de personnes en réaction, le Premier ministre slovaque Robert Fico avait présenté sa démission le 14 mars.
Tensions commerciales et fiscalité des entreprises
En réaction à l’annonce des Etats-Unis relative à l’imposition de droits de douane sur ses importations d’acier et d’aluminium, les députés ont privilégié la recherche de solutions pacifiques à la “surcapacité sidérurgique mondiale”, source de tensions et de pratiques déloyales entre partenaires commerciaux, à la déclaration d’une guerre commerciale contre les Etats-Unis - sauf en cas d’échec durable des discussions et de non-exemption de l’UE de ces droits de douanes. Ils ont également appelé les Etats membres à adopter une position commune, pour protéger efficacement les travailleurs et plus largement citoyens européens.
En parallèle, les députés ont adopté un « projet de régime fiscal européen des sociétés unique » alors que certaines sociétés mettent en place des stratégies d’évitement de paiement de l’impôt sur leurs bénéfices en Europe. Une entreprise pourrait également être taxée du seul fait de ses activités dématérialisées, y compris le traitement de données, sans avoir forcément de structures physiques. Le Parlement a appelé la Commission à définir des critères à ce sujet (par exemple nombre d’utilisateurs, volume de données traitées, etc.). L’objectif final étant d’instaurer des règles fiscales européennes et un guichet unique européen auquel s’adresseraient les entreprises pour payer leurs impôts, qui seraient redistribués entre les Etats membres en fonction de l’activité des entreprises dans chacun d’entre eux. Le député PPE (Parti populaire européen) français Alain Lamassoure a ainsi estimé que ce nouveau système "mettrait également un terme à la concurrence débridée entre les régimes fiscaux des sociétés au sein du marché unique, en ciblant les bénéfices là où ils sont réalisés."
Enfin, le Premier ministre portugais, António Costa, a été le troisième chef d’Etat ou de gouvernement depuis le début de l’année à s’exprimer devant la plénière sur le futur de l’Europe. En soutien à la position du Parlement en faveur d’un budget à long-terme de l’UE accru, António Costa a affirmé que le Portugal était prêt à davantage contribuer au budget. Il a également mis l’accent sur le besoin de cohésion entre et au sein des pays, en faisant référence aux politiques de cohésion et agricole qui rapprochent l’Europe des citoyens au quotidien, ainsi qu’à la « politique d’austérité alternative » appliquée ces dernières années au Portugal et qui a permis au pays de se redresser. Sur ce point, il a mis en évidence la nécessité d’assurer une cohésion économique, sociale et politique en Europe pour restaurer la confiance des citoyens dans celle-ci.
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