Début mars, alors que l’épicentre de la pandémie de Covid19 se déplaçait en Europe, la question du maintien de la session plénière du Parlement européen à Strasbourg s’est posée. Et le président David Sassoli a finalement tranché. La session, raccourcie, a été délocalisée à Bruxelles. Une décision politique qui n’est pas sans conséquences.
David Sassoli s’est voulu rassurant dans un communiqué. Insistant sur le caractère exceptionnel de la mesure, et expliquant que la décision n’avait pas été facile à prendre, il a assuré que « Strasbourg reste et restera le siège du Parlement européen. »
Les prochaines sessions plénières n’auront sans doute pas lieu du tout. Certes, la situation présente un caractère tout à fait inédit. Mais ce cas de figure reste très rare. Une telle délocalisation avait été décidée seulement deux fois par le passé, en 2008 lorsqu’une partie du plafond de l’hémicycle strasbourgeois s’était effondrée. Et cette décision pose une question : Comment sera-t-il alors possible de respecter les traités européens ? C’est le Conseil européen d’Édimbourg qui avait tranché juridiquement le 12 décembre 1992. La décision rendue était claire : Le Parlement européen a son siège à Strasbourg où se tiennent les douze périodes de sessions plénières mensuelles y compris la session budgétaire.
Alors, même si cette délocalisation pouvait sembler s’imposer pour raisons de santé, comment faire pour rattraper les sessions délocalisées ? David Sassoli se montre encore une fois ferme. « Dès que la situation sanitaire nous le permettra, nous ferons tout ce qui est possible pour respecter les engagements des traités européens en ce qui concerne les sessions plénières mensuelles du Parlement européen. »
Les opposants à Strasbourg resurgissent
Évidemment cet état de fait a causé quelques réactions, et notamment celle de l’eurodéputé néerlandais écologiste Bas Eickhout. Celui qui était l’un des spitzenkandidat des Verts aux élections européennes a ainsi posté un message agacé sur Twitter : « Les Français vont-ils insister pour que l’on ait 12 sessions à Strasbourg par an et par conséquent, il y aura beaucoup de sessions à Strasbourg cet automne, ou vont-ils nous laisser tranquilles ? »
Lorsque la première session plénière du mois de mars a été délocalisée à Bruxelles, plusieurs députés européens se sont en revanche montrés opposés à la décision. En France, l’élu des Républicains Arnaud Danjean n’a pas mâché ses mots. « Ridicule, scandaleux, irresponsable (...) En quoi Bruxelles est moins exposée que Strasbourg ? »
Une question que s’est également posé la locale Anne Sander qui estimait que « la logique aurait alors voulu qu’on réclame l’annulation de tous les événements cette semaine de travail en commission parlementaire à Bruxelles ». Désormais, l’institution européenne, qui a malheureusement dû déclarer le 23 mars un premier décès dû au coronavirus, sonne creux.
Si le “débat du siège” est ancien, il revient régulièrement dans l’actualité. Le 2 octobre dernier, c’est une décision de la Cour de justice de l’Union européenne qui avait inquiété ceux qui soutiennent le siège alsacien. Les juges avaient décrété que le Parlement européen pouvait exercer une partie de ses pouvoirs budgétaires à Bruxelles plutôt qu’à Strasbourg si des impératifs liés au bon fonctionnement de la procédure budgétaire l’exigent.
Des municipales encourageantes
En tout cas le prochain maire de Strasbourg sera un défenseur du Parlement. En effet, les quatre candidats sortis en tête du premier tour des municipales revendiquent leur attachement au siège.
Alors que l’eurodéputée Fabienne Keller pointait l’entourage de Jeanne Barseghian, des « députés qui votent contre ou s’abstiennent quand il s’agit de défendre le siège du Parlement européen dans notre ville », celle qui est arrivée largement en tête au premier tour du scrutin strasbourgeois ce 15 mars s’est défendue durant sa campagne : « Nous réaffirmerons la vocation européenne de Strasbourg en soutenant le siège unique du parlement dans notre ville ».
En deuxième position, le candidat soutenu par la République en marche, Alain Fontanel, n’a pas caché ces derniers mois son intention de mettre en avant le côté de « capitale européenne » de la métropole alsacienne. Et inutile de présenter la candidate arrivée troisième de l’élection avec un joli score, Catherine Trautmann, dont la carrière dans les instances européennes -députée européenne durant dix-sept ans - occupe encore tout son esprit. « Si vous étiez un renoncement ? » lui demandait Rue89 Strasbourg. Sa réponse est éloquente. « J’ai renoncé à la partie de ma vie qui était dédiée au Parlement européen. (...) J’ai été très attachée à ce travail. »
Dernier qualifié, le candidat de droite Jean-Philippe Vetter n’est autre que l’attaché parlementaire de l’eurodéputé Geoffroy Didier. “Le fait que le Parlement européen soit à Strasbourg, c’est le symbole de la paix, de la réconciliation !” a-t-il par exemple martelé à l’antenne d’Euradio le 9 mars dernier. Ce sont donc quatre candidats convaincus du bien fondé de maintenir le siège strasbourgeois du Parlement européen qui s’affronteront au second tour des municipales...quand celles-ci pourront se tenir !
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