Suite à l’attaque au couteau de Solingen en Allemagne qui a fait trois morts et huit blessés, le vendredi 23 août, le Parlement européen a organisé le premier débat de la nouvelle législature autour du sujet du terrorisme et de la manière de s’en prémunir. Le titre de la session : “Nécessité de prévenir les menaces pour la sécurité telles que l’attaque de Solingen par la lutte contre la migration clandestine et par des retours effectifs”.
Un titre qui prend déjà parti, pour le bonheur d’un camp, et le malheur de l’autre, comme l’illustre la prise de parole de Mimmo Lucano, du groupe GUE/NGL : “Le titre de ce débat suit une logique qui est, à mon sens, inexacte, et dangereuse, établir le lien entre le terrorisme et l’immigration”.
Le débat a commencé, comme le règlement l’exige au sein de l’hémicycle européen, par une prise de parole de la Commission, ici Mme Ylva Johansson, Commissaire aux Affaires intérieures. Après avoir contextualisé les faits de Solingen, elle a témoigné de sa solidarité envers les victimes, pour enfin rappeler la mise en place du Pacte asile et immigration. Adopté le 14 mai 2024, ce dernier prévoit de traiter une partie des demandes d’asiles aux frontières extérieures de l’Union européenne et d’introduire une solidarité entre États membres si arrivée massive. Après ce coup sifflet, le match entre la droite et la gauche a pu commencer.
Un Parlement presque bipartisan
L’hémicycle n’est pas divisé en deux partis uniques, pourtant, en ce lundi soir, il ressemblait étrangement à un Parlement étatsunien ou britannique. D’un côté, la droite et l’extrême-droite (PPE, PfE et CRE), de l’autre, la gauche (GUE/NGL, S&D, Les verts/ ALE)... Et, perdus au milieu de ce match, les députés du groupe central Renew Europe.
Du côté droit, pour lutter contre le terrorisme, il faut d’abord renforcer le contrôle aux frontières : “Il est crucial que nous rétablissons le contrôle sur nos frontières extérieures”, assène Tomas Tobédu (PPE). “Il faut de plus grands contrôles aux frontières “, abonde Nikola Bartůšek duPfE. “Ce dont nous avons besoin, c’est de protection aux frontières extérieures.”, conclut Mary Khan, CRE.
Ensuite, le bloc de droite propose d’expulser les migrants : “Aucun système d’asile ne peut fonctionner sans politique de retour efficace”, lance Jeroen Lenaers (PPE). Et Jaroslav Bžoch (PfE) d’ajouter : “Nous avons besoin d’une solution, afin que ceux qui entrent sur notre territoire de façon illégale puissent faire l’objet d’un retour”.
"Lutter contre le terrorisme, ce n’est pas lutter contre les étrangers”
Du côté gauche de l’hémicycle, les eurodéputés estiment que "Lutter contre le terrorisme, ce n’est pas lutter contre les étrangers”, résume Matthias Ecke du groupe S&D. “Nous devons être vigilants face aux rhétoriques dangereuses qui utilisent à leur profit leur attaque pour engranger des victoires politiques en diabolisant les migrants.” Tineke Strik, Les Verts/ ALE. Ici, nous pouvons comprendre que Madame Strik s’attaque à ses adversaires de l’hémicycle. Ceux qui, comme vous avez pu le lire plus haut, veulent renforcer les contrôles aux frontières et expulser les migrants dans le but de lutter contre le terrorisme.
Ils proposent ainsi d’autres solutions que celles du bloc de droite. “La meilleure solution à ceux qui veulent nous détruire est de répondre par la justice, le droit, le respect des droits fondamentaux, pas d’embrasser les termes du débat imposés par la droite s” Saskia Bricmont, les Verts/ ALE. “Ce qu’il faut faire, c’est déradicaliser, mettre en place des mesures d’intégrations”. Özlem Demirel, GUE/NGL. “Il faut renforcer la coopération entre les services répressifs et de justice pour lutter contre cette radicalisation. [...] Il faut des mesures visant à renforcer l’intégration” Birgit Sippe, S&D.
Les députés Renew sommés de choisir leur camp
Entre la droite et la gauche qui s’écharpent sans s’écouter, les quelques députés de Renew choisissent un camp ou un autre sans adopter de position centrale. “Beaucoup se radicalisent en Europe, ils ne viennent pas déjà radicalisés” nuance Jan-Christoph Oetjen. Son collègue Engin Eroglu reconnaît, comme la droite, un besoin de renforcer les contrôles aux frontières, et notamment l’agence Frontex, arguant qu’on “ne peut pas laisser des trous dans la raquette”.
Finalement, les députés centristes ne sont pas si perdus - et finissent par choisir leur camp. La traditionnelle diversité politique du Parlement européen semble s’arrêter au débat sur l’immigration.
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