De médecin à ministre de la Défense
Diplômée de médecine en 1991, Ursula von der Leyen est femme au foyer entre 1992 et 1996 suite à la naissance de ses jumelles, pendant que son mari est membre du corps facultaire à l’université de Stanford, en Californie.
De retour en Allemagne, elle occupe ensuite le poste d’assistante chercheuse au sein du département d’épidémiologie, de médecine sociale et de recherche sur les systèmes de santé à l’université de médecine de Hanovre de 1998 à 2002.
Elle s’engage ensuite en politique en devenant membre du CDU, l’Union Chrétienne Démocrate d’Allemagne, dont son père, Ernst Albrecht, a été vice-président fédéral.
En 2003, elle démarre sa carrière politique. Elle est élue députée au Landtag (assemblée parlementaire) de Basse-Saxe. Elle sera ensuite ministre des Affaires sociales, de la condition féminine, de la famille et de la santé du même Land avant d’entrer au gouvernement fédéral en 2005, dirigé par la Chancelière Angela Merkel. Elle y elle occupera le poste de ministre de la Famille, des personnes âgées, de la condition féminine et de la jeunesse.
Mère de sept enfants, elle met en place une politique familiale innovante avec notamment la création d’un salaire parental allant jusqu’à 1 800 euros par mois, une première en Allemagne.
Puis elle occupe le poste de ministre du Travail et des Affaires sociales de 2009 à 2013 et continue son ascension politique en étant nommée ministre de la Défense en 2013.
Elle met alors fin aux hommages faits aux officiers ayant servi Hitler et affiche une bonne entente avec Emmanuel Macron lorsque celui-ci devient Président. Cependant son ministère est éclaboussé de plusieurs scandales : matériels obsolètes de l’armée, sous-investissements ou encore experts surpayés, en faisant ainsi l’une des ministres les moins populaires du gouvernement.
Un équilibre politique difficile à trouver
Le Parlement européen élit l’Allemande le 27 novembre 2019 avec 461 votes ‘pour’, 157 ‘contre’ et 89 abstentions. Sa prise de fonction officielle se fait le 1er décembre 2019, un mois après la date initialement fixée.
Si le parti conservateur, dont elle est issue, reste majoritaire, il est tout de même en perte de vitesse (182 sièges contre 221 en 2018). Idem pour le deuxième parti traditionnel, celui des sociaux démocrates (154 sièges contre 191 précédemment). Ils sont en effet suivis de près par les Libéraux de Renew Europe (108 sièges), dont fait partie La République en Marche, et le groupe des Verts/ALE (74 sièges). Les élections de mai 2019 ont également été caractérisées par une forte montée des partis populistes : le groupe d’extrême droite Identité & Démocratie (73 sièges), les souverainistes du groupe CRE (62 sièges) et la gauche radicale (GUE/NGL, 41 sièges). Ursula von der Leyen devra donc composer avec ces nouveaux arrivants.
Une feuille de route ambitieuse
Une fois élue, elle a ouvert son discours en citant Václav Havel : « work for something because it is good, not just because it stands a chance to succeed. » (1) Elle a indiqué avoir choisi cette citation car dans les cinq ans à venir, l’Union européenne va opérer une transformation qui touchera chaque pan de la société et de l’économie. Cette transformation se fera, a-t-elle ajouté, parce qu’elle est juste, pas parce qu’elle est facile. (2)
Son programme pour les cinq ans à venir se décline en six grands thèmes. Sa priorité ? Un « Green Deal » européen, avec pour objectif que l’Union européenne soit le premier continent neutre en carbone en 2050. Il y a urgence, c’est pourquoi elle s’est engagée à soumettre ce « Green Deal » dans les 100 premiers jours de sa présidence. C’est Frans Timmermans, nommé Vice-Président de la Commission, qui est en charge du dossier.
Le deuxième élément concerne une économie inclusive, porté par Paolo Gentiloni et Vladis Dombrovskis. Ces derniers devront par exemple plancher sur un salaire minimum européen et accompagner les nouvelles formes d’emploi, sans laisser personne « sur le banc de touche ».
En troisième lieu, Ursula von der Leyen souhaite une Europe adaptée à l’ère du numérique : l’Union européenne doit bénéficier des opportunités liées aux nouvelles technologies en toute sécurité et dans le respect de l’éthique. C’est Margrethe Vestager, figure emblématique de la Commission Juncker (elle est celle qui a infligé des amendes record à Google et Amazon), qui en sera la chef de file.
Vient ensuite ce qu’elle avait nommé la « protection du mode de vie européen », expression vivement critiquée : cette thématique couvre en effet l’immigration, donnant au programme des allures d’extrême droite. L’Union européenne doit continuer à véhiculer des valeurs de tolérance ; cet intitulé a donc finalement été transformé en « promotion du mode de vie européen », afin d’éviter tout amalgame.
Pour continuer, le plan comporte un volet pour une Europe plus forte, qui se veut la garante de l’ordre mondial à travers notamment la signature d’accords commerciaux qui soient respectueux de l’environnement et des conditions des travailleurs.
Enfin, Ursula von der Leyen veut renforcer la démocratie européenne : elle cite notamment la mise en place dès 2020 d’une Conférence sur le futur de l’Europe qui permette aux citoyens, et plus particulièrement aux jeunes, d’exprimer leurs opinions auprès des institutions.
Le plus dur reste à venir pour la première femme à la tête de la Commission européenne. Son programme prend bien la mesure des enjeux de notre temps : l’urgence climatique, la protection des travailleurs et les nouvelles technologies font ainsi partie des priorités de sa feuille de route.
Cependant, il lui faudra composer avec de nouveaux arrivants dans l’hémicycle strasbourgeois, dont certains sont eurosceptiques, et trouver un équilibre dans un contexte où les intérêts des États membres diffèrent sur nombre de sujets. Elle en a bien conscience et semble déterminée à aller jusqu’au bout. À nous, citoyens européens, de veiller à ce qu’elle tienne ses promesses.
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