Un soutien apporté à l’industrie européenne de défense.
Face à la montée des tensions dans le Proche-Orient et à la guerre en Ukraine “qui change le paradigme sécuritaire en Europe”, il est aujourd’hui nécessaire d’adapter notre économie, et l’industrie de la défense en premier lieu. C’est le sens des annonces faites par Thierry Breton, qui a d’abord souligné dans son discours le succès du Fonds européen de défense, une enveloppe commune destinée à financer la recherche et le développement de programmes industriels dans le domaine de la défense. Ce fonds a déjà permis, selon le commissaire, “le développement de véritables chaînes d’approvisionnement européennes”. Cette enveloppe (7,9 milliards d’euros pour la période budgétaire 2021-2027) prévoit ainsi 300 millions d’euros pour “des acquisitions conjointes” et 500 millions d’euros pour renforcer la production de munitions. Dessinant les contours d’une “stratégie industrielle européenne de défense”, Thierry Breton a finalement affirmé que nous devons désormais “produire plus et plus vite, et ne pas dépendre des autres”. Une déclaration en écho à celle de Petr Pavel, le Président tchèque qui affirmait le 3 octobre dernier que l’Europe devait réduire “sa dépendance [en matière de défense] à l’égard des Etats-Unis”.
Une volonté claire de “protéger nos zones contestées”.
Si le soutien au secteur industriel est nécessaire, la Commission européenne n’est pas en reste en matière d’initiatives qui forment, pour Thierry Breton, “une doctrine européenne de défense”. Quatres enjeux de défense européenne ont ainsi été défendus lors du discours : la cyberdéfense, le spatial et les mobilités aériennes et maritimes. Concernant la cyberdéfense, la création d’un “cyber-bouclier” destiné à détecter des cyber-attaques contre des Etats-membres devrait être mis en place dans le sillage du Cyber Solidarity Act. Ce programme, élaboré peu après l’invasion russe de l’Ukraine en 2022, prévoit une coordination européenne accrue entre les secteurs public et privé en ce qui concerne l’anticipation et la lutte contre les cyberattaques. Les infrastructures européennes spatiales ensuite (Galileo, Copernicus et l’IRIS2) devraient également bénéficier d’un soutien massif. Finalement, c’est au sujet des mobilités maritimes et aériennes que le discours a fait le plus réagir. En effet, Thierry Breton a exposé l’ambition européenne de créer, le moment venu, “un véritable bouclier européen de défense aérienne et antimissile - un Eurodôme” et a exhumé le projet d’un porte-avions européen. Celui-ci pourrait potentiellement contribuer à la “protection des fonds marins et des infrastructures critiques (comme les câbles)” présents dans la ZEE européenne.
Ce projet de porte-avions européen suscite cependant des critiques et des questions.
En effet, si un porte-avions européen voit le jour, cela pourrait être considéré comme une avancée majeure et décisive dans le projet d’une défense commune européenne, et même plus globalement dans la construction européenne. Cependant, qui dirigerait les manœuvres de ce porte-avions ? La Commission, le Conseil européen, les Etats à tour de rôle ? Et puis qui seront les marins à bord ? Des militaires des Etats membres ou bien des hommes directement rattachés aux instances de l’Union ? En somme, des questions restent en suspens quant aux questions pratiques et relatives à ce porte-avions, qui ne pourrait de toute façon pas voir le jour sans une avancée majeure quant à la politique de défense commune.
Toujours en est il que l’affirmation de l’Union européenne comme puissance politique et militaire incontournable germe incontestablement tant dans l’esprit des autorités européennes que dans le débat public, et ce, encore plus depuis la guerre en Ukraine.
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