Les nombreuses révolutions de 1989 ont conduit de nombreux pays du Centre et de l’Est de l’Europe à reprendre leurs relations avec leurs voisins tant redoutés pendant la Guerre froide. Certains gouvernements visent une coopération étroite avec l’Union européenne ; d’autres s’y approchent à des petits pas, à cause des récents traumatismes d’une organisation régionale vendant le rêve d’une coopération, mais n’illustrant en réalité que l’hégémonie d’un vaste pays.
Néanmoins, le rapprochement de ces pays de l’Union européenne n’a pas été régi que par la volonté de leur peuple. Le grand frère russe a veillé pendant longtemps sur leurs relations externes, puisque les apparatchiks dévoués à la cause soviétique sont restés dans les couloirs des institutions situées dans l’immédiat de la Place rouge. Et comme tous les grands frères, celui-ci dispose de nombreux subterfuges afin de cantonner la volonté de ses cadets.
Mais le grand frère russe, en pleine puberté après l’éclatement de l’URSS, a fini par gagner en maturité, en adoptant un comportement plus tempéré lors des soirées internationales. Mais son changement est dû surtout à une révolution qui a gagné ce pays dès 2024, où le peuple avait réussi à se défaire d’un régime tyrannique et oligarque.
Pour que les changements sur la scène européenne surviennent dans ce troisième millénaire, un rôle très important est attribué à la révolution verte, qui gagne le continent à une force vertigineuse après les années Covid-19. Le peuple prend de plus en plus conscience du péril de sa survie et entame une décarbonisation accélérée, renonçant plus rapidement que prévu aux énergies fossiles et en adoptant des énergies renouvelables. La Russie, affaiblie de par son grand attachement au gaz, a eu du mal à s’adapter. De plus, du fait de la libération énergétique des pays européens, les États de l’Est non encore membres de l’UE ont pu assumer leur choix d’une politique externe plus librement.
L’Union européenne se montre de plus en plus ouverte à un élargissement vers l’Est, qui n’est en réalité que l’aboutissement naturel du projet européen initial, qui vise à faire régner la paix sur le Vieux continent. En outre, grâce au Partenariat Oriental, lancé lors du Sommet de Prague du 7 mai 2009, les cinq pays visés par ce projet ont pu coopérer avec l’UE d’une manière plus étroite, après la sortie du Bélarus de ce même Partenariat en 2021.
En outre, la ferveur de la démocratie avait gagné l’esprit de ces peuples oppressés durant des décennies. L’État de droit et le respect des droits humains deviennent des valeurs importantes pour ces citoyens, qui ont manifesté leur mécontentement dans la rue dès qu’il y eut nécessité. Et petit à petit, la scène politique des pays de l’Est a été renouvelée pour défendre les idéaux poursuivis par les peuples et pour renforcer leurs systèmes en s’approchant davantage de l’Union européenne, qui incarne sur le continent les valeurs de paix, État de droit et respect des droits humains. Mais à chaque pays, son propre rythme...
La Moldavie
Durant des décennies, ce pays a souffert à cause d’une grande plaie ouverte difficile à cautériser. La Transnistrie, qui a accueilli pendant fort longtemps la quinzième armée russe, a été toujours un grand point de discorde lors des pourparlers entre la Moldavie et la Russie. Parmi les nombreuses solutions proposées, il y a eu notamment la fédéralisation de ce petit pays qui n’a guère convenu au peuple moldave qui avait manifesté notamment en 2003 contre le plan russe Kozak imposant cette solution. Il y a une association forte de l’idée du fédéralisme à l’organisation de l’URSS et de la Russie actuelle.C’est grâce à une organisation régionalisée de la Moldavie, ainsi qu’à un relâchement de l’influence russe dans la Transnistrie qu’un consensus interne se concrétise.
Avant même de la cristallisation de ce conflit, les pourparlers en vue de l’adhésion de la Moldavie à l’Union européenne ont été entamés dès 2024, avec un gouvernement et une présidence très pro-européenne conduite par Maia Sandu. L’exode de beaucoup de Moldaves dans l’UE à partir des années 2010 a énormément contribué à accroître le sentiment d’adhésion de la population au projet européen.
L’Ukraine
La révolution de Maïdan de 2014 et les crises de la Crimée et du Donbass ont représenté une énorme fracture dans les relations entretenues par l’Ukraine avec la Russie. La grande diaspora ukrainienne dans l’Union européenne, notamment en Pologne, a énormément contribué au parcours combattant du pays vers une adhésion au projet européen.
Au début, le grand coup de frein pour le rapprochement de l’Ukraine de l’Union a été donné par la Russie, qui invoque souvent le berceau mythique des slaves du Nord : la Kiévie. Néanmoins, la défaite de Poutine en 2024, qui vient après quatre ans de ferventes manifestations, amène au pouvoir un dirigeant plus pacifique, qui oriente sa politique davantage sur les affaires intérieures que sur celles étrangères.
Dès lors, l’Ukraine a pu se porter finalement candidate pour adhérer à l’Union européenne dès 2026, car l’épée de Damoclès tombe sans faire de victime en 2024.
Le Bélarus
Le Bélarus est le grand pays secoué par une énorme crise politique qui a débuté en 2020 avec les fraudes électorales ayant conduit Alexandre Loukachenko à décrocher son sixième mandat. Énormément de jeunes opposants, dont Svetlana Tikhanovskaïa, se sont exilés dans des pays européens, notamment en Lituanie et en Pologne. Ainsi se sont développés simultanément un sentiment pro-européen et anti-Kremlin conduit par Poutine, qui a joué un grand rôle dans les répressions des manifestations de 2020.
Une fois la crise sanitaire résolue, l’UE fait de l’État de droit en Bélarus une de ses priorités fondamentales. Les opposants exilés reviennent dans leur pays et réussissent à démettre du pouvoir le vieux Gargantua soviétique. Les pro-européens de retour de leur exil politique sortent le pays de son isolationnisme continental et débutent principalement par l’importante signature et ratification de la Convention Européenne des droits de l’Homme en 2026, après une réadhésion au Partenariat Oriental. De nombreuses réformes et dix ans après cette ratification, le pays est finalement prêt à se porter candidat pour négocier son adhésion à l’Union européenne.
L’affirmation de l’européanité de la Transcaucasie avec le conflit du Haut-Karabagh
La guerre de 2020 au Haut-Karabagh et des fortes tensions dans la région ont représenté une vraie prise en considération de l’importance de la paix dans le Caucase.
Préoccupés par la pandémie en automne 2020, les pays européens n’ont pas été assez fermes, et les deux principaux pays soutenant les belligérants - la Russie et la Turquie - ont continué à ajouter de l’huile sur le feu. Le conflit éclate de plus belle et les pays européens s’accordent enfin sur le besoin fondamental d’intervenir dans la région, sur le fond d’un intense débat sur la création de l’armée européenne. Heureusement, la situation se calme rapidement avec une intervention diplomatique qui conduit à des négociations qui dureront longtemps.
Les négociations sont accompagnées d’un processus de dialogue entre les citoyens des deux peuples concernés les plus affectés par les conflits. Ce dialogue accompagné par la résilience caractéristique aux peuples ayant traversé la guerre aboutissent à un accord européen inspiré par l’esprit des textes fondateurs de l’Union européenne. Dès la fin des années 2020, on constate que l’Arménie et l’Azerbaïdjan peuvent rejoindre l’UE. Une intégration économique poussée devrait avoir le même effet curatif que pour le couple franco-allemand après la Seconde Guerre mondiale. Leur candidature a été officialisée dès 2031 et les négociations sont en cours en 2036.
Enfin, quant au voisin géorgien, il n’a jamais arrêté son rêve européen depuis la signature de son Accord d’Association avec l’UE. La Géorgie est traversée par des nombreuses crises politiques au début des années 2020, du fait des soubresauts russes et de l’espoir de voir cicatriser enfin ses plaies ossètes et abkhazes. Mais les multiples réformes et la forte adhésion des Géorgiens au projet européen portent les fruits pour ce pays caucasien, qui devient candidat à l’adhésion européenne dès 2028.
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