Un podium très serré pour les législatives en Finlande

, par Alexis Vannier

Un podium très serré pour les législatives en Finlande
Eduskunta, Parlement finlandais Source : Paul Brachet

Un mois après l’Estonie, c’est un autre voisin de la Russie qui renouvelle démocratiquement son Parlement. Et ce premier week-end d’avril était particulièrement chargé électoralement en Europe : des régionales en Frioul-Vénétie julienne, trois cantonales en Suisse, des législatives en Andorre et en Bulgarie (les 5ème en deux ans…) et une présidentielle au Monténégro. Les Finlandais, eux, étaient appelés à élire les 200 députés de l’Eduskunta, le Parlement local.

Des Finlandais partagés

Au coup de sifflet final, peu de changement par rapport au scrutin de 2019 : unpoint seulement sépare les trois partis arrivés sur le podium. Comme attendu, le Parti de la coalition nationale (Kokoomus, de droite) redresse la tête et parvient à convaincre 20,8% des électeurs. Légère remontée du côté des sociaux-démocrates (SDP), actuellement au pouvoir : 19,9% des voix leur ont été attribuées, soit 3 points de plus qu’en 2019. Même tendance pour la droite radicale des Vrais Finlandais (PS) qui gagne 7 points pour totaliser 20% des voix. Un mouchoir de poche donc entre une gauche sociale-démocrate progressiste, une droite conservatrice libérale et une droite radicale farouchement nationaliste.

Dans le ventre mou du peloton, aux alentours des 8-10% des voix, on retrouve les partenaires de coalition du gouvernement sortant avec le Centre (Kesk) qui continue sa dégringolade, les écologistes de la Ligue Verte (Vihr) qui peinent à élargir leur base et l’Alliance de gauche (Vas), un parti de gauche radicale qui réussit à se stabiliser.

Enfin en queue de peloton, peu de changement également, la minorité suédophone s’est mobilisée pour son parti, le SFP égalise son score de 2019 avec 4,3% des voix, les chrétiens-démocrates en font autant sous la barre de 5% alors que la lanterne rouge est encore attribuée au Mouvement maintenant, des libéraux sortant tout juste la tête de l’eau avec un peu plus de 2,4% des votes.

La coalition pentapartite ressortait affaiblie de mois de tension entre la Ligue verte et le Centre, ce dernier ayant, pour des raisons financières, réduit la portée d’une loi sur la protection des domaines forestiers dans un pays couvert à plus de 70% de fôrets.

Défense et finances au menu

Sans surprise, la guerre en Ukraine et les conséquences ont dominé les débats législatifs durant la campagne. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si tous les partis soutiennent l’adhésion de leur pays à l’OTAN. La Turquie a d’ailleurs tout récemment levé son veto, suivie par la Hongrie. Si la neutralité prévalait à Helsinki depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la guerre de Moscou a poussé la Finlande dans les bras de l’OTAN, par peur du dirigeant russe.

Le gouvernement de Sanna Marin a par ailleurs lancé la construction le long de la frontière avec le voisin russe d’une barrière de 200 km au total (sur les 1340 km qui séparent bien plus que deux pays), une décision soutenue par la très grande majorité des Finlandais.

La campagne ne s’est toutefois pas résumée à la seule guerre en Ukraine. Quand les sociaux-démocrates axaient leur campagne sur des mesures favorables à la création d’emploi et à l’augmentation des budgets sociaux dans un climat de crise du pouvoir d’achat, les Vrais Finlandais mettaient l’accent sur la rénovation des services publics. Le centre (droit et gauche), menaient campagne sur l’assainissement des finances du pays.

Un faux départ pour un gouvernement jeune et féminin

Le podium des élections de 2019 s’est joué à 0,73% des voix : le SDP à 17,73% des voix et 40 sièges (soit 6 de plus que lors de la précédente législature), les Vrais Finlandais à 17,48% et 39 sièges et la Coalition nationale à 17% et 38 sièges. Le Centre s’était effondré en perdant près de 7 points (et 18 sièges) et recueillant 13% des votes. La Ligue Verte et l’Alliance de gauche, chacune en hausse, occuperaient désormais respectivement 20 et 16 strapontins. 9 sièges avaient alors été attribués à la minorité suédoise.

Antti Rinne, chef de file du PSD, monte alors une coalition à 5 avec le centre, les écologistes et les suédophones. Rapidement néanmoins, une crise explose quand la ministre des réformes est accusée d’avoir menti par omission sur un projet de précarisation des emplois dans le service national de la poste. Additionnée à un manque de confiance évoqué par le Parti du Centre à l’encontre du Premier ministre Rinne, le gouvernement est emporté par une motion de censure. La jeune Sanna Marin est alors appelée en urgence pour tenter de préserver la grande coalition. gée de 34 ans, elle devient la plus jeune dirigeante du monde d’un gouvernement dont les cinq partis sont dirigés par des femmes, dont 4 ont moins de 35 ans. Les attentes sont alors nombreuses.

Un “scandale” avait d’ailleurs éclaté à l’été 2022 quand une vidéo privée avait été publiée montrant la Première ministre en train de danser à une fête. L’opposition, ulcérée, avait crié au manque de déontologie et réclamé un test antidrogue. Plusieurs médias avaient fait le parallèle avec ce qui avait été reproché à Boris Johnson, ex-Premier ministre britannique, qui avait participé à des fêtes incluant des membres du gouvernement en pleine pandémie de Covid-19, aucun test antidrogue n’avait alors été exigé. Sanna Marin avait alors accepté de se soumettre à un tel test, test s’avérant négatif.

Sa gestion de la crise liée au Covid-19 a été saluée par les Finlandais et les autorités sanitaires mondiales. Sa politique environnementale est souvent qualifiée d’ambitieuse, son gouvernement milite pour une taxation européenne sur l’aviation. Par ailleurs c’est sous son gouvernement qu’est inaugurée le premier site d’enfouissement définitif des déchets nucléaires du monde. Située à Olikuoto dans l’ouest du pays, la station sera enterrée à 500 mètres de profondeur avec des murs épais d’1,30 mètre. Pays du Nord, la Finlande reste adepte d’une certaine mesure quant à l’approfondissement de l’acquis européen, notamment s’agissant de la mise en commun de la dette.

Gageons que les négociations pour former un gouvernement stable s’annoncent d’ores et déjà longues.

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Vos commentaires
  • Le 4 avril 2023 à 15:48, par Bernard Diry En réponse à : Un podium très serré pour les législatives en Finlande

    Un article clair, pédagogique et agréable à lire pour quelqu’un qui n’est pas un spécialiste de ce pays... Merci.

  • Le 4 avril 2023 à 17:26, par Lalliot En réponse à : Un podium très serré pour les législatives en Finlande

    La finlande est découverte sur son côté politique , tres édifiant .. là aussi les femmes n’ont pas le droit d’exprimer leur joie de vivre ( Marlene ) la ministre française secouée par ses photos ds une revue !! Et poutant ds cette période de crise , la gaieté , la joie de vivre est prioritaire, pour les jeunes générations .. Arlette grand mere de 9 petits enfants ..

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