« Virtute et constantia » : histoire du drapeau de Malte

, par Alexis Vannier

« Virtute et constantia » : histoire du drapeau de Malte
Source Pixabay

« Par le courage et la constance », Malte affiche ses couleurs, et plus particulièrement le 21 septembre, jour de fête nationale. Aux portes de l’Europe, Malte devient une république parlementaire en 1974 en se débarrassant des vestiges de l’occupation britannique (Elizabeth II a été remplacée à la tête de l’État par un dirigeant national), dix ans après son indépendance. Il fait partie des derniers États européens où le bipartisme n’est pas mort : Travaillistes (Partit Laburista) et Conservateurs (Partit Nazzjonalista) s’échangent les rênes du pouvoir depuis les années 1950. Bien intégré dans l’espace européen, Malte a notamment opéré ces dernières années une refonte de sa législation envers les minorités sexuelles, en dépit d’une Église très présente dans le champ politique.

L’histoire ancienne du « Rouge et blanc »

Les couleurs sont un rappel évident de la bannière de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, confrérie religieuse et militaire active notamment durant les Croisades. La première utilisation d’un pavillon reprenant le design actuel, sans la croix, remonte à 1091 alors que l’île est occupée par les Normands, déjà maîtres de la Sicile voisine et de l’Italie méridionale. Malte est en effet située sur leur route vers Antioche et Lattaquié au Proche-Orient. Plus tard, lors de l’occupation napoléonienne, Malte arbore pour un temps le tricolore bleu-blanc-rouge. Les habitants se débarrassent cependant rapidement de ce drapeau tant ils haïssent les Français à l’avènement de la souveraineté du Corsicain. Des impériaux en chassant d’autres, la couronne anglaise récupère l’île méditerranéenne et impose un format de pavillon identique à toutes les colonies anglaises : fond bleu foncé, Union Jack dans le quartier supérieur côté hampe et les armoiries locales côté flottant. Pour Malte ce sera un bouclier rouge et blanc arboré d’une croix de Malte, croix qui sera supprimée en 1898 face aux flambées indépendantistes de certains locaux. À l’indépendance du pays en 1946, l’île arbore pour la première fois son bicolore rouge et blanc orné de la Croix de Saint-Georges, officiellement adopté en même temps que la Constitution le 21 décembre de la même année.

Une bravoure affichée

Les couleurs blanche et rouge sont donc issues de la bannière des Hospitaliers dite « de gueules à la croix latine d’argent », « de gueules » signifiant le rouge, pour le sang du Christ et la guerre, le blanc pour la paix divine. Guerre et paix sont donc affichées ensemble sur le même drapeau. Malte est l’un des seuls États dans le monde à arborer un drapeau avec deux couleurs disposées verticalement. Les deux autres sont les pétromonarchies du Golfe persique, le Bahreïn et le Qatar, bien que les couleurs soient divisées par une ligne dentelée. La particularité de ce drapeau tient aussi au symbole frappé sur le quartier supérieur côté hampe. Durant la Seconde guerre mondiale, l’île, encore sous domination britannique, est pilonnée par les puissances de l’Axe qui veulent établir un point de ravitaillement pour mener leurs campagnes en Afrique du Nord. En plus d’un blocus total, ce ne sont pas moins de 16 000 tonnes de bombes qui sont larguées sur Malte, faisant plus de 2000 morts. L’archipel maltais fait cependant preuve d’un courage sans borne et résiste aux velléités de l’ennemi. Le surnom de « porte-avions insubmersible » de la Méditerranée sera alors attribué à Malte. Pour récompenser les actes de courage et de bravoure des civils maltais, le roi George VI décerne sa médaille, “For gallantry”, la George Cross, au peuple maltais qui décide de l’afficher symboliquement sur son pavillon national. La croix de l’Ordre de Malte se retrouve, elle, sur le pavillon marchand maltais.

Un drapeau à manipuler avec précaution

Qu’elles soient officielles ou non, les règles régissant l’usage de l’étendard national sont strictes. La coutume exige par exemple que le drapeau ne flotte qu’entre aube et crépuscule, et la nuit seulement s’il est illuminé. Il doit également être hissé tous les jours sur les bâtiments publics, y compris les écoles. À l’extérieur de ceux-ci, il ne peut flotter que seul : le drapeau européen l’accompagne seulement à l’intérieur par exemple. En cas d’atteinte à l’intégrité du drapeau, la loi prévoit des sanctions lourdes pouvant aller à de la prison ; la liberté d’expression s’arrête donc au pied du mât de la République. Le Président de la République ainsi que le chef du Commonwealth disposent tous deux de leur propre drapeau. Plus petit État de l’Union européenne, Malte ne tient pas moins à préserver ses symboles, preuves d’une histoire riche d‘invasions, de résistance et de bravoure, née en partie d’une situation géographique stratégique, et qui le place aujourd’hui en première ligne face à la crise migratoire.

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