Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

, par Florian Brunner

Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe
Vladimir Poutine mène des frappes aériennes en Syrie, pas uniquement contre Daesh, mais également contre l’opposition modérée à Bachar Al-Assad. - Global Panorama

Vladimir Poutine a engagé son aviation dans la lutte contre Daesh, en s’alliant directement au dictateur syrien Bachar al-Assad. En choisissant d’intervenir frontalement, sans se soucier de l’impact de son action et des forces occidentales en présence, Poutine a adopté une stratégie digne de celle de George W. Bush en 2003. Alors que tous les acteurs occidentaux tentaient d’éviter le fiasco d’un scénario irakien, Poutine opère une dangereuse opération, au risque d’un embourbement.

« La solution militaire n’est pas la bonne parce qu’elle accroît la capacité du virus à se mobiliser. On accroît le recrutement extérieur (de Daech), on accroît l’adhésion des populations sunnites sur le plan local, et on multiplie la capacité de Daech à agir dans les pays voisins »

Dominique De Villepin

L’ingérence russe en Syrie : un choix militaire à courte vue, digne de George W. Bush

Vladimir Poutine a lancé une opération de frappes militaires en Syrie. Lui qui critiquait tant l’ingérence occidentale mène une action qui sert directement et clairement les intérêts russes, sans se soucier des répercussions sur les équilibres du Moyen-Orient. Poutine adopte la stratégie qu’il a tant dénoncé chez les américains : un affrontement direct, frontal, purement militaire, pour combattre le « mal absolu ». Le dirigeant russe fonde son action sur un système de pensée proche de George W. Bush. Conservateur, fermement chrétien, Poutine, tel Bush lors de l’intervention américaine en Irak, enclenche un affrontement direct avec l’Islam radical, tendant encore une fois à la guerre de religion. Poutine, en croisé des « valeurs chrétiennes », voilà un positionnement très périlleux.

Le monde de Yalta : un fiasco géopolitique

L’argumentation de Poutine, notamment dans son dernier discours à l’ONU, se fonde sur l’exemple de l’issue de la seconde guerre mondiale. En réalité, même si le nazisme a été vaincu, les conséquences du partage final, incarné par la conférence de Yalta, ont été catastrophiques. Une Europe coupée en deux, des peuples soumis à la tyrannie russe, une guerre prétendument « froide » qui n’en finissait pas. Non les suites de la coalition contre le nazisme n’ont pas été brillantes. L’Occident avait réussi à battre un ennemi pour en créer un nouveau, beaucoup plus solide et fort : l’URSS. Le cynisme d’un Roosevelt malade et épuisé a engendré un effet en chaîne désastreux qui ne fût brisé que par la chute de l’URSS. Le Général De Gaulle avait condamné ce processus de Yalta duquel il avait été écarté et avait continuellement lutté contre cette séparation du monde en deux blocs, qui conduira à des conflits désastreux comme au Viêt Nam ou en Afghanistan. La seconde guerre mondiale est l’exemple parfait d’une guerre où la paix n’a pas été pensée, où la paix a été ratée.

Un axe Russie – Iran dangereux

Le régime de Bachar al-Assad a dès 2003 collaboré avec les djihadistes en Irak. En 2011, Bachar al-Assad a préféré libérer des détenus djihadistes, voire favoriser leur développement, afin de contrer les manifestations. De manifestations pacifiques pour changer de régime, nous sommes passés à un Etat en guerre civile où Daesh a trouvé le bon environnement pour croître. Le régime syrien n’a cessé de reculer face à l’offensive des djihadistes. L’échec militaire d’Assad est flagrant. Dans ce contexte, Poutine tente de sauver un allié à l’agonie, en frappant tout ce qui s’oppose à cet allié : rebelles modérés et djihadistes. Un axe Russie – Iran pro-chiite se structure, en soutien au régime d’Assad. Cela ne fera qu’accroître l’opposition entre sunnites et chiites et renforcera Daesh dans son rôle de marqueur de l’identité sunnite. Et nous nous retrouvons au cœur des enjeux : la radicalisation des sunnites en Syrie.

L’intervention russe, en gardant la même logique, ne fera qu’accroître les divisions et les luttes communautaires. La Russie est en train de se piéger elle-même, dans une escalade militaire, et risque un embourbement dangereux en Syrie. Une escalade qui accélérera les violences, qui accroîtra les tensions et qui amplifiera la fuite des populations vers l’Union européenne.

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Vos commentaires
  • Le 7 octobre 2015 à 11:26, par Pamphile En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Votre titre en dit long...

    Florian Brunner Membre des Jeunes Européens - Strasbourg, membre du Parti Démocrate Européen (PDE/EDP).

    Et si vous faisiez un article sur l’intervention de la France en Libye. L’Etat du pays avant, l’état du pays maintenant. La liste des sociétés nouvellement installés et la population qui fuit le pays maintenant. Sur les 50000 morts civils issus des bombardements français. Et de François Hollande qui déclare ne pas être responsable car ce n’était pas lui le président.

    Si vous étiez intelligent vous feriez la synthèse de toute la merde que les USA et la France on créé ces 20 dernières années et ce que la Russie à créé comme merde.

    Tenez pour votre culture... A moins qui votre âme soit déjà celle du diable... http://www.lefigaro.fr/international/2012/06/02/01003-20120602ARTFIG00001-syrie-dialogue-muscle-entre-hollande-et-poutine.php

  • Le 7 octobre 2015 à 11:32, par Altair En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Non mais il faut arrêter le délire ... Vladimir Poutine est un allié de la Syrie qui lui à demandé son soutient ...

    Rien avoir avec les interventions illégales des USA sous George Bush Jr dans de nombreux pays du moyen-orient !

    Heureusement que la propagande ne tue pas !

  • Le 7 octobre 2015 à 12:51, par Hervé Moritz En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Le dialogue est possible s’il reste courtois. Merci d’employer des termes respectables.

  • Le 7 octobre 2015 à 13:21, par Sambuc En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Article de Propagane. Poutine n’a rien à voir avec Bush. Ce sont les américains et la France alliés avec l’Arabie Saoudite et Israel qui ont provoqué le désastre actuel au Moyen Orient.

  • Le 7 octobre 2015 à 13:44, par Boulanger En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    La comparaison est totalement absurde. Le Kremlin a reçu l’aval de la Douma (élu à la proportionnelle, contrairement à la France, l’Angleterre et les USA qui donnent constamment des leçons de démocratie), pour venir en aide militairement à un gouvernement légitime, d’un Etat reconnu depuis le début de l’ONU. Bush est intervenu contre la volonté du Conseil de sécurité de l’ONU, et contre l’avis d’aucun pays attaqué par l’Irak (d’ailleurs en ce qui concerne son père, l’histoire du Koweït était un guêt-apens). A propos du prétendu conflit chiites/sunnites, vous le surestimez à votre guise comme Zemmour, ce qui est assez croustillant pour un centriste pro-européen. Il y a des sunnites aux côtés d’Assad, comme parmi les résistants au Yemen dont personne ne parle. Poutine a bien sûr l’aval de tous ceux qui le soutiennent en Russie et en Europe, et sans doute des ultra-nationalistes qui constituent la majorité de son opposition. Je ne pense pas que les communistes soient contre, tant que ça ne dure pas longtemps et ne ruine pas le pays. Quand aux objectifs militaires, si ces frappes aériennes dans une zone finalement peu large, souvent désertique et facile à déterminer, sont accompagnées comme prévu d’une contre-offensive terrestre épaulée par le Hezbollah, on peut facilement imaginer que cette bande de mercenaires étrangers qui n’avaient jamais mis les pieds dans la région avant, que constitue Daesh, sera plus rapidement mise hors d’état de nuire que des montagnards afghans...

  • Le 7 octobre 2015 à 13:58, par Pima En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Pour l’instant, je ne vois pas de diférence entre l’intervention aérienne de russes et l’intervention des occidentaux - la seule chose c’est que manifestement ils n’ont pas pris les mêmes options. Par contre, je vois pas le rapport entre l’intervention des russes (bombardement) et celles des américains en Irak (invasion massive, renversement d’un gouvernement, mise au placard de l’armée, ....) qui est elle à l’origine de cette instabilité au moyen orient...

  • Le 7 octobre 2015 à 14:11, par Pima En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Une guerre ou la paix n’a pas été pensée, où la paix a été ratée ???? En effet, c’est le cas de la seconde guerre mondiale, mais plus près de nous c’est le cas :
     de l’Irak
     de la Libye

    Poutine n’a manifestement et malheureusement pas de leçon à apprendre de la part des occidentaux. La France s’est fait entendre une dernière fois avec Chirac et Villepin qui se sont opposé aux américains. Je constate que l’Europe actuelle, qui aurait pu présenter une position médiane entre les américains and les russes, se contente de servir les plateaux aux américains. Entre temps, la diplomatie française a disparu de la scène internationale avec la disparition de la voie de le France, noyée dans le malstrom européenno-OTANnien ....

  • Le 7 octobre 2015 à 14:24, par malko En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    En 2003, les USA ont détruit l’état en place pour permettre au islamistes de s’installer. Aujourd’hui, Poutine veut renforcer l’état en place pour détruire les islamistes. Cette intervention russe est donc plutôt l’opposée de celle de 2003.

    Ca n’enlève en rien les risques d’embourbement mais les objectifs sont clairement différents.

    D’ailleurs la plupart des néoconservateurs qui soutenaient le conflit de 2003 sont opposés à celui-ci, ce qui montre les limites de votre raisonnement.

  • Le 7 octobre 2015 à 21:25, par Lame En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Les gouvernements russe, iranien, syrien et irakien ont mis en place une coordination militaire étroite qui sera organisé par une commission commune quadripartite. Les Occidentaux ont surtout critiqué les gouvernements irakiens et syriens et gêné leurs livraisons d’armement.

    Ils ont un objectif clair : éliminer les opposants des gouvernements syrien et irakiens. On peut évidemment ronchonner contre le soutien au dictateur Assad mais la seule alternative est une régime jihadiste pire encore et bien plus nuisible à l’UE. Avant la crise, on s’accommodait bien de la Syrie d’Assad qui n’est jamais qu’un dictateur parmi les nombreux de la planète ... et des carnets d’adresse de nos gouvernements.

    La Russie met en oeuvre tous les moyens nécessaires pour y arriver : des livraisons d’armes de tout type dont des hélicoptères et des drones, des bombardements aériens, des conseillers techniques et bientôt des unités terrestres. La diplomatie préliminaire de la Russie et son réseau d’alliances garantit aux Quatre de nombreux soutiens : ses alliés de l’OTSC, la Chine et autres pays de l’OCS, l’Inde et le Pakistan, Israël...

    Comparativement, la coalition anti-daech orientale est un bloc uni avec une politique claire mise en oeuvre de manière crédible alors que la coalition occidentale est un patchwork de membres de pays sans réelle unité, qui poursuivent tous des buts différents, sans réel volontarisme dans le cas des Occidentaux, par des moyens infâmes dans le cas des Orientaux. Pensons à la Turquie qui soutient tantôt les jihadistes de l’Armée Syrienne Libre, tantôt Daech. Pensons au Qatar et à l’Arabie saoudite qui soutiennent Al-Nosra (branche d’Al-Qaida) et d’autres groupes islamistes. Les Kurdes, les chrétiens et le druzes ont certainement un point de vue moins arrêté que les Occidentaux sur Assad.

    En tant qu’Européen, je considère la Russie comme un ennemi de l’UE. Mais il faut bien reconnaître que Putine a géré l’affaire de main de maître. Le monde le verra bientôt comme celui qui aura restauré l’ordre là où les USA ont semé (in)volontairement le chaos. Un ordre établi à son profit et au détriment de l’influence américaine. Franchement, aucun rapport avec Bush.

  • Le 14 octobre 2015 à 11:44, par William Boggis En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    Je commence à regretter d’avoir soutenu le Taurillon sur Ulule...

    Déjà, Yalta n’est qu’un prétexte rhétorique n’ayant pour but que de rendre présentable une offensive : décrire ce qu’était vraiment Yalta (et encore, la vision soutenue par l’auteur se discute dans le cas présent) est donc hors sujet.

    Ensuite : le christianisme de Poutine est aussi sujet à caution. Etre chrétien en Russie, c’est un peu comme être républicain en France ou Patriote aux Etats-Unis (en politique, j’entends) : la part de rhétorique que cela peut possiblement impliquer doit donc être prise en compte, ce qui n’est absolument pas fait. Cela me fait penser à un autre exemple : pourquoi la Russie n’a-t-elle adopté la loi contre la propagande homosexuelle qu’au moment précis où le mariage homosexuel était adopté en France, au Royaume-Uni, par la Cour Suprême aux Etats-Unis ? Quelle est la part de calcul stratégique dans cette annonce ?

    Un axe Iran-Russie pro-chiite... N’avez-vous aucune impression qu’il existait déjà ? Et en dehors de cette vision un peu binaire, le fait que la Russie cherche simultanément à garder de bonnes relations avec Israël qui lui-même recherche un possible partenariat avec l’Arabie Saoudite, qu’est-ce que cela signifierait ?

    Et un affrontement purement militaire... Là-encore, c’est de la rhétorique. Moscou doit aussi gérer le Caucase, l’Asie Centrale, de possible risques liés au fait que de plus en plus de groupes islamistes de ces espaces géopolitiques prêtent allégeance à ISIS, aussi gérer sa position diplomatique par rapport à l’Occident, maintenir ses rapports avec l’Iran qui pourraient lui échapper selon l’évolution des rapports des Occidentaux avec ce pays (connait-on déjà la suite de l’accord sur le Nucléaire Iranien ? Non.).

    Bref : L’auteur pourrait peut-être avoir raison quand à la conséquence finale de l’offensive russe, mais son article ne présente pas la moindre finesse d’analyse.

  • Le 18 décembre 2015 à 05:08, par marc-andré veilleux En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    À l’auteur de l’article M Brunner. Vous devriez lire les commentaires de vos lecteurs et faire votre examen de conscience n’est ce pas ?

  • Le 18 décembre 2015 à 21:50, par Alexandre Marin En réponse à : Vladimir Poutine en Syrie ou le George W. Bush russe

    « À l’auteur de l’article M Brunner. Vous devriez lire les commentaires de vos lecteurs et faire votre examen de conscience n’est ce pas ? »

    Un examen de conscience, carrément ?

    Je vous signale juste que les commentaires sont faits pour apporter à l’article un complément et/ou une critique, qu’elle soit positive ou négative. Ils ne servent ni à apostropher l’auteur ni à le juger.

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