Le livre « Entrons en dissidence » ressemble beaucoup à un premier livre d’un futur candidat à la présidentielle en France : Yannick Jadot y parle de son parcours pour expliquer sa vision d’aujourd’hui et donne ainsi une cohérence globale à son action. Cependant, ce livre lui ressemble aussi par une capacité à traiter tous les sujets sous le prisme d’une grille de lecture écologiste et pro-européenne.
L’Europe à la fin, l’Europe un peu partout
Quand on commence un livre écrit par un eurodéputé, on s’attend à ce qu’il nous explique tous les grands sujets de sa mandature. Yannick Jadot élargit le sujet. Il aborde différents débats bien français : l’écologie, soutenir ou non l’industrie, le jacobinisme, faut-il avoir peur des « Chinois » ou encore comment produire du « made in France ». La question européenne en tant que telle est abordée à la fin pour dénoncer ceux qui font du niveau supranational le « coupable presque parfait ». Sa conclusion également est abordée sous l’angle européen et empêche de s’enfermer dans un débat franco-français puisque les enjeux globaux malgré leurs diversités nationales sont les mêmes.
Heureusement, l’eurodéputé évite l’écueil de ne parler que de la France ou que de l’Europe suivant les chapitres. Tout au long du livre, il apporte des touches « européennes » au débat, notamment sur l’agriculture et le climat. Un livre politique bien français donc, mais européanisé.
Une vision décentralisée de l’action politique
Sur le fond, Yannick Jadot se place dans la droite ligne des Verts qui contestent le jacobinisme à la française. On sent le député européen marqué par son expérience, très écologiste, des petits projets qui changent notre manière de consommer par leur accumulation et leur diffusion. Il aborde ainsi la question des PME qui sont le socle du développement futur de nos territoires. Or pour ne pas tomber dans le « localisme », il appelle à prendre en compte les stratégies d’actions à mener à travers une vision supranationale.
Il dénonce donc cette manie française des grands projets qui étouffent les initiatives locales mais qui est incapable de défendre une industrie face à des Etats-continents développant une vraie stratégie commerciale et de production. C’est le cas de l’industrie photovoltaïque où les Etats n’ont pas défendu leurs entreprises de manière européenne face aux entreprises chinoises totalement subventionnées. Il démontre aussi au passage la faiblesse de la Commission dans cette affaire face aux dirigeants nationaux jouant chacun leur carte, Angela Merkel en tête.
Yannick Jadot propose des solutions au niveau national aussi. Il essaye ainsi d’aborder la relance de notre économie à tous les niveaux. On aimerait que nos dirigeants nationaux de droite et de gauche en face autant, mais l’eurodéputé écologiste y arriverait-il une fois arrivé au pouvoir ?
L’Europe comme antidote au Front National
La dernière partie du livre est donc consacrée à l’Europe. Il propose de passer un cap démocratique pour que l’Union européenne ne puisse plus servir de bouc émissaire. Cela passera notamment par une légitimation démocratique par les urnes de la Commission en lien avec le Parlement européen. Yannick Jadot rappelle à raison que c’est « l’Europe » qui trinque pour les décisions prises sur Chypre en catimini durant un Conseil européen ou après les décisions très impopulaires en Grèce d’une Troïka au mode de fonctionnement très flou pour les citoyens... et les eurodéputés.
On regrettera juste qu’il n’aborde pas la question de la transformation de Europe Ecologie Les Verts en véritable parti européen. Cette dimension est très peu abordée dans le livre alors qu’il démontre que l’antidote au Front National passe par le niveau européen :
À l’heure où tout est transnational, il est illusoire de croire à un antidote français pour soigner le mal incarné par Marine Le Pen. Il s’agit de refonde un pacte avec nos concitoyens. En commençant par leur dire la vérité sur le monde dans lequel nous vivons, sa complexité, ses défis comme ses opportunités, leur dire la vérité sur les forces réelles de l’État et la pertinence du cadre national
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On ne peut donc qu’être d’accord quand il appelle à ce que les eurodéputés se saisissent de l’avenir de l’Europe par le biais d’une constituante pour inventer une nouvelle « République européenne ». Le tout en commençant par imposer le candidat du parti vainqueur aux élections européennes pour prendre la tête de la Commission face aux États.
En conclusion, Yannick Jadot nous offre un livre avec une vision cohérente pour transformer la France et l’Europe. Cela nous permet d’être d’accord ou pas avec cette offre politique écologiste mais nous oblige aussi à prendre les problèmes dans toutes leurs dimensions : locales, nationales et européennes.
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